Une prime de bienvenue peut-elle être remboursée en cas de démission ?

M.[X] a été engagé en qualité d’opérateur sur les marchés financiers (trader), à compter du 1er janvier 2016, par la société Tullet Prebon, aux droits de laquelle se trouve la société TP ICAP Europe.

Le contrat de travail prévoyait le versement d’une prime de bienvenue dans les conditions suivantes : « le salarié percevra à titre de prime initiale, la somme brute de 150.000 € dont le paiement interviendra dans les 30 jours de l’entrée en fonction du salarié conformément aux termes du contrat de travail. Dans le cas où le salarié démissionne ou si le salarié est licencié pour faute grave ou lourde à la fin de la troisième année à compter de la date de commencement, le salarié pourra conserver 1/36e de la prime d’arrivée pour chaque mois complet de travail après la date de commencement. Le solde de la prime initiale sera remboursable à la société à la date de la rupture ou au jour où la notification du licenciement est faite, à la plus proche des deux dates.»

Le salarié a donné sa démission le 16 mars 2017.

Par courriers des 22 mars et 23 juin 2017 la société a mis en demeure M. X de lui rembourser la somme de 79.166.67 € correspondant à 19/36e de la prime d’arrivée en application du contrat de travail.

En l’absence de réponse, l’employeur a saisi la juridiction prud’homale le 12 septembre 2017 de diverses demandes de nature salariale et indemnitaire.

Le Conseil de prud’hommes a fait droit aux demandes de la société.

Le salarié a interjeté appel de cette décision devant la Cour d’appel de Paris qui a débouté l’employeur de l’intégralité de ses demandes après avoir notamment retenu que si le droit à gratification peut être subordonné l’appartenance du salarié à l’entreprise au moment de sa distribution, « elle ne peut l’être à sa présence à une date postérieure à son versement car cela porte atteinte à la liberté du travail ».

Néanmoins, pour la cour de cassation, une clause convenue entre les parties, dont l’objet est de fidéliser le salarié dont l’employeur souhaite s’assurer la collaboration dans la durée, peut, sans porter une atteinte injustifiée et disproportionnée à la liberté du travail, subordonner l’acquisition de l’intégralité d’une prime d’arrivée, indépendante de la rémunération de l’activité du salarié, à une condition de présence de ce dernier dans l’entreprise pendant une certaine durée après son versement et prévoir le remboursement de la prime au prorata du temps que le salarié, en raison de sa démission, n’aura pas passé dans l’entreprise avant l’échéance prévue.

Dans ces conditions, la Cour d’appel ne pouvait débouter l’employeur de ses demandes au motif que la clause litigieuse portait atteinte à la liberté de travailler du salarié.

Autrement dit, la clause qui prévoit le versement d’une prime de bienvenue lors de l’arrivée du salarié et subordonnée à une absence de démission prématurée est parfaitement licite.
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Cass Soc 11 mai 2023

N°21-25.136,

Publié au bulletin

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