Management et leadership en entreprise
La queue du Chat…
Dans un univers où les mots d’ordre managériaux se répètent à l’envie, certaines vérités dérangent. La pratique des ressources humaines révèle des idées qui bousculent les convictions bien établies et ouvrent des perspectives nouvelles pour les dirigeants. Cette chronique propose d’explorer ces pistes inattendues afin de repenser la manière d’attirer, de motiver et de diriger.
On croit souvent que la fidélité des collaborateurs est un gage de santé pour l’organisation. Pourtant, un peu de turn‑over peut être salutaire. Il permet de renouveler les pratiques, d’éviter l’ankylose et d’attirer des compétences nouvelles. Le danger n’est pas le départ des talents mais l’incapacité à en attirer d’autres et à créer un environnement qui donne envie de revenir. Les programmes de rétention trop paternalistes, qui cherchent à enfermer les individus, finissent par les infantiliser et par accélérer leur fuite. Le véritable enjeu est d’offrir du sens, des projets motivants et de la justice afin que ceux qui restent le fassent par choix et que ceux qui partent deviennent des alliés. Acceptons que certaines personnes ne trouvent plus d’épanouissement et préparons leur départ avec élégance plutôt que de le considérer comme une trahison.
Autre tabou : l’équipe idéale n’existe pas. Derrière la mythologie des groupes soudés se cachent des réalités bien plus nuancées. Les équipes performantes sont composées de personnalités différentes qui jouent des rôles complémentaires et acceptent la confrontation. Des collectifs trop homogènes glissent vers la pensée unique, tandis que les oppositions structurées nourrissent la créativité. Dans certains projets, des “hot groups” surinvestis produisent des résultats exceptionnels parce que chacun poursuit des motivations personnelles et non une harmonie illusoire. Cette vision décalée invite à reconsidérer les discours simplistes sur le travail en équipe et à assumer que la performance naît aussi de la diversité des motivations. Le rôle du manager devient alors celui d’un chef d’orchestre qui donne le tempo, écoute les dissonances et les transforme en harmonie productive, plutôt que celui d’un arbitre qui impose l’uniformité.
L’essor du télétravail est souvent présenté comme un progrès irrésistible. Mais le travail à distance comporte un revers : en supprimant les espaces informels, il efface les signes de reconnaissance et appauvrit la socialisation. Le manager à distance doit autant veiller à la maîtrise des outils qu’à l’écoute des non‑dits, à la capture des signaux faibles et à l’entretien du lien. Ces compétences relationnelles, rarement enseignées, sont essentielles pour éviter l’isolement et la perte de visibilité. Par ailleurs, l’illusion d’une meilleure conciliation des temps de vie est trompeuse : travailler chez soi brouille les frontières et conduit souvent à une surcharge. La flexibilité peut se retourner contre ceux qui n’osent plus déconnecter. À l’inverse, la présence physique n’est pas synonyme de contrôle archaïque : elle permet de percevoir des signaux faibles, de sentir l’ambiance et de construire une confiance qui ne se décrète pas en visioconférence. L’enjeu n’est pas d’opposer bureau et domicile mais de choisir le juste dosage et d’accompagner chacun dans cette hybridation.
On évoque aussi un choc des générations, mais la véritable fracture réside dans le rapport à l’information. Les seniors impriment et classent, leurs cadets stockent, les plus jeunes ne stockent plus et s’appuient sur la disponibilité permanente des réseaux. Il ne s’agit pas seulement d’âge mais d’un changement de paradigme où l’appropriation laisse place au partage. Reconnaître cette diversité de pratiques permet de la transformer en richesse au lieu de la subir. L’audace n’est d’ailleurs plus l’apanage de la jeunesse : avec l’allongement des carrières, un quadragénaire peut être aussi innovant qu’un trentenaire. Les organisations gagneraient à encourager les mentorats croisés pour que chacun apprenne de l’autre. Cette hybridation des générations et des approches devient une source de résilience, à condition de sortir des stéréotypes et de créer des espaces de dialogue intergénérationnel.
Enfin, l’autorité et le leadership ne ressemblent plus aux modèles de jadis. Contrairement à ce que l’on répète, le management intermédiaire n’a pas disparu. Dans des structures plus plates, il demeure un maillon indispensable qui traduit la stratégie en actions et rassure les équipes. À l’inverse, la figure du dirigeant superman s’avère obsolète. Le leader efficace attire et retient par sa capacité à orchestrer l’intelligence collective plutôt qu’à tout contrôler. Il agit comme un facilitateur qui crée les conditions de la performance et intègre les exigences sociales à la réussite économique. Valoriser cette posture de coach exige de revoir les critères d’évaluation et de reconnaître que l’autorité ne vient plus du titre mais de la capacité à créer du lien et à faire grandir les autres.
