On a souvent décrit l’évolution de la compétence comme une baignoire renversée : au début l’accroissement des savoirs et de la performance est important, puis atteint un niveau stable pendant lequel le professionnel est en pleine possession de sa maitrise, avant de baisser peu à peu, sous le triple effet de la routine, de l’évolution des métiers et de celles des environnements internes et externes à l’entreprise. Le maintien et le développement des compétences nécessite donc d’aider le professionnel à rebondir au bon moment, c’est-à-dire avant d’en arriver à la troisième étape, en s’appuyant sur une bonne Gestion des Emplois et Parcours Professionnels (GEPP).

Le paradoxe du désir et de la résistance

Le salarié, qui désire habituellement développer ses compétences pour progresser dans sa carrière, attend légitimement un tel accompagnement de la part de son manager et des services RH. Il ne tarde même pas à manifester un certain mécontentement lorsqu’il ne trouve pas l’aide attendue. Mais d’un autre côté, lorsque son entreprise le sollicite pour une telle évolution, qui changent ses pratiques et sa mentalité, ses habitudes et le confort de sa maitrise actuelle, il se trouve déstabilisé, en situation de stress devant la nécessité de l’adaptation proposée, et entre souvent dans une démarche de résistance au changement qui le pénalise tout autant que son entreprise. Il adopte en effet une posture pour le moins paradoxale, qui entraine le plus souvent une démotivation personnelle et une baisse de performance pour l’entreprise.

La courbe du changement : un outil bénéfique

Pour répondre à cette difficulté, l’entreprise doit intégrer ce phénomène de la courbe du changement – que certains n’hésite pas à appeler la courbe du deuil –, et en faire un outil positif. Passer du choc vécu de devoir changer – avec la résistance et l’inconfort qui l’accompagne -, à la quête de sens et à l’acceptation, qui permet de s’approprier une nouvelle sérénité et déployer de nouvelles forces valorisantes, ne s’improvise pas ! Cela demande une convergence d’efforts entre le collaborateur, son manager et les services RH.

Du point de vue du collaborateur : la juste compréhension de son intérêt

Chacun de nous peut comprendre que sa compétence n’est pas immuable, qu’elle doit évoluer. Nous pouvons d’ailleurs nous appuyer sur notre expérience : ce n’est pas la première fois que nous avons eu à transformer nos pratiques et nos rapports professionnels. Nous l’avons déjà fait ! Nous savons combien il n’est pas facile de sortir de cette inertie homéostatique qui nous pousse naturellement à ne pas changer, ne pas évoluer. Et pourtant nous savons qu’à chaque fois que nous avons eu tout simplement à le faire (Just do it) et que nous avons surmonté l’épreuve, nous avons été gagnant : nous avons augmenté notre motivation et notre engagement, nous avons partagé des valeurs nouvelles et fortes qui nous ont permis de davantage devenir nous-mêmes, d’accéder à de nouveau parcours professionnels, à des perspectives de promotion valorisantes.

Du point de vue de l’entreprise : le levier du bien-être au travail

L’entreprise, de son coté, par l’intermédiaire du management et de l’accompagnement RH, doit prendre en compte la difficulté ressentie et agir dans le même sens. Elle peut rechercher, à chaque étape du changement, un terrain d’entente ; adopter un droit à l’erreur, récompenser les efforts et mettre en place une politique de reconnaissance : faire du changement un cercle vertueux pour chacun et pour tous. Les collègues peuvent d’ailleurs aussi s’impliquer dans cet accompagnement, qui crée un véritable collectif de travail et de développement des compétences !

Quand le donnant donnant devient le gagnant-gagnant

Au final, c’est bien une logique de gagnant-gagnant qui résulte des efforts partagés par le collaborateur et par l’entreprise : les nouvelles compétences qu’il développe et qui le promeuvent sont mise à leur tour au service de l’entreprise et de sa performance. La croissance de toutes les parties est au rendez-vous : collaborateur, collègues, management, DRH.

Des outils adaptés au succès

L’employeur doit donc se donner les moyens d’instaurer et de maintenir une démarche GEPP proportionnée et efficace, avec toute la pédagogie qui permette aux collaborateurs d’être convaincus par une telle démarche et de jouer le jeu à 100 % : de comprendre qu’intégrer ce dispositif fait partie intégrante de leur professionnalisme, de l’atteinte des objectifs, du contrat qui les relie à leur entreprise.

Pour cela, l’entreprise doit faire preuve d’une rigueur d’organisation et de communication qui permette à tous et à chacun de constater que les évolutions reposent sur la base de comportements et de qualités observables, et ne se font pas à la tête du client ou suivant l’arbitraire de la hiérarchie.

Un exemple : la nouvelle grille de classification de la métallurgie

A cette fin, le secteur de la métallurgie a mis en place un « référentiel paritaire d’analyse des emplois », permettant à chaque professionnel de toujours pouvoir se situer objectivement sur son niveau de compétence, tout en mesurant les évolutions éventuelles qui lui restent à intégrer.

L’outil a ainsi établit six critères de compétences :

  • La complexité de l’activité
  • Le niveau de connaissances
  • La capacité d’autonomie
  • Le degré de contribution
  • Le rôle d’encadrement et de coopération
  • La responsabilité de communication

Et pour chacun de ces critères, 10 degrés de compétences sont décrits, mentionnant factuellement ce qui est attendu ou réalisé. On obtient donc un tableau de 60 cases, avec un contenu précis permettant de cibler tous les niveaux de compétences, véritable repère pour tous les professionnels du secteur, qui avancent dès lord en terrain connu, ce qui permet de limiter considérablement les résistances, d’une part, de comprendre explicitement ce qu’il faut viser dans chacun des critères de compétence, d’autre part.

Conclusion

On le comprend bien : le développement des compétences est à la fois une affaire individuelle et collective, dont la responsabilité incombe à la fois aux collaborateurs et à l’entreprise. Quand le bien particulier et le bien commun se trouvent en synergie, il est possible d’espérer le meilleur !

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