Lorsqu’une entreprise réalise une acquisition, les aspects humains ne sont souvent abordés de façon structurée que sous l’angle des questions juridiques, des relations avec les partenaires sociaux et du recensement des dispositions sociales applicables à chacune des entités. Or une grande partie de ces opérations échouent ensuite du fait de facteurs humains : difficultés de coopération, avec des comportements de prédateurs d’un côté, de peur de l’autre, incompatibilité des cultures, organisations désalignées, mauvais choix individuels, etc.

Toutes les études sur le sujet démontrent que les deux tiers des opérations de croissance externe se soldent par des échecs, dont une grande partie du fait d’une sous-estimation des enjeux humains. Elles présentent un risque fort de désalignement stratégique et c’est bien sur ce terrain que se posent les enjeux ressources humaines.

Un plan d’intégration pensé et structuré

Éviter ces dérives et la destruction de valeur qui en découle suppose que les dirigeants ne traitent pas seulement au fil de l’eau les questions posées par cette opération, mais qu’ils adoptent une approche proactive de ces enjeux, avec un plan d’intégration pensé et structuré qui couvre les différentes dimensions à traiter.

L’expérience permet d’identifier les chantiers à mener. Pour réussir une opération de ce type, plusieurs axes doivent être travaillés.

La construction d’une culture commune

Quels comportements, références, représentations, interactions doivent désormais adopter les personnes, à partir de leurs histoires respectives ? Il s’agit de fusionner ces équipes et de construire le logiciel commun, qui permettra de les dynamiser et d’assurer la réussite de l’ensemble.

Pour prendre une image, une acquisition est un « mariage de raison » pour certains, un « mariage forcé » pour d’autres, et il s’agit d’en faire à terme un « mariage d’amour ».

La définition de l’organisation

De quelle organisation (structures, métiers, modes de fonctionnement, processus de décision, etc.) l’entreprise a-t-elle besoin durant ces années d’intégration ? Faute d’être travaillés, les modes de fonctionnement effectifs de l’entreprise peuvent être freinants, voire bloquants dans ce processus d’intégration.

À l’organisation qui serait aidante se substituent dans ce cas des hiérarchies officieuses et des modes de fonctionnement opaques qui rendent l’ensemble de la structure inefficace ou la mettent au service d’autres objectifs que ceux que se donne l’entreprise.

La mise en place du management

Quels managers (quelles pratiques, quel « casting ») durant cette phase ? À défaut de ligne managériale alignée, c’est l’ensemble de l’entreprise qui vivra de multiples phénomènes handicapant la réussite de l’intégration : résistances, retards dans la mise en œuvre, désengagement des collaborateurs, départs regrettés, résultats économiques décevants.

La formalisation des politiques RH

Quelles politiques RH (performance, rémunération, gestion proactive des effectifs, etc.) mettre en place pour réussir cette opération ? Elles structureront les pratiques de la nouvelle entité.

C’est parce que l’entreprise aura fait les bons choix en matière de gestion de la performance, de dispositifs de reconnaissance et de politique de rémunération, notamment, qu’elle générera les comportements dont elle a besoin pour réussir dans la durée cette opération.

L’élaboration d’un projet partagé

Pour que tous se projettent dans la même direction au lieu de regarder dans le rétroviseur, quel projet construire avec les équipes issues des deux entités ? Aucune entreprise ne peut se développer si elle ne génère pas et n’anime pas une dynamique en son sein. Ce constat est particulièrement vrai concernant une entité à intégrer après une acquisition.

Participer à l’élaboration et à la mise en œuvre d’un projet partagé et mobilisateur, c’est regarder ensemble vers l’avenir. Sans cet élément clé du dispositif d’intégration, c’est vers le passé que l’ensemble des préoccupations se tournent.

En transversal, l’enjeu de la posture des dirigeants. Chacun de leurs actes, décisions, prises de position est analysé, sur-interprété. La « bataille des cœurs » peut être perdue faute de les travailler.

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