82,5 % des décideurs et managers se déclarent « être préoccupés par le départ de leurs collaborateurs » selon une étude de 2017 du cabinet de recrutement Robert Half.[1] 82,5% c’est tout simplement vertigineux… Alors comment peut-on y remédier ?

La solution réside dans la formalisation et la mise en œuvre d’une véritable stratégie d’offboarding propre à chaque entreprise. Il existe selon moi 7 étapes clés incontournables dans tout processus d’offboarding. Ces étapes sont bien évidemment à personnaliser et à adapter en fonction de la structure, de ses objectifs, de ses valeurs, de sa culture et enfin en fonction du niveau d’engagement et de satisfaction apporté par le collaborateur qui part.

Quelle que soit la cause du départ, il est cependant important que l’entreprise se positionne dans une logique de valorisation afin de transformer un ex-collaborateur en ambassadeur, en futur « salarié boomerang » ou en même en futur client, partenaire ou fournisseur.

1. Communiquer sur le départ auprès de l’équipe

La première étape d’un offboarding réussi est de communiquer le plus tôt possible sur le départ du collaborateur auprès des membres de son équipe et des principales personnes concernées et impactées.

J’enfonce une porte ouverte me-direz-vous…. J’aimerais pouvoir vous répondre un oui franc mais force est de constater que cela n’est malheureusement pas aussi évident que cela dans la pratique.

Dans les faits, de nombreuses entreprises ont l’habitude de retarder au maximum l’annonce du départ d’un de leur collaborateur et d’autant plus longtemps que le salarié occupait une fonction importante.

Elles redoutent, en effet, l’impact de cette annonce et le « choc » que cela pourrait provoquer. Elles temporisent donc au maximum car elles ne veulent pas prendre le risque de démotiver l’équipe restante.

A ces raisons, peuvent s’ajouter d’autres facteurs plus « psychologiques » suivant le contexte concret du départ. Dans le cas d’un départ choisi et décidé par le collaborateur lui-même, il est malheureusement fréquent que l’entreprise vive cette décision comme un camouflet voire une trahison. L’entreprise n’approuvant pas ce départ qu’elle « subit », elle décide alors de faire le service minimum.

J’estime que ces raisonnements sont erronés. Qu’une entreprise le veuille ou non, l’information sortira de manière informelleet pourra même donner lieu à des rumeurs et générer une mauvaise ambiance de travail. Alors autant annoncer au plus tôt les départs et rester maître de la communication sur le sujet. Cela nécessite une bonne dose de courage managérial mais évite d’en faire un sujet tabou et dédramatise finalement la situation.

Ceux qui restent apprécieront la transparence et seront rassurés. Quant au collaborateur qui part, il appréciera également cette franchise et il sera d’autant plus à l’aise pendant sa période de préavis qu’il n’aura pas à dissimuler son départ.

Idéalement, il est bien que ce soit la personne sur le départ qui annonce elle-même la nouvelle. En fonction des situations, cela n’est cependant pas forcément possible ni souhaitable. Il revient alors au manager direct d’annoncer le départ en s’efforçant de rester neutre, factuel et objectif sur le contexte et les raisons.

2. Organiser la passation de poste et des connaissances

Qui dit départ d’un collaborateur dit perte de capital humain sous forme de connaissances et de compétences spécifiques à son activité. Afin qu’un minimum de ce capital humain ne soit perdu, il convient d’organiser au mieux la transmission des connaissances et la passation de poste entre la personne sortante et son successeur - si celui-ci est déjà trouvé et identifié - ou bien avec les autres membres de l’équipe qui prendront temporairement le relais.

Idéalement, il faut qu’il y ait un chevauchement d’environ un mois entre les contrats du collaborateur sur le départ et de celui qui va lui succéder. Dans la mesure du possible, il convient de fixer des objectifs de passation de poste pour ses dernières semaines au futur ex-collaborateur.

