Le plan de relance présenté par le gouvernement prévoit un certain nombre de mesures en faveur de l’insertion sur le marché de l’emploi en vue de lutter contre le chômage. Certaines de ces mesures peuvent présenter un intérêt pour l’employeur qui souhaite développer les compétences de ses salariés.

Le plan de reconstruction « France Relance », lancé par le gouvernement porte une vision à long terme, d’une France en 2030. Dans ce cadre, « France Relance » prévoit d’investir massivement pour le maintien et le développement des compétences à travers, notamment, quatre dispositifs à la disposition des employeurs et des salariés : le Compte personnel de formation (CPF), le CPF de transition professionnelle, la reconversion ou la promotion par l’alternance (Pro-A) et le FNE formation. Les budgets, ainsi injectés par le gouvernement, sont fléchés. Afin d’y voir plus clair et éventuellement adapter la stratégie de formation de l’entreprise, vous trouverez ci-dessous une présentation de ce programme.

Le FNE formation

Dans un contexte de crise économique, où le gouvernement a choisi de déployer l’activité partielle de droit commun et l’activité partielle de longue durée afin de maintenir les emplois, le maintien et le développement des compétences trouve également sa place.

Les conventions FNE (Fonds national de l’emploi) ont déjà fait l’objet de réforme pour s’adapter au contexte de crise sanitaire. Par exemple, une entreprise qui a recours à l’activité partielle pour une partie de ses salariés, peut demander à bénéficier de financement pour former aussi bien ses salariés en activité partielle que ceux qui ne le sont pas. C’est ce que l’on appelle des demandes mixtes qui sont adressées soit à l’autorité administrative (la Direccte), soit à l’Opco qui a signé une convention avec l’Etat.

Autre intérêt, le FNE formation n’est pas limité aux formations certifiantes/qualifiantes. Les seules formations exclues sont les formations par alternance et les formations obligatoires en particulier en matière d’hygiène et de sécurité[1].

Si le coût de la formation est inférieur à 1500 € TTC pour un salarié, les dossiers sont acceptés plus facilement. Mais les demandes peuvent aussi porter sur des formations dont le coût dépasse 1500 €, simplement le dossier fera l’objet d’une étude plus approfondie par l’Opco ou l’administration.

« France Relance » prévoit que le FNE-Formation devrait être abondé à hauteur d’un milliard d’Euros sur 2020-2021 pour financer des formations qui doivent permettre aux salariés de favoriser leur employabilité, dans un contexte de mutations économiques (hors formations obligatoires à la charge de l’employeur). C’est le cas par exemple de formations sur les nouvelles technologies hybrides dans l’automobile, de certifications en cybersécurité…

Plus spécifiquement pour les salariés en activité partielle, la reconversion ou promotion par l’alternance leur est également accessible.

La reconversion ou la promotion par l’alternance

Autre dispositif, la reconversion ou la promotion par l’alternance, plus communément appelé la Pro-A. L’objectif initial de la Pro-A est de redynamiser les modalités de formations ouvertes aux salariés dans un contexte de fortes évolutions du marché du travail. Le dispositif permet notamment aux entreprises de prévenir les conséquences dues aux mutations technologiques et économiques. Le salarié peut ainsi changer de métier ou de profession et atteindre un niveau de qualification supérieur ou identique à celui qu’il détient au moment de sa demande.

La Pro-A s’adresse à un public assez restreint[2] :

  • Les salariés en contrat à durée indéterminée (CDI) de droit commun ;
  • Les salariés en contrat unique d’insertion conclu à durée indéterminée ;
  • Les sportifs ou entraîneurs professionnels en CDD relevant du code du sport[3] ;
  • Les salariés en activité partielle ;

De plus, pour bénéficier du dispositif, les salariés doivent avoir une qualification inférieure[4] à un niveau sanctionné par une certification professionnelle enregistrée au Répertoire national des certifications professionnelles (RNCP) et correspondant au grade de la licence (niveau II de qualification).  

Ce dispositif est très attendu dans les secteurs où l’emploi des salariés est touché par des mutations technologiques et économiques. Or, bien que le dispositif soit en vigueur, la liste des certifications éligibles doit être définie au sein d’un accord de branche étendu et l’extension de l’accord est subordonnée aux critères de forte mutation de l’activité et de risque d’obsolescence des compétences. L’objectif du plan est donc d’accélérer la procédure d’extension afin que de nombreuses entreprises puissent bénéficier des avantages de la Pro-A, à savoir, une prise en charge de tout ou partie des frais pédagogiques, des frais de restauration et d’hébergement par les Opco (Opérateurs de compétences).

Pour rappel, l’Opco finance la Pro-A sur la base d’un forfait fixé par la branche (ou l’accord constitutif de l’OPCO), qui couvre tout ou partie des frais pédagogiques et des frais de transport et d'hébergement. En l’absence de forfait fixé par la branche, le niveau de prise est fixé à 9,15 € par heure[5].  Lorsque le coût de la formation dépasse le montant du forfait de prise en charge, les entreprises de moins de 50 salariés pourront obtenir un financement par l’OPCO.

La Pro-A et le FNE formation sont des dispositifs à l’initiative de l’employeur. Le CPF est à l’initiative du salarié, mais l’employeur peut accompagner ses salariés, voir les orienter.

