La loi portant mesures d’urgence pour la protection du pouvoir d’achat[1] a été définitivement adoptée par le Parlement le 3 août.

Sa mesure phare est la possibilité, pour les employeurs, de façon pérenne, de verser une prime dite de partage de la valeur, exonérée de cotisations sociales dans la limite de 3 000, voire 6 000 € par an.

Le texte autorise également un déblocage exceptionnel de l’épargne salariale jusqu’au 31 décembre 2022 et comporte plusieurs mesures intéressant directement les entreprises et leurs salariés.

Quant à la loi de finances rectificative pour 2022[2], voici les principales mesures prévues en faveur du pouvoir d’achat : permettre aux salariés de monétiser leurs jours de réduction du temps de travail (RTT), rehausser le plafond de défiscalisation des heures supplémentaires, relever le plafond d’exonération de la prime transport et du forfait mobilité durable, ainsi que celui de la participation patronale aux titres-restaurants.

Développons ensemble ces mesures.

 

Prime de partage de la valeur

Nouveau nom

La loi portant mesures d’urgence pour la protection du pouvoir d’achat permet de pérenniser, tout en l’adaptant, la prime exceptionnelle de pouvoir d’achat (Pepa ou « prime Macron »), renommée « prime de partage de la valeur ». Le dispositif prévu concerne les entreprises de toute taille, et les versements effectués à compter du 1er juillet 2022.

Mise en place

La prime de partage de la valeur (PPV) peut être mise en place soit par accord d’entreprise ou de groupe conclu selon les modalités d’un accord d’intéressement (c. trav. art. L. 3312-5, I), soit par décision unilatérale après consultation du CSE lorsqu’il existe (loi 2022-1158 du 16 août 2022, art. 1, IV).

La mise en place de la PPV est facultative et est possible par toute entreprise, quelle que soit sa taille.

À la différence de l'ancienne PEPA, la prime de partage de la valeur est un dispositif pérenne, que les entreprises peuvent mettre en place chaque année, le cas échéant selon des conditions différentes. Mais si un employeur met en place la prime pour une année donnée, rien ne l'oblige légalement à en remettre une en place l'année suivante.

Bénéficiaires

La PPV peut concerner soit l’ensemble des salariés éligibles, soit uniquement ceux dont la rémunération n’excède pas un certain plafond, qu’il faut alors fixer dans l’accord ou la décision unilatérale (loi 2022-1158 du 16 août 2022, art. 1, IV).

Pour être éligible aux exonérations, la prime doit bénéficier aux salariés liés à l’entreprise par un contrat de travail soit à la date de versement de la prime, soit à la date de dépôt de l’accord ou de signature de la décision unilatérale mettant en place la prime (loi 2022-1158 du 16 août 2022, art. 1, III, 1°).

La mise en place de la PPV dans une entreprise doit aussi bénéficier aux intérimaires mis à sa disposition à la date de versement de la prime ou à la date de dépôt de l’accord ou de signature de la décision unilatérale mettant la prime en place (loi 2022-1158 du 16 août 2022, art. 1, II, al. 2).

Néanmoins, c’est l’entreprise de travail temporaire (ETT) qui verse cette prime aux intérimaires concernés, selon les conditions et modalités fixées par l’accord ou la décision unilatérale de l’entreprise utilisatrice. L’entreprise utilisatrice qui attribue la PPV à ses salariés doit en informer l’ETT « sans délai » et cette dernière doit alors informer son CSE.

Cette prime ouvre droit aux mêmes exonérations que celles applicables à la prime versée aux salariés de l’entreprise utilisatrice.

Montant de la prime

Pour être intégralement exonéré, le montant de la prime ne doit pas dépasser 3 000 € par année civile et par bénéficiaire.

La limite d''exonération de la prime de partage de la valeur est fixée à 6 000 € par an (au lieu de la limite de principe de 3 000€) dans les quatre situations suivantes (loi 2022-1158 du 16 août 2022, art. 1, V) :

- entreprises dotées d’un accord d’intéressement ;

- entreprises non soumises à titre obligatoire à la participation, mais dotées d’un accord de participation ;

- certaines associations et fondations ;

- ESAT, pour leurs travailleurs handicapés.

