analyse

Congés payés et jour férié

Les vacances de la Toussaint et le samedi 1er novembre 2025, jour férié, sont l'occasion de revenir sur les modalités de décompte des jours de congés payés en présence d'un jour férié pendant la période de congés.

Les congés payés font couler beaucoup d’encre depuis deux ans, entre la loi dite DDADUE du 22 avril 2024[1] ayant permis, notamment, au salarié malade d’acquérir des congés payés pendant sa période de maladie, et les jurisprudences du 10 septembre 2025 traitant du report des congés payés pour un salarié qui tombe malade pendant sa période de congés[2] et du décompte des heures supplémentaires en cas de congé payé sur la semaine[3].

Pour autant, ce ne sont pas sur des nouveautés sur lesquelles nous allons nous attarder aujourd’hui, mais plutôt sur un rappel de règles parfois nécessaire en raison du hasard du calendrier. Et cette année 2025, c’est le samedi 1er novembre, jour de la Toussaint, jour férié pouvant avoir un impact sur le décompte des congés payés qui amène à reposer les règles du décompte des congés payés.

Rappel des règles 

Par principe, c’est un accord collectif d’entreprise, d’établissement (ou à défaut de branche) qui fixe la période de prise des congés payés et l’ordre des départs pendant cette période.

S’il n’y a pas d’accord collectif sur le sujet, l’employeur peut déterminer lui-même la période de prise des congés et l’ordre des départs après avis du comité social et économique s’il existe, en sachant que la période de prise doit comprendre dans tous les cas la période du 1er mai au 31 octobre de chaque année[4].

Rappelons que le Code du travail prévoit une acquisition et une prise des congés payés en jours ouvrables[5].

Le salarié doit nécessairement fractionner son congé payé annuel, en prenant tout ou partie de son congé principal pendant la période du 1er mai au 31 octobre de chaque année[6], et à minima sa cinquième semaine au-delà du 31 octobre. 

Une fois les dates et l’ordre des départ fixé[7], l’employeur se doit de décompter le nombre de jours payés pris par son salarié.

Le décompte des congés payés en jours ouvrables

Comme le Code du travail prévoit une acquisition des congés payés en jours ouvrables, le décompte du nombre de jours pris par le salarié se fait selon les mêmes modalités, à savoir en jours ouvrables (Cass. Soc. 21 juillet 1993, n°2791 D).

La notion de jours ouvrables implique de décompter tous les jours de la semaine, à l’exclusion du jour de repos hebdomadaire (en général le dimanche) et les jours fériés chômés.

Lorsque l’horaire de travail du salarié est réparti sur cinq jours, le sixième jour de la semaine, bien que non travaillé est considéré comme un jour ouvrable. Dans la plupart des cas, il s’agit du samedi ou du lundi.

Le premier jour de congé payé correspond au premier jour ouvrable où le salarié aurait dû travailler dans l’entreprise en raison de la répartition de l’horaire de travail (Cass. Soc. 9 juillet 1957, n°31472, Bull. Civ. IV n°840 ; Cass. Soc. 2 mars 1989, n°86-44.120 P, Bull. Civ. V n°178). Sont ensuite décomptés tous les jours ouvrables jusqu’à la veille de la reprise du travail par le salarié (Cass. Soc. 8 novembre 1983, n°81-41.583, Bull. Civ. V n°545 ; Cass. Soc. 7 avril 2004, n°01-46.628 F-D).

Exemple

Un salarié travaillant 35h par semaine du lundi au vendredi pose du jeudi 9 octobre au vendredi 17 octobre 2025 inclus.

Son premier jour de congés payés est le jeudi 9 octobre 2025 puisque c’est le premier jour ouvrable où il aurait dû travailler dans l’entreprise en raison de la répartition de son horaire de travail, et ensuite, tous les jours ouvrables jusqu’à la veille de la reprise du travail, soit le lundi 20 octobre 2025, sont décomptés. En pratique, il y a donc le vendredi 10 octobre, samedi 11 octobre, lundi 13 octobre, mardi 14 octobre, mercredi 15 octobre, jeudi 16 octobre, vendredi 17 octobre et samedi 18 octobre (quand bien même le salarié ne travaille pas le samedi), soit au total 9 jours ouvrables de congés payés.

Ces modalités de décompte s’appliquent également pour les salariés à temps partiel, ceux-ci bénéficiant du même nombre de jours de congés payés que les salariés à temps plein (Cass. Soc. 22 février 2000, n°97-46.515 P, Bull. Civ. V n°74).

Le décompte des congés payés en jours ouvrés

Nous l’avons mentionné ci-avant, le Code du travail prévoit une acquisition et un décompte des jours de congés payés en jours ouvrables. Pour autant, la jurisprudence a admis d’autres modes d’acquisition et de décompte des jours de congés payés, en jours ouvrés en l’occurrence, dès lors que ces modalités sont au moins aussi favorables que le décompte légal (Cass. Soc. 11 mai 2016, n°15-10.252, FS-PB).

