Saison 2 – Episode 3 : Analyse des facteurs de bien-être des salariés au travail et des apports des politiques diversité et RSE au sein des entreprises.

Cet article a été co-écrit avec Mathias Da Cruz (a), Margarida Lourenço Ferreira (b) et Manon Marie (c).
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Dans la continuité des « Breaking news » de l’année dernière, RHinfo permet cette année encore de mettre en avant les analyses de jeunes professionnels RH du master 2 « Management Digital des Ressources Humaines – Spécialisation : gestion de crise » de Institut Mines-Télécom Business School. Ces analyses ont été réalisées dans le cadre de leur mémoire de fin d’études autours d’une problématique posée. Une analyse de ce qui a déjà été écrit sur leur sujet et la conduite d’une mini-enquête de terrain (environ six entretiens effectués en moyenne dans une même organisation ou plusieurs organisations) ont été effectuées autours de cette problématique. Cet épisode 3 de la saison 2 porte sur l’analyse des facteurs de bien-être au travail ainsi que des apports des politiques RSE et diversité. L’analyse a été conduite sur la période allant jusqu’à fin juin 2021.

Le présent article comporte trois parties :

  • La première partie présente les résultats du travail de Manon Marie sur les facteurs de bien-être des salariés au travail,
  • La deuxième partie présente les résultats du travail de Mathias Da Cruz sur les apports d’une politique diversité dans une entreprise (2),
  • La troisième partie présente les résultats du travail conduit par Margarida Lourenço Ferreira sur les apports d’une politique RSE pour une entreprise (3).
  1. Les facteurs de bien-être des salariés au travail

"Les salariés heureux sont deux fois moins malades, six fois moins absents, neuf fois plus loyaux, 31% plus productifs et 55% plus créatifs" (1). C’est le constat porté par des études universitaires du MIT ou de Harvard et repris par Laurence Vanhée, fondatrice du cabinet Happy-formance. C’est également le constat rappelé par Manon Marie en préambule de son étude. S’il était besoin de le mentionner, ce sujet trouve une résonance particulière en cette période de crise sanitaire et de forte augmentation de la « zoom fatigue » et des burn-out.

Forte de cette base, Manon Marie a conduit six entretiens avec des salariés dans des entreprises différentes. La moitié d’entre eux étaient des professionnels des Ressources Humaines tandis que l’autre moitié́ était composée de salariés ne travaillant pas dans ce domaine. La parité a été atteinte puisque trois femmes et trois hommes ont accepté de répondre à ses questions. En ce qui concerne l’âge des personnes interrogées, cette variable est assez hétérogène également. En effet, deux personnes interrogées ont entre 20 et 30 ans, deux autres ont entre 31 et 40 ans, une autre a entre 41 et 50 ans et la dernière a plus de 50 ans. Pour finir, plusieurs secteurs d’activités ont été couverts : Informatique/Télécoms, Santé, ainsi que celui de Commerce/Négoce/Distribution.

Son travail a mis en évidence, dans le cas des personnes qu’elle a interrogées, que la relation avec le manager direct et l’ambiance dans l’équipe sont des facteurs incontournables du bien-être des salariés au travail. L’intérêt des tâches liées au poste est quant à lui un facteur important mais qui n’arrive qu’en troisième position de l’aveu même des salariés interrogés. Manon Marie souligne également que c’est l'agrégation de plusieurs facteurs qui permet d'inscrire le bien-être dans la durée.

Concernant le premier point, la relation avec le manager direct, celui-ci occupe une position centrale de par sa position hiérarchique. Il fait en effet office de « référence », de « repère » auprès des membres de son équipe. A l’évocation des éléments qui plaisent aux salariés interrogés dans leur relation avec leur manager, les mots qui reviennent le plus souvent sont la confiance, la communication et la bonne entente. Cinq des six personnes interrogées indiquent que le lien de confiance mutuelle entre eux et leur supérieur hiérarchique constitue leur attente première. Les managers qui n'hésitent pas à donner des responsabilités aux membres de leurs équipes augmentent leur sentiment de confiance en eux et leur permettent de se sentir épanouis au travail. La relation de confiance s’établit également si le manager se préoccupe des intérêts de ses collaborateurs, qu’ils soient personnels comme professionnels. L’étude révèle aussi que pour maintenir des liens positifs entre le manager et ses collaborateurs, et ainsi maintenir la confiance qui existe entre eux, la communication est fondamentale. La disponibilité du manager pour répondre aux questions ou simplement écouter ses collaborateurs est un levier sur lequel il peut agir pour garantir le bien-être de ses collaborateurs. L’étude indique enfin que les managers ont la capacité de prévenir l’apparition de RPS (risques psychosociaux) au sein de leur équipe via leurs actions en faveur de la promotion du bien-être. Certains salariés interrogés estiment qu’en facilitant leur équilibre vie privée/vie professionnelle (par l’aménagement des horaires par exemple), ou encore en leur permettant d’assister à des formations, le manager contribue à leur bien-être et éloigne les menaces de RPS.