Ces contre‑vérités montrent qu’il est temps de briser les tabous du management. Plutôt que d’appliquer des recettes universelles, les dirigeants et les experts RH ont intérêt à embrasser ces paradoxes : accepter la fluidité des carrières tout en offrant une raison d’être, cultiver des collectifs où la diversité et la confrontation deviennent des forces, rééquilibrer la technologie par des relations humaines et reconnaître que l’audace n’a pas d’âge. En renonçant aux modèles figés et en assumant la complexité, la fonction RH pourra réellement devenir un levier stratégique et transformer le capital humain en source d’innovation durable. C’est en osant regarder l’envers du décor que le management trouvera une nouvelle grille de lecture et préparera les organisations aux défis de demain. Ces paradoxes sont autant de leviers pour réinventer la gouvernance des hommes et des femmes et pour donner un sens durable à l’entreprise.
ATTENTION !
Nous voilà arrivés à la queue du Chat. Ce que vous venez de lire n’est pas une chronique. Depuis novembre 2000 je livre une chronique mensuelle sur ce site et j’ai demandé, à Chat GPT pour la 300ème livraison, de faire un résumé des 299 précédentes pour en retirer les idées-clés. Ce n’est pas glorieux mais une petite plaisanterie en 25 ans est excusable.
Ce texte provoque chez moi trois réactions, l’énervement, l’humilité et l’espérance.
Énervement devant la pauvreté et la banalité des grands thèmes retenus de 25 années d’observations, de lectures, de recherche. Franchement, ce ne sont pas les thèmes que j’aurais retenus, ni ceux qui devraient structurer un éventuel ouvrage sur l’histoire de la gestion des personnes. Pire encore, la manière d’en parler est agaçante, le ton arrogant, donneur de leçons. Presque comme celui des gourous planant sur leur planche à clous et fumant de l’encens ou mieux pour éclairer les masses obscures qui n’ont encore rien compris à la prompt-modernité. Dans ce texte aucune empathie ne transpire, pas le minimum de distance bienveillante, ni même d’humour. Empruntant à la violence ambiante, c’est le texte suffisant de celui ou celle qui donne l’illusion au lecteur de dévoiler ce qui lui serait malignement caché.
La deuxième réaction est celle de l’humilité de l’auteur car c’est à partir de ses propres textes qu’a travaillé l’IA. Le lecteur a déjà formulé l’hypothèse : si c’est si pauvre, tu y es peut-être pour quelque chose. Il y a donc trois hypothèses possibles. La première c’est que l’auteur croit faire des choses originales comme tous les génies incompris, mais il lui a fallu attendre 25 ans pour s’apercevoir que ce n’était pas le cas : mieux vaut tard que jamais. Deuxième hypothèse : face à plus de mille pages et 500000 mots, l’IA ne fait peut-être que traquer ce qui conforte les “connaissances” les plus fréquentes, les opinions les plus répandues, renforçant encore la pensée unique en la matière, forcément appauvrie. La troisième hypothèse, c’est qu’en 25 ans, ce sont toujours les mêmes thèmes qui reviennent, même si nous sommes biaisés par le syndrome de l’eau chaude : le premier contact avec l’eau chaude nous donne l’impression que c’est nouveau…
En effet si ce sont les mêmes thèmes qui demeurent en 25 ans malgré les efforts considérables des influenceurs à nous faire prendre les vessies de leurs découvertes (ou de celles de leurs financeurs) pour les lanternes de la nouveauté, c’est pour plusieurs raisons possibles. Soit nous n’apprenons rien de la réalité et de l’histoire, soit il est nécessaire pour chacun de passer par ce temps d’apprentissage quelle que soit l’expérience des plus anciens, soit encore, last but not least, on ne dira jamais assez la difficulté extrême de faire en sorte qu’un collectif produise de la performance.
La troisième réaction est celle de l’espérance. Ceux qui auront atteint le dernier tiers de ce texte pour s’apercevoir du canular seront peut-être renforcés dans leur attitude prudente vis-à-vis des modes, des trucs, des idées toutes faites et des discours managériaux convenus. Ils se souviendront qu’en matière de choses humaines, les philosophes, les écrivains et artistes ont déjà dit depuis des siècles tellement de choses dans des histoires, des concepts, des fables ou des chansons qu’il suffit d’y revenir pour tenter sans cesse de percer le mystère de la nature humaine. La bonne posture n’est pas de se lamenter en disant que l’on n’apprend rien mais de mettre à jour sans se lasser le bon sens qu’ils ont nourri. L’enjeu n’est pas tant de dénoncer que de mettre à jour les rouages de ce qui se passe.
Voilà ce qui doit animer un auteur de chroniques. Et comme il n’est pas certain que ces chroniques continuent jusqu’en 2050, terminons par un petit conseil pour les futurs chroniqueurs qui ne se satisferaient pas de cette perspective trop modeste à leur goût. Une autre piste s’offre à eux, plus moderne : 1/3 d’étonnement devant l’eau chaude à peine découverte, 1/3 de Chat GPT et 1/3 de managérialement correct, et le tour est joué !