Si cela n’est pas possible, il faut demander à l’offboardé de préparer un guide sur son activité au quotidien recensant ses missions, ses bonnes pratiques et toutes les informations qu’il juge nécessaires à la facilitation de la prise de poste.

3. Faire le bilan lors d'un entretien final

Une entreprise performante est celle qui sait écouter les critiques, se remettre en question et enfin s’adapter. Il est donc important pour une entreprise de saisir l’opportunité du départ d’un collaborateur pour effectuer de vive voix un entretien final ou « exit interview » de 60 à 90 minutes qui permettra de recueillir un feedback constructif sur ses atouts mais surtout sur ses faiblesses ou axes d’amélioration. Les salariés sur le point de partir sont, en effet, plus à même de tenir un langage de vérité et de révéler ce qui les a dérangés tout au long de leur parcours que les salariés actuels.

Il serait dommage de rater cette occasion unique de comprendre les vraies raisons de ceux qui partent et d’améliorer ainsi l’expérience collaborateur et le fonctionnement général de l’entreprise.

Cela étant dit, comment procéder concrètement ?

Tout d’abord, il est d’usage que l’entretien ne soit pas conduit par le N+1 direct de l’offboardé car cela serait susceptible de mettre mal à l’aise et de verrouiller la parole du collaborateur sur le départ. Il se peut, en effet, que ses relations avec son manager actuel soit la ou l’une des principales raisons de son départ. Il est donc plus judicieux de confier l’entretien à un manager neutre et idéalement à un professionnel des ressources humaines. Ce dernier se fera un devoir d’écouter au maximum les retours du salarié et de ne surtout pas porter de jugement sur ce qu’il entend.

En ce qui concerne le timing et le nombre d’entretiens à conduire, je conseille de procéder en deux étapes distinctes.

- Conduire un premier entretien en face-à-face à mi-parcours du préavis une fois que l’émotion liée à l’annonce du départ a été évacuée et avant que l’employé ne soit totalement désengagé. Selon l’article Making Exit Interviews Count de l’Harvard Business Review, de nombreuses entreprises commettraient l’erreur d’effectuer ce bilan lors de la dernière semaine de présence de l’offboardé et donc une fois que le collaborateur est totalement désengagé. Elles pensent qu’elles obtiendront ainsi des réponses plus honnêtes mais cela ne semble pas se vérifier dans la pratique.

- Transmettre un questionnaire aux anciens collaborateurs 3 à 6 mois après leur départ effectif afin d’obtenir les réponses les plus sincères et fiables possibles. Selon une étude de Joel Lefkowitz et de Myron Katz [2], 59% des ex-collaborateurs qui ont répondu à un questionnaire transmis quelques semaines après leur départ effectif ont donné des raisons expliquant ce départ différentes de celles fournies de vive voix lors de l’entretien final. Et tous ceux qui n’avaient pas évoqué de raison particulière en face-à-face ont mentionné par écrit des raisons très spécifiques et précises.

Il me semble important de procéder en deux temps distincts afin d’obtenir les réponses les plus fiables et « utiles ». Cela rajoute, certes, une étape supplémentaire mais je suis persuadée que le jeu en vaut la chandelle.

Quant aux questions concrètes à poser, il faut surtout veiller à poser des questions ouvertes afin d’influencer au minimum les réponses.

Enfin, cet entretien final est d’autant plus incontournable qu’il permet facilement à l’entreprise de montrer à son collaborateur sur le départ qu’il compte à ses yeux en valorisant son retour d’expérience.

Comme vous l’aurez constaté, 4 étapes clés manquent à l’appel dans cet article, mais rassurez-vous, elles seront développées dans un article à paraître prochainement…


[1] Stratégie de fidélisation des collaborateurs, article de Robert Half 10/05/17

[2] Validity of exit interviews - Joel Lefkowitz et Myron Katz | Personnel Psychology

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