Concernant l’ambiance au sein de l’équipe de travail, l’étude rappelle que l’activité professionnelle s’inscrit fondamentalement au sein d’un collectif. Le simple fait de faire partie d’un groupe de travail semble avoir un réel impact positif sur l’épanouissement professionnel des salariés. L’ensemble des salariés interrogés affirment que le fait d’être intégré dans un collectif de travail leur procure un sentiment d’appartenance qui les rend heureux et qui les rassure. Le collectif permet également de construire le bien-être au travail via la solidarité qui peut en ressortir. Il apparaît aussi que le bien-être social en entreprise se définit par la qualité des relations entretenues avec son équipe de travail. Les notions de soutien social et moral ont une grande importance chez les interrogés. Certains recommandent même de “Prendre un moment pour parler de l’individu sans le pro. Juste dire « Comment ça va ? Tu as mal dormi ? Pas trop stressé aujourd’hui ?»". La communication occupe là aussi une place primordiale, qu’elle soit formelle ou informelle.

Concernant l’intérêt des tâches proposées, l’étude a mis en avant la nécessité de considérer deux dimensions de cet intérêt des tâches (la diversité et responsabilité) et leurs effets contrastés. L’élément qui procure un épanouissement professionnel certain, selon les personnes interrogées, est la diversité des missions qu'offre leur emploi. Le caractère varié des missions que propose un poste est en quelque sorte une assurance quant au fait qu’ils ne connaîtront pas ou très peu l’ennuie dans l’exercice de leurs fonctions. La monotonie semble en effet faire peur. Parallèlement, cinq personnes sur six pensent que leurs responsabilités n’ont pas d’impact direct sur leur épanouissement professionnel. La majorité des personnes interrogées évoquent même le caractère angoissant des responsabilités dans le cadre de leurs fonctions. Ils mettent en avant le caractère stressant et le déséquilibre que celles-ci peuvent engendrer entre leur vie professionnelle et leur vie personnelle.

  1. Les apports d’une politique diversité dans une entreprise

Mathias Da Cruz s’est intéressé aux apports d’une politique diversité dans une entreprise. Pour ce faire, il a réalisé une étude sur la base de trois entretiens et d’une enquête quantitative. Les trois entretiens ont été conduits auprès de collaborateurs de l’équipe diversité et inclusion d’une entreprise internationale ainsi que de l’équipe Engagement Collaborateur & Marque employeur de cette même structure. Le questionnaire a permis de recueillir l’avis de 53 salariés dans d’autres entreprises quant aux apports de la diversité dans leur organisation.

Tout d’abord, son étude démontre que ces politiques sont un vrai outil de communication et de marque employeur pour une entreprise. La représentation de la diversité est en effet l’une des préoccupations actuelles de la société : avoir par exemple plus de personnes issues de différentes origines ethniques dans les publicités ou bien avoir des femmes à des postes à hautes responsabilités. Ainsi, les entreprises communiquent sur le sujet et reflètent une image positive de leur environnement et conditions de travail. De ce fait, cela permet à la fois de favoriser l’engagement des collaborateurs en interne, mais aussi d’attirer les futurs talents en externe. De plus, les clients sont également positivement impactés par ces politiques et cela permet alors de les fidéliser.

Son étude démontre également que les politiques de diversité ont également des apports en termes de business puisqu’elles favorisent la performance des collaborateurs. En effet, les valeurs qu’elles représentent et font vivre au sein de l’entreprise, permettent de contribuer à un climat de confiance au sein de l’organisation. De plus, la diversité des points de vue au sein d’une même équipe apporte beaucoup au groupe. Les différences et les oppositions permettent de penser des solutions plus originales et pertinentes. De ce fait, les entreprises sont majoritairement convaincues des politiques de diversité grâce à cet avantage compétitif, et elles ont également plus de facilité à conquérir des consommateurs internationaux.

