Dans le contexte actuel, les entreprises sont un peu obligées de réviser leurs ambitions stratégiques, et de gérer leurs perspectives à plus court termes. Plus trivialement : la gestion des affaires courantes et les reportings constants l’emporte sur la visibilité et la créativité. Or cette réalité n’est pas sans conséquences sur leur avenir, tant en termes de développement que de ressources humaines.
Les décisions courantes visent les gains de productivité ; une décision stratégique vise les gains de compétitivité en améliorant l’efficience de l’entreprise. Une précision de vocabulaire s’impose ici :
-La productivité relève de « l’efficacité », c’est à dire de la capacité maîtrisée et programmée de produire le maximum de résultats avec le minimum d’efforts et de dépenses.
-« L’efficience » est d’un autre ordre : elle est la faculté de produire un effet à partir de causes ou de principes actifs qui agissent réellement et permettent de développer un potentiel.
Nous dirons, par exemple d’un placebo qu’il est « efficace », mais pas qu’il est « efficient ». Transposé à notre sujet, une gestion des affaires courantes peut s’avérer efficace… sans créer l’effet de développement que vise une véritable décision stratégique.
En effet, paradoxalement, l’efficacité ne crée pas de valeur ; la performance, elle, exige l’efficience. Et, en matière de décision, l’efficience repose d’abord sur un fond conceptuel réfléchi et une combinatoire créative. Il faut bien dire que ceci fait parfois mauvais ménage avec les structures hiérarchiques policées auxquelles nous sommes très attachés. C’est que l’efficience – et la créativité qui lui est connexe – fait peur à tous, à cause de ses effets non maîtrisés a-priori. L’amélioration de l’efficacité, quant à elle, ne comporte pas grand risque et satisfait ceux qui ont le pouvoir dans l’entreprise : les financiers et les actionnaires, car elle paye à court terme. L’efficience peut s’avérer beaucoup plus payante à moyen et long terme, mais la prise de risque est telle que le système la bride avant même qu’elle ait pu voir le jour. On n’a jamais tant parlé de « management des connaissances »… et cette notion n’a jamais résonné aussi creux.
Le paradoxe est d’obtenir un sens de l’innovation en interdisant ou en limitant étroitement celui de la créativité. Disons que ce paradoxe crée, à minima, une démotivation dommageable, même chez les volontaires les plus zélés.
Il convient peut-être de rappeler que l’avenir n’appartient pas à ceux qui voient « plus » le plus vite possible, mais à ceux qui voient « mieux » et plus « loin ».
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