Pendant le mois d'août, nous publions à nouveau quelques-uns des textes les plus lus de l'année.


Lors de l’embauche d’un salarié, l’employeur à une obligation importante pour formaliser la relation qui le lie avec le salarié, qui est de lui transmettre un contrat de travail en bonne et due forme.

Cependant, il est possible que la transmission du contrat ne se passe pas dans les meilleures conditions : l’employeur peut ne jamais écrire de contrat, le salarié peut avoir commencé le travail dans l’entreprise sans pour autant recevoir le contrat des mains de son employeur, mais le salarié peut aussi refuser de signer le contrat de travail alors que son employeur lui intime de le faire et le lui a transmis. Il est même possible que le salarié, après avoir sondé le contrat de travail, décide de ne pas le signer et de quitter l’entreprise.

Que peut-il se passer dans de telles situations ?

I) La non transmission du contrat de travail de la part de l’employeur

La préparation et la rédaction du contrat de travail est une étape particulièrement importante et peut avoir des conséquences juridiques non négligeables. Tout simplement, faute d'écrit, le contrat de travail à durée déterminé (CDD) sera automatiquement requalifié de contrat à durée indéterminée (CDI) sans recours possible, en cas de demande du salarié auprès du conseil de prud’hommes ( C. trav., art. L. 1242-12 ).

En effet, le CDI à temps plein n'est pas obligatoirement écrit. En revanche, les autres formes de contrat (temps partiel, CDD, etc.) doivent être constatées par écrit.

En revanche,la situation est différente lorsque l’employeur ne transmet pas le CDD, pourtant rédigé, au salarié dans un certain laps de temps.

Jusqu’en 2017, lorsque l’employeur ne transmettait pas au salarié le CDD dans les 2 jours ouvrables suivant l’embauche, cette transmission tardive constituait une absence d’écrit, qui entraînait la requalification du CDD en contrat à durée indéterminée (cass. soc. 17 juin 2005, n° 03-42596, BC V n° 203 ; cass. soc. 13 mars 2013, n° 11-28687, BC V n° 69).

L’ordonnance du 22 septembre 2017 mit fin à cette jurisprudence.

Dorénavant, la transmission tardive du contrat ouvre droit, pour le salarié, à une indemnité d’un montant maximal d’un mois de salaire(c. trav. art. L. 1245-1 modifié, mod. par Ord. no 2017-1387, 22 sept. 2017, JO 23 sept.). En revanche, l’ordonnance ne dit pas si, pour obtenir cette indemnité, le salarié devra prouver son préjudice comme cela est désormais exigé par les juges dans les contentieux où il réclame des dommages-intérêts à son employeur en raison d’une irrégularité de procédure (cass. soc. 13 avril 2016, n° 14-28293 FSPBR).

Il faut distinguer deux situations : celle ou le salarié n’a jamais vu son contrat et celle ou le salarié ne reçoit pas sous deux jours le CDD des mains de son employeur alors que ce dernier l’a embauché.

II) Le refus du salarié de signer le contrat de travail

Il est possible que le salarié ne signe pas le contrat alors que l’employeur le lui a transmis. En principe, un CDD qui n’est pas formalisé par la signature des deux parties est passible d’une requalification en CDI si le salarié saisit le juge.

La signature d’un CDD a le caractère d’une prescription d’ordre public. Le CDD est obligatoirement écrit et signé et doit comporter la définition précise de son motif. Dans le cas contraire, il est réputé conclu pour une durée indéterminée.

En l'absence de contrat écrit, l'employeur ne peut écarter une telle présomption en apportant la preuve de l'existence du contrat verbal conclu pour une durée déterminée (Cass. soc., 21 mai 1996, no 92-43.874).

Le même régime s'applique lorsque le contrat de travail ne comporte pas la signature du salarié. En effet, l'employeur ne peut pas mettre en avant le fait que le contrat étant écrit, le contrat est un CDD. Le contrat reste réputé conclu pour une durée indéterminée (Cass. soc., 22 oct. 1996, no 95-40.266 ).

Par conséquent, l'absence de signature équivaut à une absence d'écrit et donc, a une absence de CDD, laissant la porte ouverte à une requalification en CDI. L’employeur ne peut pas considérer qu'en l'absence d'écrit, le CDD est requalifié en CDI, mais uniquement le salarié.

Néanmoins, il y a une petite exception : jusque-là, la Cour de cassation ne faisait aucune distinction selon la raison de l’absence de signature : qu’elle soit de la faute de l’employeur ou consécutive à un refus de signature du salarié, la requalification était encourue (Cass. soc., 26 oct. 1999, no97-44.992).

Depuis un arrêt de la Cour de cassation en date du 7 Mars 2012, tout cela à changé lorsque le défaut de signature découle d'un choix délibéré du salarié.

En effet, si le salarié refuse délibérément de signer le contrat en raison de sa mauvaise foi ou dans une intention frauduleuse, le salarié ne pourra pas obtenir la requalification de son CDD en CDI. (Cass. soc., 7 mars 2012, pourvoi no 10-12.091).

Dans le cas d'espèce, une salariée fut engagée du 4 septembre 2006 au 28 juin 2007 dans le cadre de CDD successifs à temps partiel. Des contrats écrits lui ont été remis à chacune de ses interventions, mais la salariée a refusé de rendre les contrats avec sa signature, malgré notamment un rappel par courrier recommandé rappelant un autre courrier resté lui aussi sans réponse.

La difficulté lorsque l'on est en face de la non signature du contrat repose sur la manière de prouver la mauvaise foi : l'employeur doit alors mettre en avant le fait que le salarié fut conscient du sens de ses actes, qu'il a agi délibérément.

La mauvaise foi s'observe lorsque le salarié sait que sa signature est une condition de validité du CDDou que son refus constitue un acte volontaire et réfléchi.

L’intention frauduleuse quand à elle se produit lorsque le salarié refuse de signer le CDDdans le but de mettre en avant la requalification du contrat en CDI. (Cass. soc., 9 mars 2011, no 09-65.433).

En guise de conclusion, il faut donc toujours se méfier lorsqu'un contrat de travail n'est pas signé par le salarié, la requalification n'est jamais loin...

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