Son travail démontre enfin que la mise en œuvre d’une politique diversité nécessite une vraie conduite du changement. De ce fait, c’est un processus qui demande du temps afin que cela fasse partie de la culture de l’entreprise de manière naturelle. Cela induit également une montée en compétence en « soft skills » de la part de l’ensemble des collaborateurs et plus particulièrement, des managers. En effet, le sponsor et l’implication du top management sur le sujet sont des facteurs clés de réussite de ces politiques. Cela montre un réel engagement de l’entreprise sur le sujet.

En complément de ces résultats, il propose deux préconisations fortes : la mise en place de managers ambassadeurs de la diversité et la personnalisation des communications et sensibilisations sur le sujet, en fonction des profils métiers/sensibilités de chacun. Sur le premier point, et afin de sensibiliser au plus près les collaborateurs et de les engager sur le sujet, la mise en place de managers porte-parole de la diversité au sein de leur direction, est importante. En effet, la diversité se trouve au sein de toute équipe mais les avantages qu’elle peut apporter ne sont pas obligatoirement mis en valeur. Cette nomination sera dans un premier temps symbolique et permettra de montrer, une fois de plus, l’engagement de l’entreprise sur le sujet. Ces managers auront pour objectifs d’être clairement identifiés par les collaborateurs en fonction de la thématique attribuée. Aussi, ils seront le relais entre leur direction et l’équipe RH Diversité, en cas de questionnement ou de problèmes rencontrés par les collaborateurs.

Sur le deuxième point, la diversité n’est pas un sujet prioritaire pour les équipes car elles n’y retrouvent pas les enjeux business derrière. Afin de combler cela, il semble également important de mettre en place du contenu personnalisé en fonction du profil métier et de la sensibilité de chaque collaborateur. Ces derniers se sentiraient alors davantage concernés et engagés sur le sujet. Ce contenu sera en grande partie des communication (newsletter interne) et des sensibilisations (formations).

(3) Les apports d’une politique RSE pour les entreprises

Margarida Lourenço Ferreira rappelle que La RSE (Responsabilité Sociale des Entreprises) est un sujet de discussion qui prend une ampleur de plus en plus grande sur la scène internationale. Le contexte économique est en effet marqué par des successions de crises (crise de 2001, crise de 2007, crise de 2019 post-Covid), de crises sociales qui en résultent, de changements de cadre réglementaire, et des conséquences du changement climatique. Tous ces éléments ont un large impact sur les modes d’opération des entreprises. Aujourd’hui, beaucoup d’entreprises envisagent la RSE comme un appui pour la résolution de ces problématiques. A contrario, d’autres remettent en question ses bénéfices potentiels. D’après une étude menée par EcoVadis en 2018, les performances en matière de politiques RSE menées par les entreprises françaises sont au-dessus de la moyenne européenne. Elles se placent même en troisième position dans le classement mondial, derrière la Finlande et la Suisse qui obtiennent les premières positions. Selon cette étude, la place des PME et ETI françaises a également augmenté de 3 points entre 2017 et 2019, montrant que les entreprises croient de plus en plus aux apports des politiques RSE. Il est possible d’observer à partir de ces chiffres une volonté croissante de la part des entreprises de toute taille à investir davantage dans ce domaine. L’état est également moteur de ces changements en utilisant comme levier d’adhésion à la RSE le cadre réglementaire. En 2019, la promulgation de la loi Pacte2, est venue donner la possibilité aux entreprises de devenir « société à mission ».

C’est pour l’ensemble de ces raisons que Margarida Lourenço Ferreira s’est intéressée aux apports d’une politique RSE pour une entreprise. Dans ce cadre, elle a conduit six entretiens avec des acteurs de la RSE, des professionnels RH mais également des cadres en charge de la qualité et de la production dans des entreprises industrielles. Ses résultats montrent qu’une politique RSE peut avoir des effets positifs pour l’entreprise et auprès de ses collaborateurs (renforcement des valeurs véhiculées, renforcement de la marque employeur ou encore du sentiment d’appartenance). Ses résultats démontrent également que les collaborateurs ne sont pas dupes quand la politique RSE relève plus d’une « politique de façade » et non « d’une politique de fond ».