L’acquisition et le décompte en jours ouvrés doivent garantir au salarié des droits au moins égaux à ceux résultant de la loi(Cass. Soc. 27 mai 1992, n°91-40.423, Bull. Civ. V n°354).

Cette appréciation du caractère au moins aussi favorable se vérifie sur la totalité de la période de référence, et sur la totalité des congés acquis, et non selon les différentes périodes fractionnées du congé (Cass. Soc. 30 octobre 1997, n°95-41.947 D).

Contrairement aux jours ouvrables où seul le repos dominical et les jours fériés chômés sont retirés, la notion de jours ouvrés vise les jours normalement travaillés dans l’entreprise, en pratique les jours d’ouverture de l’entreprise. Dans une entreprise où l’horaire hebdomadaire de travail est réparti sur cinq jours, alors une semaine de congé correspond à cinq jours ouvrés.

Par analogie avec le décompte en jours ouvrables, le premier jour ouvré de congé payé correspond au premier jour où le salarié aurait dû normalement travailler. Sont ensuite décomptés tous les jours ouvrés jusqu’à la veille de la reprise du travail par le salarié.

Exemple

En reprenant l’exemple détaillé ci-avant, un salarié travaillant 35h par semaine du lundi au vendredi pose du jeudi 9 octobre au vendredi 17 octobre 2025 inclus.

Son premier jour de congés payés est le jeudi 9 octobre 2025 puisque c’est le premier jour ouvré où il aurait dû travailler dans l’entreprise en raison de la répartition de l’horaire de travail, et ensuite, tous les jours ouvrés jusqu’à la veille de la reprise du travail, soit le lundi 20 octobre 2025, sont décomptés.

En pratique, il y a donc le vendredi 10 octobre, lundi 13 octobre, mardi 14 octobre, mercredi 15 octobre, jeudi 16 octobre et vendredi 17 octobre, soit au total 7 jours ouvrés de congés payés.

Les samedis 11 et 18 octobre n’étant pas dans l’horaire hebdomadaire de travail, ils ne sont pas décomptés.

Les salariés à temps partiel peuvent également acquérir leurs congés et les décompter sur les jours ouvrés, à ceci près qu’il s’agit des jours habituellement ouvrés dans l’entreprise et non les seuls jours ouvrés où le salarié aurait dû travailler en fonction de son emploi du temps (Cass. Soc. 12 mai 2015, n°14-10.509 FS-PB)

Exemple

Un salarié travaillant 28h par semaine du mardi au vendredi (le lundi est en temps partiel) pose du jeudi 9 octobre au vendredi 17 octobre 2025 inclus.

Son premier jour de congés payés est le jeudi 9 octobre 2025 puisque c’est le premier jour ouvré où il aurait dû travailler dans l’entreprise en raison de la répartition de son horaire de travail, et ensuite, tous les jours ouvrés jusqu’à la veille de la reprise du travail, soit le lundi 20 octobre 2025 sont décomptés.

En pratique, il y a donc le vendredi 10 octobre, lundi 13 octobre (même s’il n’est pas travaillé), mardi 14 octobre, mercredi 15 octobre, jeudi 16 octobre, vendredi 17 octobre et lundi 20 octobre (même s’il n’est pas travaillé) soit au total 8 jours ouvrés de congés payés.

Le salarié ne travaille pas le lundi, pour autant, comme il s’agit d’un jour d’ouverture pour l’entreprise, il est quand même décompté pour le salarié comme étant le dernier jour ouvré avant sa reprise de travail le mardi 21 octobre.

Les samedis 11 et 18 octobre n’étant pas dans l’horaire hebdomadaire de travail, ils ne sont pas décomptés.

L’impact du jour férié sur les modalités de décompte

Les jours fériés, dès lors qu’ils sont chômés, ne sont pas décomptés comme étant un congé payé, que le décompte se fasse en jours ouvrables ou en jours ouvrés (Rép. Perrut, AN, 2 mai 1983, p. 1999, n°27492 ; Rép. Clément, AN, 14 septembre 1987, p. 5120, n°25209 ; Cass. Soc. 13 février 1991, n°89-45.423 P, Bull. Civ. V n°74).

Lorsque le jour férié tombe sur le jour de repos hebdomadaire, il est sans influence sur le calcul du congé, puisque là encore, que ce soit sur un décompte en jours ouvrables ou en jours ouvrés, le jour de repos hebdomadaire n’est pas comptabilisé (Rép. Perrut, AN, 2 mai 1983, p. 1999, n°27492 ; Rép. Clément, AN, 14 septembre 1987, p. 5120, n°25209).

En revanche, lorsque le jour férié est travaillé, il est à comptabiliser comme un jour lambda, à décompter comme jour de congé payé le cas échéant.

Si, sur le papier, les règles sont très claires, les choses se corsent en cas de jour férié chômé tombant un samedi, jour ouvrable et non jour ouvré pour une entreprise travaillant du lundi au vendredi. Ce qui est typiquement le cas cette année avec le samedi 1er novembre, tombant pendant les vacances scolaires de la Toussaint.