Le versement de la prime peut être réalisé en une ou plusieurs fois, dans la limite d’une fois par trimestre, au cours de l’année civile (loi 2022-1158 du 16 août 2022, art. 1, IV). L’employeur peut donc verser la prime en 4 fractionnements maximum. L’objectif est d’éviter que de trop nombreux versements remplacent des augmentations de salaire ou des primes.

Le montant accordé à chaque salarié pourra différer en fonction de sa rémunération, de son niveau de classification, de son ancienneté dans l’entreprise, de sa durée de présence effective pendant l’année écoulée ou de la durée de travail prévue au contrat.

Cette prime ne devra se substituer à aucun élément de rémunération, ni à des augmentations de rémunération ou primes prévues par un accord salarial, le contrat de travail ou un usage. En ce sens, le versement de la prime ne peut pas être mensualisé. En revanche, il peut être fractionné et versé dans la limite d’une fois par trimestre, au cours de l’année civile.

Le montant de la prime et, éventuellement, le niveau maximal de rémunération des salariés éligibles ainsi que les conditions de modulation du niveau de la prime selon les bénéficiaires doivent être définis par accord d’entreprise ou de groupe, ou par décision unilatérale de l’employeur.

En cas de décision unilatérale, l’employeur devra consulter préalablement le CSE.

Régime social et fiscal de faveur

La prime de partage de la valeur est exonérée de manière pérenne de toutes cotisations sociales d’origine légale ou conventionnelle à la charge du salarié et de l’employeur, dans la limite des plafonds précités de 3 000 € ou 6 000 €, quel que soit le niveau de rémunération du salarié.

Une exonération fiscale est en outre instaurée, mais de manière limitée et à titre temporaire. En effet, seules les primes versées entre le 1er juillet 2022 et le 31 décembre 2023 aux salariés ayant perçu une rémunération inférieure à trois fois la valeur annuelle du Smic au cours des 12 mois précédant leur versement, seront exonérées d’impôt sur le revenu et de CSG/CRDS.

La loi apporte une limite à l’exonération d’impôt sur le revenu. En cas de cumul de la prime de partage de la valeur avec la Pepa attribuée au titre de l’article 4 de la loi nº 2021-953 du 19 juillet 2021 de finances rectificative pour 2021, le montant total exonéré d’impôt sur le revenu au titre des revenus de l’année 2022 ne pourra pas excéder un montant de 6 000 €.

Par ailleurs, il est prévu que le forfait social s’applique sur la prime de partage de la valeur, dans les mêmes conditions que sur les sommes versées au titre de l’intéressement

Régime social et fiscal de la prime de partage de la valeur

 

Primes versées du 1.07.2022 au 31.12.2023

Primes versées à partir de 2024 (quel que soit le niveau de salaire)

Salariés < 3 SMIC

Salariés ≥ 3 SMIC

Cotisations sociales (1)

Exonération dans la limite de 3 000 € ou 6 000 € (2)

Exonération dans la limite de 3 000 € ou 6 000 € (2)

Exonération dans la limite de 3 000 € ou 6 000 € (2) (3)

CSG/CRDS

Exonération dans la limite de 3 000 € ou 6 000 € (2)

Dues

Dues

Impôt sur le revenu

Exonération dans la limite de 3 000 € ou 6 000 € (2)

Imposable

Imposable

Forfait social

NON, quel que soit l'effectif (4)

OUI pour les entreprises de 250 salariés et plus (5), sur la fraction exonérée de cotisations

OUI pour les entreprises de 250 salariés et plus (5), sur la fraction exonérée de cotisations

(1) Cotisations sociales d’origine légale ou conventionnelle (parts salariales et patronales), contribution formation, taxe d’apprentissage et participation construction.

(2) Par an et par bénéficiaire. 6 000 € dans les entreprises dotées d'un accord d'intéressement, les entreprises de moins de 50 salariés appliquant titre volontaire un dispositif de participation, les associations et fondations reconnues d’utilité publique ou d’intérêt général (CGI art. 200, art. 1° a et b et 238 bis, 1°, a et b) et pour les travailleurs handicapés sous contrat de soutien et d’aide par le travail dans les ESAT.

(3) Exonération sans condition de niveau de rémunération (donc y compris pour les salariés payés plus de 3 SMIC, si la prime leur est aussi attribuée).

