« Seuls les bébés mouillés aiment le changement » H Sérieyx.[1]

Changer est le signal de la provocation d’un conflit de type dissonance cognitive[2][3], c’est un état de tension dans le’ cas d’une rupture avec les habitudes et/ou les convictions. Les illustrations de l’opposition entre la dissonance et la cohérence sont aussi nombreuses que fréquentes. L’exemple symbolique est le changement d’hygiène de vie qui conduit à la bonne santé :

  • Cohérence : Contrôle de l’alimentation pour avoir un comportement cohérant avec les objectifs.
  • Principe : Il est établi que les écarts alimentaires procurent des effets négatifs sur la santé.
  • Changement : l’alimentation est déséquilibrée par l’exercice du plaisir au regard de l’hygiène de vie, il y a dissonances.

Il convient de traiter la dissonance entre le plaisir et l’hygiène de vie, la gestion de cet écart est menée par les connaissances sur le sujet et par l’utilisation de valeurs. Cela génère une demande d’efforts de toutes natures physiques, intellectuelles, affectives… L’arbitrage se fait entre l’effort à produire et les bénéfices à en retirer. Ce raisonnement s’applique sans cesse dans le cadre des fonctions professionnelles, sociales, familiales, intimes sur tous les thèmes : le respect de la loi, les relations humaines, la santé, les liens affectifs, la mise en œuvre des différentes fonctions… Pour y parvenir deux voies sont possibles : apprendre et/ou décider.

Le changement, la pédagogie, la décision, l’effort et les soft skills, oui, mais quoi ?

La stratégie du changement proposée repose sur le choix à faire entre la pédagogie, dois-je apprendre par la formation et/ou l’éducation et la décision ? Dois-je simplement décider par le jugement et l’exécution ? Le point commun engendré par les deux possibilités est l’effort à produire pour parvenir à changer.

Le changement de comportement repose sur l’adoption d’un modèle conforme à la fonction qu’elle soit sociale, professionnelle, familiale ou intime. Il faut se poser la question de ce que l’on fait, quel modèle utilise-t-on ? Quel est celui que l’on devrait utiliser ? Mais surtout pourquoi le faire au nom de quel système de valeur :

 « …choisir, c’était renoncer pour toujours, pour jamais, à tout le reste et la quantité nombreuse de ce reste demeurait préférable à n’importe quelle unité ». André Gide[4]

La notion de modèle[5] mérite un approfondissement sur le thème : « De quoi est-il question ? » Un modèle répond aux critères suivants : Simplification / Pragmatisme / Récapitulation / Visualisation / Ordonnancement, ces caractéristiques procurent une méthode sur la base de laquelle il est opportun de construire sa propre méthodologie pour répondre aux contraintes de la situation à satisfaire. Cela se présente suivant le schéma :

 

Le changement, la pédagogie, la décision, l’effort et les soft skills, oui, mais comment ?

« Ce que vous savez importe peu, c'est ce dont vous vous souvenez qui compte »,Jan Cox[6].

Le goût de l’effort a pour conséquence d’influencer la décision de changer. L’arbitrage se fait sur sa durée et son intensité en comparaison des bénéfices retirés. L’effort est donc le prix à payer pour obtenir le bénéfice.

 

L’effort, le prix à payer « Chacun vaut de ce que valent les objectifs de son effort » Marc Aurèle[7].

Le goût de l’application délibérée des forces physiques, intellectuelles ou morales à l'exécution d'une tâche, à la réalisation d'un projet :

  • L’effort pour rendre la vie de ses concitoyens plus agréable, ne pas salir la ville.
  • L’effort de mémoire pour tenir ses promesses.
  • L’effort de tolérance pour comprendre les idées des autres.
  • L’effort de respecter la législation par son statut de citoyen.
  • L’effort de considérer que le bien commun est aussi important que ses intérêts personnels.
  • L’effort de rendre ses enfants tolérants à la frustration, ils deviendront des adultes socialisés.
  • L’effort de penser que la réussite est liée au travail fourni.
  • L’effort d’accepter les changements que la vie nous impose.
  • L’effort d’apprendre pour soi et d’apprendre aux autres.
  • L’effort de…… à compléter selon vos besoins.

La fatigue, la conséquence inévitable. « Laissez-moi fuir la menteuse et criminelle illusion du bonheur ! Donnez-moi du travail, de la fatigue, de la douleur et de l’enthousiasme ». George Sand[8].

Il me vient le souvenir des propos de Robert Lamoureux[9], célèbre chansonnier des années 50/60, aujourd’hui nous dirions humoriste de stand-up : « L’éloge de la fatigue[10] ». « Oui, je suis fatigué, Monsieur, mais je m'en flatte ».

