Janvier 2023

La loi portant mesures d’urgence relatives au fonctionnement du marché du travail en vue du plein emploi traite notamment de l’assurance chômage, du corps électoral et de la validation des acquis de l’expérience (VAE). Cette dernière jugée trop complexe à mettre en œuvre ne rencontre pas un franc succès. La réforme de la VAE vise à être plus souple et expérimente une solution pour certains des secteurs qui peinent à recruter.

La loi dite « du marché du travail [1]», publiée au journal officiel du 22 décembre 2022, a été déclarée conforme à la constitution par le Conseil constitutionnel. Cette loi porte notamment les mesures de la réforme de la validation des acquis de l’expérience. L’objectif est de la rendre plus accessible et de renforcer l’accompagnement des candidats afin d’augmenter le nombre de parcours VAE chaque année. Bien que de nombreux décrets d’application doivent être publiés, je vous propose un tour d’horizon des mesures prévues par la loi.  

Création d’un service public de la VAE

Un service public de la VAE est créé.

Le service public de la validation des acquis de l'expérience a pour mission d'orienter et d'accompagner toute personne demandant la validation des acquis de son expérience et justifiant d'une activité en rapport direct avec le contenu de la certification visée[2].

C’est un groupement d’intérêt public qui va mettre en œuvre, au niveau national, les missions du service public de la validation des acquis de l'expérience[3].

Le groupement a pour mission d’informer les personnes et de les orienter dans l'organisation de leur parcours. Il contribue également à la promotion de la validation des acquis de l'expérience, en tenant compte des besoins en qualifications selon les territoires, ainsi qu'à l'animation et à la cohérence des pratiques sur l'ensemble du territoire et permet d'assurer le suivi statistique des parcours.

L'Etat, les régions, Pôle emploi, l’Afpa[4], les opérateurs de compétences et les commissions paritaires interprofessionnelles régionales sont membres de droit du groupement, auquel peuvent adhérer d'autres personnes morales publiques ou privées.

Public éligible à la VAE

Toute personne est en droit de faire valider les acquis de son expérience[5].

Le service public de la VAE a bien pour mission d’orienter et d’accompagner toute personne demandant la validation des acquis de son expérience et justifiant d’une activité en rapport directe avec le contenu de la certification visée.

A noter qu’avec l’abrogation du II de l’article L. 335-5 du code de l’éducation, l’exigence d’une condition d’activité minimale d’un an qui était requise a été supprimée. A voir si cette condition sera reprise par le futur décret en application de cette loi.

Un accompagnement au plus tôt

Il était prévu que l’accompagnement de la personne dans la préparation de son dossier de VAE et de son entretien avec le jury ne pouvait commencer que lorsque la candidature a été déclarée recevable[6].

Cette condition a été supprimée de sorte que l’accompagnement peut commencer dès le début de la démarche.

« VAE partielle » et parcours de VAE

Les actions permettant de faire valider les acquis de l'expérience ont pour objet l'acquisition d'une certification professionnelle enregistrée au répertoire national des certifications professionnelles[7].

La loi permet également que la VAE permette également l’acquisition d'un bloc de compétences d'une certification enregistrée dans ce répertoire et ainsi faciliter l’accès à une VAE partielle.

Aussi, la loi ajoute le parcours de validation des acquis de l'expérience qui comprend un accompagnement et, le cas échéant, les actions de formation[8] ou les périodes de mise en situation en milieu professionnel.

A noter que le ministère ou l'organisme certificateur qui se prononce sur la recevabilité d'une demande peut prendre en compte des activités en lien avec la VAE, de nature différente, exercées sur une même période, les périodes de stage et les périodes de formation initiale ou continue en milieu professionnel ainsi que les périodes de mise en situation en milieu professionnel[9].

Congé de VAE : durée doublée

Lorsqu'un salarié fait valider les acquis de son expérience en tout ou partie pendant le temps de travail et à son initiative, il bénéficie d'un congé à cet effet[10].

Le salarié demande à l'employeur une autorisation d'absence qui doit être transmise au plus tard 60 jours avant le début des actions de VAE[11]. L’employeur doit notifier sa réponse par écrit dans les 30 jours calendaires suivant la réception de la demande d’absence. Le silence de l’employeur dans ce délai vaut acceptation. L’employeur peut reporter le congé pour des raisons de services[12]. Dans ce cas, il devra notifier sa décision par écrit en la motivant et le report ne peut excéder 6 mois à compter de la demande.