(4) À notre sens, dans la mesure où les critères généraux d'assujettissement au forfait social ne sont pas réunis.

(5) Même condition d’effectif que pour l’application du forfait social à l’intéressement.

 

Passage en paie

Bulletin de paie- La prime de partage de la valeur doit apparaître sur le bulletin de paye.

S'il en était besoin, ce point a été confirmé par le site Internet du Travail, qui au passage recommande une ligne spécifique compte tenu des exonérations associées à la prime (www.travail.gouv.fr, fiche « La prime de partage de la valeur », version du 17/08/2022).

Traitement DSN - En DSN, au niveau nominatif, la prime est à déclarer au bloc « Prime, gratification et indemnité – S21.G00.52  » en utilisant le type (S21.G00.52.001) « 904 - Potentiel nouveau type de prime B  » (à lire comme « 904 – Prime de partage de la valeur  »).

Au niveau agrégé URSSAF, les consignes sont les suivantes :

- le code type de personnel (CTP) à utiliser pour déclarer la prime est le CTP 510 (CTP à 0 %, sans incidence sur le montant des cotisations dues par l’employeur) ;

- le CTP 260 est à utiliser pour déclarer la CSG/CRDS lorsque ces contributions sont dues ;

- le CTP 012 est à utiliser pour déclarer le forfait social lorsqu'il est dû ;

- si la prime versée dépasse la limite d'exonération des cotisations sociales (3 000 € ou 6 000 € selon le cas), la partie qui excède cette limite est soumise à cotisations et contributions sociales : le dépassement doit être déclaré dans les conditions habituelles avec les CTP courants (CTP 100, etc.).

Au plan fiscal, la prime sera exclue, ou incluse pour son montant imposable dans la rémunération nette fiscale, selon qu'elle est exonérée d'impôt sur le revenu ou imposable.

Intéressement et participation

Intéressement et participation

Mise en place sur 5 ans - Pour « faciliter la diffusion de l’intéressement », la loi pouvoir d’achat prévoit que l’intéressement peut être mis en place, par la voie d’un accord collectif ou d’une décision unilatérale de l’employeur, pour une durée maximale de cinq ans. Cette durée doit actuellement être comprise entre un et trois ans. Il en ira de même concernant l’intéressement de projet lié à la définition d’un objectif commun à tout ou partie des salariés de l’entreprise.

Les accords d’intéressement dont la renégociation n’a pas été réclamée continueront à être reconduits de manière tacite. Une fois publiée, la loi permettra de procéder « plusieurs fois » à ce renouvellement par tacite reconduction.

Petites entreprises - La mise en place de l’intéressement par l’employeur au moyen d’une décision unilatérale est élargie et facilitée dans les entreprises de moins de 50 salariés. Actuellement, cette voie n’est admise que dans les entreprises de moins de 11 salariés dépourvues de délégué syndical ou de membre élu au CSE, « à la condition qu’aucun accord d’intéressement ne soit applicable ni n’ait été conclu dans l’entreprise depuis au moins cinq ans » (C. trav., art. L. 3312-5, II).

Une fois la loi publiée, les entreprises de moins de 50 salariés qui ne sont pas couvertes par un accord de branche agréé sur le sujet pourront mettre en place l’intéressement par décision unilatérale dès lors qu’elles sont :

– dépourvues de délégué syndical et de CSE. L’employeur devra alors en informer ses salariés par tous moyens ;

– pourvues d’au moins un délégué syndical ou d’un CSE, et ont échoué à négocier un accord d’intéressement. Dans cette hypothèse, un procès-verbal de désaccord devra être établi, dans lequel seront consignées en leur dernier état les propositions respectives des parties. En outre, le CSE devra être consulté sur le régime d’intéressement au moins 15 jours avant son dépôt auprès de l’administration.

Par ailleurs, le renouvellement de ce dispositif d’intéressement pourra également intervenir par décision unilatérale.

Déploiement facilité - Plusieurs dispositions de la loi visent à sécuriser et accélérer la mise en œuvre des accords d’intéressement. Elles s’appliqueront aux accords déposés à compter du 1er janvier 2023.

