Blob Management

Oser refonder le management pour un avenir durable

Dans un monde professionnel en quête de sens, il devient urgent de repenser notre manière de manager. Cet article expose notre vision du Blob Management, cette dérive toxique qui mine les organisations, et défend un nouveau modèle : le K Management, un management apaisé, exigeant et durable.

Blob Management : un phénomène insidieux qui gangrène l’entreprise

Le Blob Management, concept que mon frère Dominique et moi avons vécu dans notre pratique et approfondi dans notre livre, Mark to K, décrit la dérive ultime d’un management centré sur l’ego et le pouvoir individuel. Ce phénomène insidieux transforme l’entreprise en un marécage où la coopération se dissout, la motivation s’éteint et la performance s’enlise. Loin d’être un mythe réservé aux vieilles structures pyramidales, le Blob Management est une réalité que nous rencontrons dans tous types d’organisations, qu’elles soient grandes ou petites, privées ou publiques, traditionnelles ou prétendument « agiles ».

Un management qui perd son sens et son discernement

Cette dérive ne surgit pas par hasard. Elle se nourrit d’un management qui a perdu son discernement et son alignement sur un projet commun. Elle apparaît lorsque le sens partagé disparaît, que les responsabilités deviennent floues et que les rapports de force remplacent l’intelligence collective. Dans un tel contexte, le manager cesse d’être un leader pour devenir un seigneur de couloir, et l’organisation se met à fonctionner au service de quelques intérêts individuels au lieu de la mission collective.

Les mythes qui entretiennent le Blob

Beaucoup pensent encore que le Blob est une légende urbaine ou une caricature exagérée. Pourtant, notre expérience nous montre qu’il peut se manifester même dans des entreprises jeunes et innovantes dès lors que la gouvernance se concentre sur quelques individus et le court termisme, au détriment de la mission, de la transparence et du dialogue. D’autres s’imaginent qu’il suffirait de soigner la communication interne pour éviter ce poison. La vérité est plus rude : le Blob naît toujours d’un déficit de sens et d’une absence de culture du discernement. Une bonne formation à la prise de parole ne sauvera jamais une organisation minée par la défiance. Enfin, le Blob n’est pas le seul fait des managers. Lorsqu’il s’installe, il finit par contaminer toute l’organisation, des collaborateurs aux fonctions support, jusqu’à transformer l’entreprise en terrain de survie et non de création de valeur.

Des signaux avant-coureurs trop souvent négligés

Les signaux avant-coureurs sont nombreux, mais trop souvent négligés. Quand les réunions se multiplient sans jamais aboutir à des décisions concrètes, quand les services deviennent des silos impénétrables et que l’information se monnaie plus qu’elle ne circule, quand les managers valorisent la loyauté aveugle plutôt que la compétence, quand le climat social se dégrade sans raison apparente et que les initiatives individuelles sont systématiquement découragées, le Blob est déjà à l’œuvre.

Les conséquences humaines et économiques du Blob

Ses conséquences sont à la fois humaines et économiques. Le Blob détruit la confiance, cet actif invisible mais indispensable pour faire face à la complexité. Il entraîne le désengagement, qui coûte chaque année des millions aux entreprises. Selon Gallup, un collaborateur désengagé réduit la productivité de 18 % en moyenne. Au-delà de la performance immédiate, c’est la capacité d’innovation et la résilience même de l’organisation qui s’évaporent.

Vers un management apaisé : le K Management comme alternative

Face à ce constat, nous portons la conviction qu’il est temps de refonder le management. Nous proposons une alternative claire : le K Management, un management apaisé où le manager n’est plus un contrôleur, mais un facilitateur. Le cœur de ce modèle repose sur la restauration d’un sens partagé qui aligne les ambitions individuelles sur un projet commun. Car sans raison d’être claire, il n’y a pas de performance durable. Le discernement devient alors une compétence clé : c’est la capacité du manager à poser les bonnes questions, à relier les actions au projet d’ensemble et à faire des choix courageux et éclairés.

L’importance d’une posture de service et des valeurs ESG

Dans cette vision, le manager doit adopter une posture de service. Il n’est plus un petit chef obsédé par son statut, mais un catalyseur qui libère l’énergie collective et favorise la coopération. Le management apaisé intègre aussi les dimensions ESG – Environnement, Sociétal et Gouvernance – comme conditions de la performance économique. Une entreprise qui néglige ces dimensions se condamne à court terme, car la durabilité n’est plus une option, mais une nécessité.

Changer de paradigme : du mark-to-market au mark-to-K

Le passage du mark-to-market, qui mesure la performance sur la seule rentabilité immédiate, au mark-to-K, qui évalue la réussite à l’aune de la durabilité et de l’impact collectif, est à nos yeux un changement de paradigme indispensable. Car le Blob prospère sur le court-termisme et la peur ; le K Management, lui, s’épanouit dans la coopération, la confiance et la recherche d’équilibre.

Le rôle décisif des Ressources Humaines

Dans cette transformation, le rôle des Ressources Humaines est déterminant. Nous les voyons comme les vigies de l’organisation, capables de détecter les signaux faibles, d’accompagner la montée en maturité des managers, de promouvoir une culture du feedback authentique et de soutenir la mise en place de processus décisionnels transparents. Sans leur engagement, aucun projet de refondation managériale n’est possible.

Le courage managérial et l’exemplarité comme moteurs du changement

Il est essentiel de rappeler que le Blob Management prospère dans l’ombre du silence et de la peur. C’est pourquoi nous croyons fermement que l’instauration de rituels de dialogue ouverts, réguliers et sincères est un levier puissant pour restaurer la confiance et créer un climat de sécurité psychologique. Le courage managérial ne se mesure pas à la capacité de maintenir un climat de peur, mais à la capacité de créer un espace où chacun peut s’exprimer, prendre des initiatives et se sentir partie prenante de la réussite collective.

Nous pensons également que le changement doit s’appuyer sur des managers exemplaires, capables d’incarner au quotidien les valeurs de respect, de justice et d’authenticité. Ces leaders apaisés montrent par leur comportement qu’il est possible de conjuguer exigence et bienveillance, performance et humanité. Ils deviennent ainsi des modèles qui inspirent leurs équipes et transforment en profondeur la culture de l’entreprise.

Refonder le management pour un avenir durable

Le Blob Management n’est ni une fatalité ni une simple erreur de parcours. Il est la conséquence logique d’un management qui refuse de se remettre en question. Mais la bonne nouvelle, c’est qu’il existe un antidote puissant : un management qui place l’humain, le discernement et la coopération au cœur de la performance. Nous sommes convaincus que le véritable courage managérial consiste à choisir le sens plutôt que la peur, la coopération plutôt que le contrôle, et le K Management plutôt que le Blob.

En conclusion, il est temps de cesser de considérer le management comme un simple ensemble de techniques et de recettes. Il est temps de le penser comme une œuvre collective, évolutive, et porteuse de sens. C’est en adoptant un management apaisé que nous pourrons construire des organisations résilientes, justes et réellement performantes.

Cet article s’appuie sur notre vision développée dans notre ouvrage Mark-to-K : Un nouveau management pour demain.