Le compte personnel de formation

Pour rappel, depuis le 1er janvier 2019, le CPF est crédité en Euros et plus en heures. Le salarié ayant effectué une durée de travail supérieure ou égale à la moitié de la durée légale ou conventionnelle de travail sur l'ensemble de l'année, voit son CPF alimenté à hauteur de 500 euros au titre de cette année, dans la limite d'un plafond total de 5 000 euros[6] (ou 800 € par an avec un plafond de 8000 € pour les personnes sans qualification et les salariés handicapés). De plus les formations éligibles au CPF sont des formations certifiantes et qualifiantes.

Le compte personnel de formation est présenté comme permettant à son titulaire d’être acteur de son parcours professionnel. C’est donc le titulaire du compte qui fait le choix des formations. Toutefois, l’employeur peut tout à fait informer les salariés, par exemple, des formations activées à partir du CPF, pouvant être réalisées sur le temps de travail. Dans ce cas le salarié devra faire une demande d’autorisation d’absence auprès de l’employeur qui aura 30 jours calendaires, à compter de la réception de la demande pour notifier sa réponse[7]. Cela permet à l’employeur d’inciter le salarié à choisir certaines formations pouvant également être utiles à l’employeur. A noter d’ailleurs, que dans le cadre de l’entretien professionnel, l’employeur doit informer le salarié de l’activation de son compte personnel de formation[8].

D’ailleurs, dans ce même ordre d’idée, l’employeur peut aller plus loin en proposant d’abonder certaines formations stratégiques pour son entreprise ou encore, via un accord collectif[9], d’alimenter par un versement volontaire le CPF de ses salariés. Cette dernière démarche demande d’associer les représentants du personnel, mais l’intérêt pour l’employeur est important puisque l’argent ainsi investi dans les compétences du collaborateur est net de charges. 

Le plan de relance peut alors être considéré comme une opportunité puisqu’il prévoit d’abonder le CPF pour des formations dans les trois secteurs considérés comme stratégiques : le numérique, la transition écologique et le secteur industriel concerné par l’enjeu de souveraineté économique et de relocalisation de productions.

La mesure vise un abondement à 100% du reste à charge d’un dossier de formation (estimation du coût moyen de 1000 €) mobilisé dans le cadre d’un compte personnel de formation si ces formations portent sur des secteurs stratégiques.

Pour des formations plus longues, il est préférable de se tourner vers le CPF de transition professionnelle.  

Le CPF de transition professionnelle

Le plan de relance mise également sur le CPF de transition professionnelle, créé par la loi « Avenir professionnel », du 5 septembre 2018 en remplacement du CIF (Congé individuel de formation).

Il s’agit d’une modalité spécifique du compte personnel de formation qui permet de changer de métier ou de profession dans le cadre d'un projet de transition professionnelle[10]. Le titulaire du compte bénéficie d'un positionnement préalable au suivi de l'action de formation afin d'identifier ses acquis professionnels permettant d'adapter la durée du parcours de formation proposé et lorsqu'il suit cette action de formation en tout ou partie durant son temps de travail, il bénéficie d'un congé spécifique.

Ces formations longues, sont financées depuis le 1er janvier 2020 par les CPIR (Commissions paritaires interprofessionnelles régionales) récemment appelées les associations « Transition Pro » (ATpro). Ces structures sont notamment chargées de financer les projets de transition professionnelle des salariés (prise en charge des frais pédagogiques, des frais annexes, de la rémunération et des charges sociales légales et conventionnelles assises sur cette rémunération).

Ce dispositif pourrait être davantage mobilisé étant donné le contexte économique et les fortes mutations attendues dans certains secteurs. Ainsi, un financement complémentaire serait alloué aux CPIR qui peuvent prioriser certaines formations de reconversion, notamment pour les salariés les plus touchés par la crise économique.

A noter que les ressources dont disposent les CPIR pour le financement des projets de transition professionnelle des salariés sont attribués par une décision du conseil d’administration de France Compétences. Si bien que le budget complémentaire devra être réparti par France Compétences à l’ensemble des CPIR, soit 18 sur le territoire métropolitain et les départements d’outre-mer.

Là encore, le CPF de transition professionnelle est à la main du salarié. Toutefois, l’employeur ayant un projet de transformation des compétences de ses salariés nécessitant des formations longues, peut choisir d’accompagner les salariés (sous réserve que les salariés en question respectent les conditions d’ancienneté) acceptant de suivre ces formations via ce dispositif et dans ce cas, il aura tout intérêt à se renseigner auprès de la CPIR dont il dépend. Sachez que la mesure porte sur l’année 2021.

 

Muriel Besnard

Consultant Juridique

 

[1] Questions réponses sur le site du Ministère du travail

[2] Article L. 6324-1 du Code du travail

[3] Article L. 222-2-3 du Code du sport

[4] Articles L. 6324-2 et D. 6324-1-1 du Code du travail

[5] Articles D. 6332-89, D. 6332-90 et D. 6332-91 du Code du travail

[6] Article R. 6323-1 du Code du travail

[7] Article D. 6323-4 du Code du travail

[8] Article L. 6315-1 du Code du travail

[9] Un accord collectif d’entreprise ou de groupe (à défaut, un accord de branche) peut prévoir une alimentation du CPF plus importante, dès lors qu’elle est assortie d’un financement spécifique à ce cet effet. (Article L. 6323-11 du Code du travail)

[10] Article L. 6323-17-1 du Code du travail