La face cachée de...

L’entreprise, tout le monde y a réfléchi dessus.

Qu’on soit en dedans, en tant que salariés ou dirigeants, ou même qu’on soit en dehors, en tant qu’universitaires, contestataires, consultants ou bien même rêveurs utopistes, on a tous, un jour ou l’autre, à l’occasion d’un apéro prolongé, d’une discussion très sérieuse ou d’une mission, on a donc tous, un jour ou l’autre, essayé de refaire le monde en général et celui de l’entreprise en particulier.

On a tout d’abord tenter de renforcer la structure de son organisation afin que, tel un squelette, elle puisse tenir et coordonner les forces vives en mouvement vers un objectif commun.

Mais ce n’était pas suffisant. Alors, avec Fayol, on a utilisé la lumière que la Science apporte sur les choses pour optimiser les petits mouvements.

Mais ce n’était toujours pas suffisant car Friedberg et Crozier ont démontré que, dans tout système, chaque personne trouve toujours un espace de responsabilités et d’actions dans lequel elle est complètement autonome… et libre !

Et puis, il y a eu ce ras-le-bol de ces managers qui n’étaient pas courageux, qui ne jouaient que des jeux de pouvoirs… pour eux, qui bridaient l’organisation et la créativité des personnes.

Alors, l’idée a jailli. On ne sait jamais qui en a été cet Archimède, ni où et à quelle occasion il a poussé son célèbre « Euréka ! ». Mais, elle est maintenant là : il y a un problème avec les managers ; finalement, ils desservent le collectif, et bien… On n’a qu’à supprimer le management. Plus de contraintes, plus de reporting qui ne servent à rien ! Au contraire, plus de liberté, plus de fun, plus de créativité, plus de « je m’éclate au boulot parce que je n’ai pas de chef, ou plutôt, je suis mon propre chef ! »…

« Et puis, tant qu’on y est, on pourrait aller plus loin », ont-ils pensé. Et c’est ainsi qu’on a supprimé aussi l’organisation RH. Après tout, chacun est un peu le DRH de lui-même, donc, enfin, les RH vont servir à quelque chose. Par exemple, si une personne veut se former, sans manager et sans RH, elle ne risque pas d’avoir des bâtons dans les roues du plan de formation.

Tout allait donc pour le mieux dans le meilleur des mondes après ce joyeux et révolutionnaire Euréka ! Tout le monde était à la tâche, investi et auto-responsabilisé dans son activité.

Tout allait bien…

Pourtant…

Oui, c’est vrai, il y avait bien quelques petits couacs sans importance. Par exemple, il arrivait souvent que le travail soit fait plusieurs fois… ou bien pas du tout. En même temps, quand chaque pièce du puzzle dessine son propre contour en fonction d’elle-même, de ce qui l’intéresse et de ce qu’elle aime faire, on a forcément des pièces qui ne s’emboitent pas, qui se chevauchent ou bien, entre lesquelles il y a du vide… A l’échelle du global, ses petits problèmes mineurs de périmètre étaient peu visibles.

Puis, il y a eu le retour au charisme. Un peu comme dans la cour d’école, si on se souvient, où il y avait la « commandeuse » ou le « chef » qui imposait ses règles, sa façon de jouer et de gagner, car le chef a toujours raison et gagne toujours... Finalement, quand on y réfléchit, c’est juste l’instinct grégaire de l’homme qui le fait se rassembler autour d’un but, d’une raison, d’un objectif. Et, comme l’a démontré Max Weber, ce qui différencie une foule d’une organisation, c’est, entre autre, la hiérarchie.

Oui, mais, on a dit Euréka et plus de hiérarchie !

Ce n’est pas grave, car, par essence, ce sont les leaders, ces personnes charismatiques, qui émergent et qui leadent les autres. Et qui, peut-être, leur mettent un peu plus de pression parce qu’elles ont émergé du collectif par leur caractère trempé. Comme il n’y a plus de RH, il n’y a pas d’endroits où se plaindre d’un mauvais traitement. Et le collectif fait bloc autour d’eux… Il n’y a plus de sas de décompression, plus d’endroits où la pression du business est amortie !

Donc, si on a un souci ou bien simplement un simple désaccord, la seule option viable est de quitter l’organisation.

Cet Euréka ne semble pas avoir résolu ni amélioré grand-chose…

Et pourtant, l’idée était bonne…

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