En effet, le décompte en jours ouvrés n’est possible que s’il est au moins aussi favorable que le décompte légal. Le décompte en jours ouvrés peut se révéler moins favorable que le Code du travail si un jour férié chômé coïncide avec un jour habituellement non travaillé dans l’entreprise.

Dans l’hypothèse d’un décompte en jours ouvrables, si le salarié pose une semaine de congé payé avec le samedi férié, il se verra décompter cinq jours ouvrables de congés payés (soit du lundi au vendredi, le samedi étant férié et chômé, il n’est pas comptabilisé). Il lui restera donc un jour ouvrable à l’issue de cette semaine, conséquence directe de « l’économie » liée au jour férié.

A noter ceci dit : la Cour de cassation parle plutôt de prolongation des congés dans ses décisions, faisant ainsi revenir le salarié au travail une journée plus tard que le retour initialement prévu (Cass. Soc. 13 février 1991, n°89-45.423, Bull. Civ. V n°74 ; Cass. Soc. 29 octobre 2003, n°01-45.485 FS-P, Bull. Civ. Vn°274 ; Cass. Soc. 20 octobre 1998, n°96-17.652 P, Bull. Civ. V n°438 ; Cass. Ass. Plén. 21 mars 1997, n°92-44.778, BC Ass. Plén. n°4). En pratique, que le congé soit prolongé d’une journée ou que le salarié fasse l’économie du samedi pour pouvoir la positionner à un autre moment, le résultat est identique : il a bénéficié d’un jour de congé supplémentaire.

Sur cette même semaine ayant le samedi férié et chômé, si le décompte se fait en jours ouvrés, le salarié posant une semaine se verra décompter cinq jours ouvrés de congés payés (du lundi au vendredi). Le jour férié tombant le samedi n’a aucune incidence sur le décompte en jours ouvrés. A la fin de la semaine, il ne fait pas l’économie d’un jour de congés payés, contrairement au salarié dont les congés sont décomptés en jours ouvrables.

La Cour de cassation[8] a ainsi pu juger que le salarié a droit à un jour de congé supplémentaire lorsque :

  • L’entreprise décompte les jours de congé en jours ouvrés (soit 25 jours ouvrés équivalant à 30 jours ouvrables pour un horaire réparti du lundi au vendredi) ;
  • Etqu’un jour férié tombant un samedi est inclus dans la période de congé.

Cette règle ne s’applique que si le décompte en jour ouvré est la stricte équivalence du décompte légal en jours ouvrables, soit 25 jours ouvrés pour 30 jours ouvrables.

Autrement dit, dès lors que le salarié bénéficie de congés supplémentaires, alors l’employeur est déchargé de son obligation d’octroi d’un jour supplémentaire pour un jour férié tombant sur un jour ouvrable et non ouvré. En effet, en cas de congés supplémentaires, qu’un jour férié tombe sur le deuxième jour de repos hebdomadaire ou non, le salarié bénéficie d’un nombre de jours de congé en jours ouvrés supérieur à celui résultant de la loi (Cass. Soc. 30 octobre 1997, n°95-41.947 D ; Cass. Soc. 18 mai 1994, n°91-40.700 D ; Cass. Soc. 27 octobre 2004, n°02-44.149 Bull. Civ. V n°279). L’obligation de l’employeur est donc remplie.

Info : ces éléments ne remettent pas en cause des pratiques autres, prévues par accord collectif ou usage, qui seraient plus favorables pour le salarié.

Par exemple, la Cour de cassation a relevé que l’employeur s’était engagé, lors de l’institution du calcul des congés en jours ouvrés, à reporter automatiquement le jour férié tombant un samedi compris dans une période de congés. De fait, le salarié avait droit, en application de cet engagement à une journée de congé supplémentaire pour chaque jour férié survenant sur un jour non travaillé (Cass. Soc. 28 octobre 1998, n°97-10.173 D ; Cass. Soc. 18 mai 1999, n°96-45.173 D).

Le jour de la Toussaint, samedi 1er novembre 2025, est donc l’occasion pour les employeurs décomptant leurs congés payés en jours ouvrés de vérifier qu’ils respectent bien le caractère au moins aussi favorable que le décompte légal en jours ouvrables.

Elodie PUIROUX

Responsable Veille légale et DSN

[1] Loi n°2024-364 du 22 avril 2024, JO du 23, portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne en matière d'économie, de finances, de transition écologique, de droit pénal, de droit social et en matière agricole

[2] Cass. Soc. 10 septembre 2025, n°23-22.732, FPBR

[3] Cass. Soc. 10 septembre 2025, n°23-14.455, FPBR

[4] C. trav. art L.3141-13, L. 3141*15 et L. 3141-16

[5] C. trav. art L. 3141-3

[6] C. trav. art L. 3141-17, L. 3141-18 et L. 3141-19. La durée du congé principal pouvant être pris en une seule fois ne peut excéder 24 jours ouvrables et doit être d’au moins 12 jours ouvrables continus pris entre deux jours de repos hebdomadaire.

[7] C. trav. art D. 3141-6

[8] Cass. Soc. 12 janvier 1989, n°86-40.576 D ; Cass. Soc. 7 janvier 1988, n°85-42.353 D.

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