• Pour toutes les entreprises, une procédure dématérialisée de rédaction des accords d’intéressement sera mise en place afin de permettre de vérifier leur conformité aux dispositions légales. Le site www.mon-interessement.urssaf.fr sera donc adapté, afin de générer des accords ou décisions unilatérales types dont le contenu sera construit pour être conforme aux textes légaux en vigueur, en encadrant davantage les choix de rédaction. Lorsqu’un accord aura été rédigé selon cette procédure dématérialisée, les exonérations sociales et fiscales liées à l’intéressement seront « réputées acquises pour la durée dudit accord à compter de son dépôt ». Les conditions de mise en place de cette procédure dématérialisée et de sécurisation des exonérations seront précisées par un décret en Conseil d’État.

• La loi supprime le contrôle préalable de légalité des accords d’intéressement exercé par les DDETS, qui disposaient d’un délai d’un mois pour délivrer le récépissé attestant du dépôt de l’accord et du contrôle de la validité de ses modalités de conclusion. Les organismes de recouvrement continueront, pour leur part, à disposer d’un délai fixé par décret pour demander le retrait ou la modification des clauses contraires aux dispositions légales. Ce délai ne pourra excéder trois mois. Cette nouvelle procédure réduira ainsi d’au moins un mois la durée du contrôle préalable des accords.

• Une autre évolution vise à accélérer la mise en œuvre des accords conclus au niveau des branches. En effet, la durée maximale de la procédure d’agrément des accords de branche d’intéressement, mais aussi des accords de participation ou instaurant un plan d’épargne salariale ne pourra plus excéder quatre mois. Aujourd’hui, ce délai est fixé par décret à six mois et peut être prorogé (C. trav., art. L. 3345-4 et D. nº 2021-1398, 27 oct. 2021).

On notera, par ailleurs, qu’une disposition d’application immédiate prévoit d’assimiler le congé de paternité et d’accueil de l’enfant à une période de présence, lorsque la répartition de l’intéressement est proportionnelle à la durée de présence dans l’entreprise, comme c’est déjà le cas pour les périodes de congé maternité, de congé d’adoption et de congé de deuil (C. trav., art. L. 3314-5).

Epargne salariale

La loi autorise les salariés à débloquer leur épargne salariale avant l’expiration des délais de droit commun (pour rappel, sauf exceptions, les sommes placées en épargne sont indisponibles pendant au moins cinq ans).

Ce déblocage exceptionnel, réalisé à la demande du salarié, sera permis jusqu’au 31 décembre 2022, en une seule fois, dans la limite d’un plafond global de 10 000 € net de prélèvements sociaux. Il concerne les sommes issues de l’intéressement ou de la participation affectées sur un plan d’épargne salariale avant le 1er janvier 2022 et doit être réalisé pour « financer l’achat d’un ou plusieurs biens ou la fourniture d’une ou plusieurs prestations de service ». Les sommes débloquées bénéficieront d’une exonération d’impôt sur le revenu et de cotisations sociales.

Cette faculté de déblocage anticipée ne s’appliquera pas aux fonds investis dans les entreprises solidaires, ni aux sommes affectés aux plan d’épargne retraite. En outre, la loi prévoit que le déblocage des sommes placées en titres d’entreprise, sur un fonds commun de placement d’entreprise ou dans une société d’investissement à capital variable, est conditionné à la conclusion d’un accord collectif, lequel pourra prévoir de limiter les versements à une partie des avoirs en cause.

L’employeur sera tenu d’informer ses salariés de cette faculté de déblocage dérogatoire « dans un délai de deux mois à compter de la promulgation » de la loi. L’organisme gestionnaire ou, à défaut, l’employeur devra déclarer à l’administration fiscale le montant des sommes débloquées. Et le bénéficiaire devra tenir à la disposition de l’administration fiscale les pièces justificatives attestant de l’usage qu’il a fait des sommes débloquées.

Le service communication de l’administration du travail, interrogé par un éditeur juridique, a indiqué que des questions/réponses sont bien en cours de préparations sur le sujet.

Leur publication est espérée pour septembre.