Selon plusieurs acteurs interrogés, la RSE contribue au renforcement des valeurs de l’entreprise et sert à les personnifier. La mise en œuvre d’une politique RSE peut en effet permettre à l’entreprise de se faire une réputation externe positive auprès de la population locale. Les salariés souhaitent parfois être associés à cette réputation positive. La mise en œuvre d’une politique RSE peut également permettre de faire vivre, voire de renforcer, les valeurs véhiculées par l’entreprise via les actions de RSE mises en place. Le levier du renforcement de la marque employeur est alors parfois enclenché et peut faciliter la fidélisation des collaborateurs. Sans tomber dans l’angélisme, l’étude met également en lumière que l’âge de la population, le territoire, le contexte économique et social dans lequel s’intègre l’entreprise jouent aussi un rôle dans cette fidélisation. Tous les salariés n’auront pas le même degré de sensibilité aux thématiques RSE.

La mise en œuvre de stratégies RSE par une entreprise peut être source de fierté pour ses collaborateurs et renforcer le sentiment d’appartenance. Cette mise en œuvre peut en effet développer le sentiment chez certains salariés d’avoir un impact social, économique et environnemental par le biais de leur entreprise et du travail qu’ils accomplissent chaque jour. Dans cette optique, la mise en œuvre d’une politique RSE peut aussi servir de levier pour lutter contre le risque de perte de cohésion sociale en entreprise dans la période de crise sanitaire que nous traversons, et de travail à distance.

Plusieurs interlocuteurs relèvent que lorsqu’un collaborateur croit en l’impact positif de son entreprise (en matière de RSE), il s'engage davantage dans son travail. Sans tomber là non plus dans l’angélisme, plusieurs interlocuteurs ont contrebalancé cette idée en soulignant que cet impact positif peut vite être mis à mal par des politiques contradictoires au sein de la structure. Par exemple, favoriser la déconnexion, tout en incitant les collaborateurs à travailler plus tardivement pour atteindre des objectifs de productivité. Dans cette lignée, d’autres interlocuteurs soulignent aussi qu’une politique RSE, lorsqu’elle n’est pas subordonnée à des résultats et reste à un niveau d’utilisation comme vecteur de communication, peut être perçue comme un outil de manipulation par les salariés. Le terme de “greenwashing” décrit bien cette vision instrumentalisée de la RSE.
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Si cet article vous a intéressé, il est possible de consulter sur le même format :

Les deux premiers articles de la saison 2 :

Tous les articles de la saison 1 :

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  • Mathias Da Cruz

Mathias DA CRUZ DE FREITAS est diplômé du master 2 « Management Digital des Ressources Humaines - Spécialisation : gestion de crise », promotion 2020-2021, de Institut Mines-Télécom Business School. De septembre 2020 à octobre 2021, il a réalisé son apprentissage au sein d’Allianz, en qualité de chargé de formation. Il a ensuite intégré Talan en tant que consultant en conduite du changement.

  • Margarida Lourenço Ferreira

Margarida LOURENCO FERREIRA est diplômée du master 2 « Management Digital des Ressources Humaines - Spécialisation : gestion de crise », promotion 2020-2021, de Institut Mines-Télécom Business School. De septembre 2020 à octobre 2021, elle a réalisé son apprentissage chez Sendin dans le domaine des Ressources Humaines. Elle est aujourd’hui Cheffe de projet dans cette même entreprise.

  • Manon Marie

Manon MARIE est diplômée du master 2 "Management Digital des Ressources Humaines - Spécialisation : gestion de crise", promotion 2020-2021 de Institut Mines-Telecom Business School. Durant une année, de septembre 2020 à septembre 2021, elle a effectué son apprentissage au sein de l'entreprise Harmonie Médical Service, en qualité d'apprentie RH généraliste. Elle s'est vue proposer de continuer d'évoluer à leurs côtés et poursuit donc désormais son expérience chez Harmonie Médical Service.
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Source : https://lentreprise.lexpress.fr/rh-management/management/la-melodie-du-bonheur-dans-l-entreprise_1851724.html

Tags: Bien-être au travail Diversité RSE