Diversité et inclusion : où en est-on?

Les politiques de diversité et d’inclusion restent essentielles, malgré les vents politiques contraires
Aux origines des politiques D&I…
Dans les années 1960, le mouvement des Civil Rights (droits civiques) aux États-Unis débouche sur les premières lois antidiscrimination, dans la société et sur le lieu de travail, après des décennies de ségrégation. En France, les principes de non-discrimination sont garantis par la Constitution, mais sont peu à peu précisés par la loi à partir des années 1980, notamment avec la loi Roudy sur l’égalité professionnelle du 13 juillet 1983.
Depuis, les pratiques des entreprises ont évolué, combinant obligations légales (obligation d’emploi des travailleurs handicapés, index d’égalité professionnelle), attentes sociétales et enjeux de performance.
… jusqu’au backlash
Mais le chemin n’est jamais linéaire. Aux Etats-Unis, le retour de Donald Trump à la Maison-Blanche a déclenché une vague de contestation des programmes D&I, avec la signature d’un décret supprimant ces programmes dans les universités et administrations publiques, et plusieurs multinationales, comme Meta ou Amazon, ont mis fin à certaines de leur pratiques de diversité et d’inclusion. Derrière ces reculs, une petite musique : ces politiques seraient des dérives inutiles et coûteuses.
Faut-il mettre fin aux politiques de D&I en entreprise ?
Inutiles ? Pas vraiment. Selon le Défenseur des droits, 41 % des actifs en France ont déjà été confrontés à des propos ou comportements sexistes, racistes, homophobes ou discriminants liés au handicap, à la religion ou à l’état de santé. Et dans les grandes entreprises, la diversité reste marginale : seules 3,5 % des dirigeant·es du SBF 120 sont issus de minorités visibles ou portent un nom à consonance extra-européenne.
Coûteuses ? Pas vraiment non plus. Une étude du Boston Consulting Group (2021) montre que les entreprises dont les équipes dirigeantes sont plus diversifiées sont 19 % plus innovantes et affichent une rentabilité supérieure de 9 points. Et les candidats eux-mêmes y accordent de l’importance : 84 % des personnes en recherche d’emploi considèrent l’inclusion comme un critère déterminant dans le choix d’une entreprise.
Les enjeux de diversité et d’inclusion ne sont pas seulement une exigence morale : c’est un levier stratégique pour attirer les talents, innover et rester compétitif. Les Français soutiennent d’ailleurs massivement les politiques D&I : selon une enquête Ipsos de 2024, 82 % d’entre eux estiment que ces programmes sont utiles et doivent être poursuivis, y compris dans un contexte politique mondial parfois plus hostile.
Trois pistes pour une politique D&I sincère et utile
1. Débiaiser son process de recrutement
Les biais inconscients sont le premier frein à la diversité. À compétences égales, les candidatures dont l’identité suggère une origine maghrébine ont 31,5 % de chances de moins d’être contactées (DARES). Pour y remédier, il faut agir à chaque étape : rédaction d’offres neutres, recrutement sur les compétences, sourcing diversifié, candidatures sans CV, utilisation systématique d’une grille de compétences détaillée et standardisée… Chez makesense par exemple, nous avons entamé cette démarche suite au diagnostic réalisé par Ines Seddiki de Ghett’up et Nawal Zouak de Inclusivité-e-s, qui a mis en lumière la priorité du chantier recrutement afin d’améliorer la diversité au sein de nos équipes.
2. Former tous les collaborateurs
Cet audit nous a également conduit à mettre en place un parcours de formation des managers, RH et l’ensemble des équipes afin d’identifier et de contrer les biais cognitifs, micro-agressions et situations discriminatoires, et mettre en place les outils standardisés pour débiaiser notre processus de recrutement. Les organismes comme Hally ou Remixt proposent également des solutions complètes d’audit, formation, reporting et suivi pour transformer la culture d’entreprise.
3. Mesurer et ajuster en continu
Enfin, la Diversité et l’Inclusion se pilotent, afin d’identifier les progrès et les angles morts au fur et à mesure du déploiement de vos actions. Certains indicateurs sont obligatoires, comme l’index de l’égalité professionnelle. À ceux-ci, nous recommandons d’autres mesures quantitatives - taux de formation au sujet, répartition des salariés par genre, niveau de diplôme - et qualitatives - perception de la culture de diversité et d’inclusion, sentiment d’inclusion selon l’âge, le genre, l’orientation ou l’origine supposée. Les mesures quantitatives basées sur l’origine ethnique, la religion ou encore l’orientation sexuelle sont en revanche strictement interdites. Engager une démarche de certification par des organismes comme BCorp ou le label Diversité AFNOR peut également renforcer la crédibilité de vos actions.
La démarche Diversité et Inclusion n’est ni une mode, ni une dépense superflue : c’est un impératif social, mais aussi un levier de performance, d’attractivité et d’innovation - au même titre que la transition écologique. Les discriminations ne disparaissent pas d’elles-mêmes : les ignorer revient à accepter qu’elles persistent. Les entreprises qui continuent à investir dans la diversité et l’inclusion créent des environnements plus justes, plus performants et plus attractifs pour les talents de demain.