Autres mesures de la loi pouvoir d’achat

Heures supplémentaires et jours de repos des salariés en forfait annuel en jours

L’article 2 de ladite Loi prévoit que dans les entreprises de 20 à moins de 250 salariés, toute heure supplémentaire effectuée à compter du 1er octobre 2022 ouvrira droit à :

- déduction forfaitaire des cotisations patronales, à hauteur d’un montant fixé par décret ;

- déduction forfaitaire applicable également pour chaque jour de repos auquel renonce un salarié relevant d’une convention de forfait en jours sur l’année (à savoir les jours travaillés au-delà de 218 jours par an en application du dispositif de rachat de jours de repos prévu par le code du travail).

Notons que les heures complémentaires ne sont pas visées par le dispositif.

La déduction s’imputera sur le montant des cotisations et contributions sociales patronales dues au titre des majorations salariales associées aux heures supplémentaires ou aux jours de repos auxquels ont renoncé les salariés en forfait-jours, sans pouvoir dépasser ce montant. La réduction ne sera en outre pas applicable en cas de substitution de ces revenus d’activité à des sommes soumises à cotisations sociales, à moins qu’un délai de 12 mois ne se soit écoulé depuis le dernier versement de ces sommes.

Cette réduction s'appliquera au titre (loi 2022-1158 du 16 août 2022, art. 2, I) :

- des heures supplémentaires effectuées au-delà de la durée légale du travail (ou de la durée d’équivalence en vigueur dans certaines professions) ;

- des heures supplémentaires effectuées au-delà de 1 607 h par an par les salariés en forfait annuel en heures ;

- des heures supplémentaires effectuées dans le cadre du temps partiel pour les besoins de la vie personnelle (c. trav. art. L. 3123-2) ;

- en cas d’aménagement du temps de travail sur une période supérieure à la semaine, des heures supplémentaires effectuées au-delà de 1 607 h sur l’année (ou au-delà de la moyenne de 35 h calculée sur la période de référence, lorsque celle-ci est inférieure ou supérieure à 1 an) ;

- pour les salariés en convention de forfait en jours sur l’année, les jours travaillés au-delà de 218 jours par an, lorsque le salarié renonce à un ou plusieurs jours de repos en accord avec l’employeur (loi 2022-1158 du 16 août 2022, art. 2, II).

Titre-restaurant

La loi portant mesures d’urgence pour la protection du pouvoir d’achat prévoit qu’à titre dérogatoire et jusqu’au 31 décembre 2023, les titres-restaurant peuvent être utilisés pour acquitter en tout ou en partie le prix de tout produit alimentaire, qu’il soit ou non directement consommable (ex. : riz, pâtes, farine, œufs, viande ou poisson non transformé) (loi 2022-1158 du 16 août 2022, art. 6).

Cette mesure entre en vigueur dès le 18 août 2022. Cette mesure viendra ainsi compléter celles intégrées en la matière dans le cadre de la LFR pour 2022 (voir plus bas).

À noter : afin d’encourager l’utilisation des titres-restaurant, le ministre de l’Économie a par ailleurs indiqué, lors des débats sur le projet de loi de finances rectificative à l’Assemblée nationale, que le plafond d’utilisation journalier des titres-restaurant allait être relevé par décret de 19 à 25 €. Bruno Le Maire n’a toutefois pas précisé quand ce relèvement allait entrer en vigueur, ni ses modalités d’application. Pour rappel, pendant la crise sanitaire, le gouvernement avait doublé temporairement le montant du plafond d’utilisation dans les restaurants de 19 à 38 €, et assoupli les conditions d’utilisation des titres-restaurants les dimanches et jours fériés. Au 1er juillet 2022, ce plafond est repassé à 19 € et il n’est plus possible d’utiliser les titres-restaurant les dimanches et jours fériés.

Négociation collective de branche

Au sein des branches professionnelles dans lesquelles un ou plusieurs minima conventionnels sont inférieurs au Smic, le patronat disposera désormais d’un délai de 45 jours (au lieu de trois mois) pour engager une négociation sur les salaires (C. trav., art. L. 2241-10).