Je vous en propose la dernière strophe :

« …La fatigue, Monsieur, c'est un prix toujours juste,

C'est le prix d'une journée d'efforts et de lutte.

C'est le prix d'un labeur, d'un mur ou d'un exploit,

Non pas le prix qu'on paie, mais celui qu'on reçoit.

C'est le prix d'un travail, d'une journée remplie,

C'est la preuve, Monsieur, qu'on vit avec la vie… »

Ce qui me conduit à penser que les temps changent, pas uniquement en me regardant dans la glace le matin et de constater que certains jours je fais vraiment mon âge, mais aussi par une évolution des valeurs. La fatigue engendrée par le goût de l’effort laisse place à un état d’esprit qui conduit à ne rien faire qui pourrait fatiguer. Le manque d’exercices physiques devient une règle de vie, mais ce qui produit le plus grand effet sur la vie en société c’est, à mon sens, la perte du goût de l’effort.

 

Faire la différence entre l’effort de l’action longue et l’effort de la décision. L’exemple le plus simple de cette mesure est représenté par la différence entre l’apprentissage du mandarin, et celui du saut à l’élastique. Le mandarin est une langue complexe par la structure, la codification de l’alphabet et la prononciation qui nécessite une très longue et très impliquante période d’études et de pratiques. Le saut à l’élastique impose d’apprendre à faire un pas en avant sans autre implication pédagogique.

Il reste à définir ce qui relève de l’apprentissage, comme le mandarin et ce qui relève de la décision, comme le saut à l’élastique. Ma carrière m’a conduite à rencontrer le plus souvent des blocages d’apprentissage relevant de la décision. Le commentaire du délai d’apprentissage étant un prétexte pour masquer le refus de l’effort.

Conclusion

« L’homme absurde est celui qui ne change jamais » Clémenceau[11].

« Pour s’endurcir, il faut soumettre le corps à beaucoup d’effort et de fatigue et s’habituer à résister à tout qui peut l’affecter, quelque rudement que ce soit » Schopenhauer[12].

La lucidité est de mise, il faut faire la chasse aux efforts inutiles, je suis par nature hostile au travail improductif et j’ai appris à différencier l’efficacité, c'est-à-dire l’obtention du résultat sans limite de travail avec l’efficience, c'est-à-dire le rapport entre un travail et le résultat obtenu qui se définit par la formule : « Même travail plus de résultats, mêmes résultats, moins de travail ».

Il suffit alors de choisir son niveau d’effort et à cet instant la fatigue devient ce que m’en disait mon père, rugbyman à l’ancienne et architecte infatigable : « C’est de la bonne fatigue !».

« La victoire aime l’effort » Catulle[13]

Epilogue

Soi-même est un pronom personnel adossé à un adverbe. Cet assemblage grammatical, compris à tort comme un pléonasmea exprime pleinement l’analyse de la situation du changement. Soi-même signifie pleinement que l’action désignée est réalisée par « soi » avec comme renforcement « même » qui exclus formellement toute autre possibilité. Le changement est donc à réaliser par soi-même à l’exclusion de toutes autres personnes, ça, c’est un pléonasme.
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[1] Hervé Sérieyx 1937, homme d’affaires, universitaire français.

[2] D’après Centre National de Ressources Textuelles et Lexicales https://www.cnrtl.fr

[3] Cognitive de cognition, processus mentaux en relation avec la connaissance, d’après Jérôme Seymour Bruner, 1915 – 2016 et George Armitage Miller 1920 – 2012

[4] André Gide, 1869 – 1951, homme de lettre, français, prix Nobel de littérature

[5] Le livre des décisions, M Krogerus, R Tschäppeler, Alision 2017

[6] Jan Cox, 1919 - 1980, peintre belge.

[7] Marc Aurèle, 121-180 philosophe et homme d’État romain.

[8] Georges Sand nom de plume d’Amandine Aurore Lucile Dupin de Francueil, baronne Dudevant, 1804-1876, femme de lettres, française. 

[9] Robert Lamoureux, 1920-2011 ; humoriste, homme de lettre français.

[10] L’éloge de la fatigue https://www.culture-generale.fr/litterature/18085-leloge-de-la-fatigue-de-robert-lamoureux.

[11] Georges Benjamin Clemenceau, 1841-1929 à Paris, homme d’état français, alors rédacteur en chef de l’Aurore.

[12] Arthur Schopenhauer, 1788-1860 philosophe, allemand.

[13] Catulle Valerius Catuyllus, 84 av. J.C. – 54 av. J.C. poète romain.

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