Cumuler un contrat de travail et un mandat social, c’est possible mais uniquement sous certaines conditions

Sous certaines conditions, il est effectivement possible de cumuler à la fois un mandat social (directeur général, président etc.) et un contrat de travail, et partant, de bénéficier de la protection accordée par le droit du travail et de cotiser à l’assurance chômage.

Outre la question en droit des sociétés des conventions réglementées qui oblige au préalable d’obtenir l’autorisation d’un organe de la société pour un tel cumul pour certaines formes de société, ce dernier n’est possible que si 3 conditions cumulatives sont réunies :

  • l’existence de fonctions distinctes du mandat social,
  • l’existence d’un lien de subordination,
  • l’existence d’une rémunération distincte.

Que doit-on entendre par fonctions distinctes du mandat social ?

L’emploi au titre du contrat de travail doit correspondre à un emploi effectif distinct, c’est à dire, à des fonctions spécifiques, techniques.

Bien qu’il s’agisse d’une question de fait et ainsi par principe impossible à définir avec certitude, on peut considérer que la fonction technique correspond à la réalisation de l’objet social.

Pour prendre un exemple concret, imaginons une entreprise dont l’objet social serait la production audiovisuelle et dont le président/gérant assumerait par ailleurs les fonctions de producteur/réalisateur au titre d’un contrat de travail.

Dans cette situation, ce cumul pose une difficulté dans la mesure où le mandataire gérant a la responsabilité tant de la direction générale de l’entreprise que de la réalisation de l’objet social de la société, à savoir la production audiovisuelle.

Ainsi, et même si le contrat de travail est précis sur la réalisation des tâches qui sont confiées, les fonctions ne sont pas réellement distinctes de celles de président/gérant de la société.

Que doit-on entendre par l’existence d’un lien de subordination juridique ?

Le lien de subordination est défini comme le pouvoir de direction, de contrôle et de sanction.

Il peut se manifester par des instructions précises, ou le fait qu’au titre de son activité salariée, l’intéressé soit tenu de rendre compte de son activité technique, ou que ses horaires fassent l’objet d’un contrôle.

Gardons l’exemple de notre entreprise de production audiovisuelle. Si cette dernière dispose d’un effectif restreint, on peut difficilement envisager un quelconque lien de subordination juridique du président par ailleurs salarié.

Dans une situation réellement jugée, après deux ans en qualité de directeur de production, un salarié d’une SARL a été nommé gérant de celle-ci.

Il a été décidé que le cumul n’était pas possible dans la mesure où le monopole des connaissances techniques et l’étendue des pouvoirs du gérant dans cette société de petite dimension excluaient l’existence d’un lien de subordination et avaient démontré que le mandat social avait absorbé les fonctions salariales.

Par ailleurs, la seule affirmation par l’assemblée générale du maintien du contrat de travail et l’existence d’une double rémunération n’étaient pas suffisantes pour établir la poursuite effective de l’activité salariée.

Prenons également l’exemple d’une société d’expertise comptable, composée de 6 experts comptables à la fois salariés, actionnaires et administrateurs de la société ayant mis en place un dispositif d’intéressement.

Suite à contrôle, l’URSSAF a procédé au redressement de la société, considérant qu’il n’existait aucun lien de subordination juridique entre la société et les experts comptables.

La juridiction a donné raison à l’URSSAF en considérant que s’il n’était pas discutable que les experts comptables exerçaient tous des fonctions techniques de comptables, distinctes de leur mandat social, la répartition égalitaire du capital social entre eux et donc du pouvoir de décision quant à la gestion de la société, à la détermination des conditions de travail et de leur rémunération, à l’élaboration des méthodes de travail et des procédures à suivre, ne permettait pas de retenir sérieusement l’existence d’un lien de subordination juridique.

Que doit-on entendre par rémunération distincte ?

L’existence d’une double rémunération constitue un indice de la réalité du contrat de travail mais doit être appréciée en fonction des autres éléments.

En d’autres termes, la double rémunération peut permettre de corréler l’existence de fonctions distinctes, et d’une subordination juridique, mais n’est pas un élément essentiel.

Qu’en conclure ?

Le cumul contrat de travail et mandat social n’est pas si simple qu’il n’y parait et quand bien même le mandataire social disposerait d’un contrat de travail écrit et signé par ses soins, ce contrat serait considéré comme étant purement fictif.

Pour sécuriser le cumul, outre faire bien évidemment appel à un avocat expert dans le domaine, il est toujours possible d’interroger Pôle Emploi via un rescrit.

Notons à ce titre que la réponse de Pôle Emploi est opposable à l’URSSAF.

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