RH : à vos planches… à dessein !

NB : âmes sensibles, s’abstenir…
Les jeunes ne veulent plus travailler. Une génération de fainéants. Ils veulent le beurre et l’argent de la crémière…
J’entends : « c’était mieux avant »… Cependant, manquer de motivation devant l’abyssal néant de notre époque n’a rien de bien étonnant. Je m’explique.
Selon certaines études dont je dépose ci-dessous le lien, 91 % des jeunes Z disent se rendre au bureau la peur au ventre (*). Quatre-vingt-onze pour cent…
On peut y voir un simple chiffre de société, mais essayons de regarder les choses en face, et cessons un instant de juger ces fameux « Z », dernière lignée alphabétique d’un système que je crois dépassé.
Essayons plutôt de les comprendre, parce qu’une émotion (la fatigue, le stress, ou l’angoisse pour certains), ça n’est pas négociable. Et je ne pense pas que les traiter de fainéants puisse atténuer leurs émotions…
Que nous dit cette nouvelle génération ?
« Arrêtez le massacre ! On a la trouille ! Dans tous les domaines, vous êtes allés trop loin. Le monde politique est déconnecté de notre réalité, la planète surchauffe et rien n’est fait pour la préserver, les canons se dressent à nos portes… En résumé, vous nous laissez un futur explosif, et nous refusons de perpétuer votre modèle, en commençant par votre vision du travail… »
La promesse de Gascon
La promesse des générations d’avant tenait en deux lignes assénées dès le plus jeune âge : Travaille dur, tu seras récompensé par un parcours de vie aux trépidantes destinées : un diplôme, un emploi, une maison, une retraite et une place bien méritée au cimetière du coin.
Youpi !
Sauf que cette promesse, aussi délicieuse soit-elle, ne tient plus.
- Un diplôme ne suffit plus parce que les « vrais » emplois s’IA-isent ;
- Même vétustes, les maisons sont inaccessibles ;
- Et les retraites promises sont compromises.
Pourquoi ? Parce que l’ascenseur social, comme celui de l’immeuble de mon psy d’ailleurs, est en panne depuis deux générations. Et bien que chaque politique y aille de ses promesses (tenez bon, le technicien passera demain !), il n’en est rien : le statu quo dont on a patiemment accepté la réalité est en passe d’exploser en un sismique statut-chaos.
Et ces cons de djeuns l’ont compris. Ils nous disent : « Non merci, pas question de sacrifier trente ans de ma vie pour une promesse que vous ne tiendrez pas. »
C’est fou comme ils sont impertinents ces jeunes rebelles…
Ils ne veulent plus d’une carrière à rallonge qui se terminera inexorablement en burnout (on y passe tous…).
Ils ont vu leurs parents rentrer tard, épuisés, parfois brisés.
Ils ont vu des vies sacrifiées sur l’autel d’une boîte aux ressources inhumaines.
Ils ont compris que ce modèle ne marchait plus.
Alors, l’idée de perpétuer un modèle forgé par leurs propres fossoyeurs ? Non merci.
Est-ce que ça fait d’eux des fainéants ? À vous de voir. Moi, je les trouve plutôt courageux, et je les félicite de vouloir changer les choses — sinon pour eux-mêmes, au pire pour leurs enfants.
Le nouveau rôle des RH ?
Dans ce contexte, la raison d’être d’une boîte ne peut plus être de forcer le passage vers une rentabilité-quoi-qu’il-en-coûte, mais plutôt de créer les conditions gagnantes qui permettront de concevoir un prochain modèle de société viable et surtout, rentable.
Je ne vois rien d’utopiste là-dedans. C’est juste une question de survie de l’espèce, non ? Et quel que soit le secteur d’activité, il y a toujours moyen de mieux faire les choses… Ça fait 30 ans que je contribue au dessein des boites qui m’engagent, et ça marche toujours…
Donc. Face aux gourmandes IA assoiffées de nouveaux contrats et à l’état général des troupes, il est temps que les RH s’extraient de leur désuet rôle de fossoyeur (virer au profit d’une IA prometteuse ou pour le compte d’un directeur financier qui impose une croissance à deux chiffres…). Voilà, c’est dit !
Il est temps de sortir du syndrome des 5C — C’est Con, mais C’est Comme Ça — (pour ceux qui ont lu mon précédent article), car ce syndrome dévaste et assèche le noble cœur des RH désabusées, désargentées, désengagées face à « l’opturantisme » des CA aux savoirs et façons de faire issus d’un temps révolu.
Il est temps d’écouter et de prendre le parti de ces jeunes fainéants en répondant à leurs besoins. Parce qu’ils ont raison, tout simplement.
Et selon mon expérience en tant que coach de marque employeur, le prochain rôle des RH sera de créer les conditions humaines favorables au grand plan de transition que ces jeunes exigent.
Pour ce faire, les RH doivent courageusement réinventer leur métier sur la base de 3 nouvelles responsabilités :
- Sécuriser l’innovation : Il est impossible d’innover la peur au ventre. Alors, quoi qu’il en coûte, les Ressources Humaines doivent sécuriser les ressources humaines, précisément, en créant des conditions de travail favorables pour bâtir la Grande Alternative à laquelle les jeunes aspirent. Les voies pour y parvenir sont nombreuses, et je ne crois qu’à la mienne, évidemment : le pouvoir de la tendresse managériale (https://www.youtube.com/watch?v=tx-tncl0098&t=28s).
- Mobiliser par le sens : Les RH doivent prendre la juste mesure de leur pouvoir d’influence sur la raison d’être de l’entreprise pour laquelle elles s’engagent et engagent. Elles doivent intervenir au plus haut niveau de l’organisation avec des arguments choc — et ils existent ! Il est plus facile que jamais de démontrer qu’une raison d’être portée par le sens est un levier de rentabilité à court, moyen et long terme.
- Fier-tiliser par le respect : Les RH doivent démontrer leur respect vis-à-vis des jeunes générations. Cela passe par l’écoute de leurs besoins et la fier-tilisation de leurs efforts. Pour cela, elles doivent forcer le passage vers une culture d’entreprise participative et bienveillante, qui valorise les pensées alternatives.
En d’autres termes, le rôle des RH n’a jamais été aussi fondamental si l’on veut accompagner la grande transition de société exigée par les nouvelles générations.
Alors… À vos planches à dessein !
Réinventez votre rôle et réhumanisez votre entreprise en créant des écosystèmes sécurisants, bienveillants et justes. C’est à vous de le faire, parce que mieux que quiconque, vous êtes les spécialistes du genre humain.
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(*) http://www.igensia-education.fr/actualites/gen-z-et-entreprise-une-generation-problematique