La loi « Marché du travail » double la durée de ce congé qui passe de 24 heures à 48 heures par session d’évaluation. Cette durée peut être augmentée par convention ou accord collectif[13].

A noter que la loi ne modifie par l’article D. 6422-8 du Code du travail qui prévoit que la durée du congé pour VAE peut être augmentée par convention ou accord collectif pour les salariés n’ayant pas atteint un niveau 4 de qualification au sens du cadre national des certifications professionnelles ou dont l'emploi est menacé par les évolutions économiques ou technologiques.

Prise en charge par les associations de transition professionnelle (ATPro)

Les associations de transition professionnelle (ATPro) pourront, sous réserve du caractère réel et sérieux du projet, financer les dépenses afférentes à la validation des acquis de l’expérience du salarié[14]. Un décret devra en préciser les modalités pratiques.

Cette possibilité avait déjà été ouverte à titre expérimental pendant la période de crise sanitaire jusqu’au 30 juin 2021[15]. Chaque financeur déterminait le montant pris en charge qui ne pouvait dépasser 3 000 euros par dossier de VAE. Les ATPro pouvaient prendre en charge les frais de positionnement du bénéficiaire, l’accompagnement à la constitution des dossiers de recevabilité et la préparation du jury ainsi que les frais afférents à ces jurys.

Composition du jury

La validation des acquis de l'expérience est prononcée par un jury dont la composition et les modalités de fonctionnement seront fixées par décret[16]. Selon l’exposé des motifs, les nouvelles règles fixées par décret devraient avoir pour finalité l’assouplissement des dispositions régissant la réunion des jurys et leur prise de décision.

Expérimentation

La loi « Marché du travail » introduit une expérimentation visant à associer la VAE et le contrat de professionnalisation. L’objectif est de favoriser l'accès à la certification et à l'insertion professionnelles dans les secteurs rencontrant des difficultés particulières de recrutement[17].

Ainsi à titre expérimental, pour une durée de 3 ans, à compter d'une date qui sera fixée par décret, et au plus tard le 1er mars 2023, les contrats de professionnalisation conclus par les employeurs de droit privé peuvent comporter des actions en vue de la validation des acquis de l'expérience.

Pour la mise en œuvre de cette expérimentation, il peut être dérogé aux dispositions légales en lien avec le contrat de professionnalisation :

  • Sur les qualifications éligibles (article L. 6314-1 du code du travail),
  • Sur l’objet et les conditions d’ouverture au contrat de professionnalisation ainsi que sur l’alternance entre formation pratique et théorique (articles L. 6325-1 et L. 6325-2 du Code du travail),
  • Sur la durée et la mise en œuvre des actions de professionnalisation ainsi que sur la durée minimale de l’action de formation (articles L. 6325-11 et L. 6325-13 du Code du travail),
  • Sur l’utilisation des fonds par l’Opco (article L. 6332-14 du Code du travail.

Les conditions de mise en œuvre de cette expérimentation, notamment les qualifications ou blocs de certifications professionnelles pouvant être obtenus par la validation des acquis de l'expérience, seront déterminées par décret.

Au plus tard 6 mois avant son terme, le Gouvernement remettra au Parlement un rapport d'évaluation de cette expérimentation.

Muriel Besnard

Consultant Juridique


[1] Loi n° 2022-1598 du 21 décembre 2022, publiée au Journal Officiel du 22 décembre 2022

[2] Article L. 6411.1 du Code du travail

[3] Article L. 6411-2 du Code du travail

[4] Afpa : Agence nationale pour la formation professionnelle des adultes (organisme mentionné à l’article L. 5315-1 du Code du travail)

[5] Article L. 6111-1 du Code du travail modifié

[6] Article L. 6423-1 du Code du travail abrogé

[7] Article L. 6313-5 du Code du travail complété

[8] Il s’agit des actions de formation mentionnées à l’article L. 6313-1 : les actions de formation, les bilans de compétences, les actions permettant une VAE et les actions de formation par apprentissage.

[9] Article L. 6412-1-1 du Code du travail ajouté

[10] Article L. 6422-1 du Code du travail

[11] Article R. 6422-2 et R. 6422-3 du Code du travail

[12] Article R. 6422-4 du Code du travail

[13] Article L. 6422-2 du Code du travail

[14] Article L. 6323-17-6 du Code du travail complété

[15] Ordonnance n° 2020-387 du 1er avril 2020 et ordonnance n° 2020-1501 du 2 décembre 2020

[16] Article L. 6412-3 du Code du travail

[17] Article 11 de la loi n° 2022-1598 du 21 décembre 2022