Où en est la reconnaissance des cancers en maladie professionnelle chez les femmes ?

Le système de sécurité sociale de reconnaissance de maladies professionnelles fonctionne pour les salariés sur des tableaux de maladies, annexés au Code de la sécurité sociale.

Chaque tableau désigne une ou plusieurs pathologies, décrit la nature des travaux susceptibles de la provoquer et précise le délai maximum dans lequel son apparition permet la prise en charge, sous réserve parfois d’une durée minimale d’exposition.

Lorsque toutes les conditions prévues par le tableau sont réunies, la loi pose une présomption d’imputabilité au travail de la maladie concernée.

Compte tenu de la grande diversité des causes pouvant être à l’origine de cancers, cette présomption légale simplifie la preuve du lien entre un cancer et l’activité professionnelle.

En outre, l’existence de causes plurielles ne constitue pas un obstacle à la reconnaissance en maladie d’origine professionnelle, dès lors que toutes les conditions du tableau sont réunies.

A ce jour, il existe 100 tableaux. Plusieurs d’entre eux visent des pathologies cancéreuses, parce que certains facteurs de risques ont pu être identifiés en milieu professionnel.

Tel est le cas de l’amiante, du benzène, des rayonnements ionisants, de l’acide chromique, des bichromates alcalins, du chromate de zinc, des poussières de bois, des braies, des goudrons ou des huiles de houille, des suies de combustion de charbon, des poussières ou des vapeurs arsenicales, du nickel, du chlorure de vinyle…

Les organes les plus touchés par ces cancers professionnels reconnus sont les voies respiratoires, particulièrement les poumons.

Viennent ensuite les leucémies, les cancers de la vessie et de la peau.

Pourtant, nombreux sont les cancers non reconnus d’origine professionnelle, parce que les tableaux n’existent pas : les femmes sont particulièrement concernées.

Elles ne doivent pour autant pas négliger leurs droits, la reconnaissance en maladie professionnelle permettant une meilleure indemnisation (IJSS majorées, rente d’IPP le cas échéant après l’arrêt maladie).

Si leur maladie ne relève pas d’un tableau de maladie professionnelle, il demeure possible d’effectuer tout de même une demande de prise en charge par la CPAM.

Dans une telle hypothèse en effet, une maladie peut être reconnue d’origine professionnelle lorsqu’il est établi qu’elle est essentiellement et directement causée par le travail habituel et qu’elle entraîne un taux d’incapacité permanente au moins égal à 25%.

Pensez dans ce cas à en parler à votre médecin, lequel est à même d’établir le diagnostic d’un cancer susceptible d’être d’origine professionnelle et de vous remettre à ce titre un certificat médical initial qui vous permettra ensuite de formuler une demande de reconnaissance de maladie professionnelle auprès de votre CPAM.

Des réflexions se poursuivent concernant l’amélioration de la prise en charge des cancers qui touchent les femmes.

Un rapport sénatorial du 28 juin 2023, relatif à la santé des femmes au travail, a préconisé 23 recommandations.

Parmi celles-ci, la recommandation n°13 vise à « Faciliter la reconnaissance en maladie professionnelle, d’une part, du cancer du sein en lien avec le travail de nuit, d’autre part, du cancer des ovaires en lien avec une exposition à l’amiante ». Ce rapport se fonde notamment sur plusieurs études de chercheurs de l’INSERM et de l’INRS, qui tendent à établir le lien entre travail de nuit et cancer du sein ainsi qu’entre l’exposition à l’amiante et le cancer des ovaires.

Ces réflexions ont déjà permis la création d’un tableau n°47 ter des maladies professionnelles en agriculture : par décret n°2023-773 du 11 août 2023, il a en effet été inséré ce nouveau tableau au Code rural et de la pêche maritime, lequel est relatif « aux cancers du larynx et de l’ovaire provoqués par l’inhalation de poussières d’amiante ».

Par ailleurs, si de nombreux cancers féminins ne sont pas pris en considération au tableau des maladies professionnelles, l’avancée de la recherche scientifique fait évoluer les décisions. En mars 2023, une ancienne infirmière du centre hospitalier de Sarreguemines a par exemple fait établir le lien essentiel et direct entre son travail de nuit répété et l’apparition de son cancer du sein. Mais à ce jour, les partenaires sociaux qui composent le Conseil d’orientation des conditions de travail, ne sont pas parvenus à un consensus indispensable à la création d’un tableau de maladie professionnelle.

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