Par ailleurs, pour inciter les branches à négocier sur les salaires minima, la loi actionne le levier de la restructuration des branches. L’insuffisance des négociations pour rehausser les minima conventionnels au niveau du Smic pourra ainsi motiver l’initiation par le ministère du Travail d’une procédure de fusion administrative avec une autre branche. Le texte complète à cette fin l’un des motifs de fusion déjà existant, à savoir « une activité conventionnelle caractérisée par la faiblesse du nombre des accords ou avenants signés et du nombre des thèmes de négociations couverts » (C. trav., art. L. 2261-32, I, 2º). La faiblesse du nombre d’accords ou d’avenants assurant des minima conventionnels au niveau du Smic devient ainsi un élément caractérisant la faiblesse de la vie conventionnelle d’une branche.

Monétisation des jours de RTT et revalorisation du plafond des heures supplémentaires

La première loi de finances rectificative pour 2022 (LFR) prévoit, qu’une fois cette loi publiée, les salariés, quelle que soit la taille de leur entreprise et avec l’accord de l’employeur, seront autorisés à convertir en salaire des jours ou demi-journées de RTT non pris, acquis au titre des périodes postérieures au 1er janvier 2022 et jusqu’au 31 décembre 2025.

Quels jours ?

Sont ici visés aussi bien les jours résultant d’un dispositif de réduction du temps de travail (RTT) maintenu en vigueur en application de la loi nº 2008-789 du 20 août 2008, que les jours de repos conventionnels mis en place dans le cadre d’un dispositif d’aménagement du temps de travail sur une période supérieure à la semaine (C. trav., art. L. 3121-41 à L. 3121-47).

Majoration

Si l’employeur accède à la demande de monétisation du salarié, les journées ou demi-journées travaillées seront majorées d’un montant « au moins égal au taux de majoration de la première heure supplémentaire applicable à l’entreprise », soit 25 % en l’absence d’accord collectif. En revanche, elles ne s’imputeront pas sur le contingent d’heures supplémentaires.

Régime social et fiscal

Les sommes issues de cette monétisation seront soumises au même régime fiscal et social que les heures supplémentaires (exonération d’impôt sur le revenu dans la limite du plafond de 7 500 € évoqué ci-après, exonération de cotisations salariales d’assurance vieillesse, déduction forfaitaire patronale en fonction de l’effectif de l’entreprise)

Heures supplémentaires et complémentaires

La loi de finances rectificative porte de 5 000 € à 7 500 € le plafond annuel d’exonération d’impôt sur le revenu des heures supplémentaires et complémentaires. Ce nouveau plafond, institué de manière pérenne, vise les heures supplémentaires réalisées à compter du 1er janvier 2022.

Revalorisation du seuil d’exonération des titres-restaurant

Le budget rectificatif de la LFR pour 2022 réhausse la limite d’exonération fiscale et sociale du complément de rémunération résultant de la contribution de l’employeur à l’acquisition de titres-restaurants. Cette augmentation est fixée à 4 %, soit le niveau retenu pour la revalorisation anticipée des prestations sociales issue de la loi sur le pouvoir d’achat. Le plafond d’exonération sera ainsi porté de 5,69 € à 5,92 € pour les titres émis du 1er septembre au 31 décembre 2022 (loi 2022-1157 du 16 août 2022, art. 1, I).

Seront également revalorisées, dès le 1er septembre 2022, à hauteur d’un coefficient qui sera déterminé par arrêté, et dans la limite de 4 % maximum, les limites dans lesquelles les remboursements de frais de repas des salariés ne sont pas considérées comme des revenus d’activité.

Sont plus précisément concernées :

- les indemnités forfaitaires de restauration versées aux salariés contraints de prendre leur repas sur leur lieu de travail en raison de conditions particulières d’organisation du travail (travail en équipe, posté, continu, en horaires décalés ou de nuit) (arrêté du 20 décembre 2002, art. 3, 2°) ;

- les indemnités forfaitaires de repas versées aux salariés en déplacement, que le repas soit pris ou non au restaurant (frais de restaurant ; allocations de restauration hors de l’entreprise, parfois encore appelées « paniers », lorsqu’il n’est pas d’usage de prendre le repas au restaurant) (arrêté du 20 décembre 2002, art. 3, 1° et 3°).

Il en va de même, dans le cadre des grands déplacements en métropole, pour les indemnités forfaitaires au titre des frais de repas, dont la limite d'exonération est fixée en référence à celle prévue pour les frais de restaurant en cas de petit déplacement (arrêté du 20 décembre 2002, art. 5, 1° renvoyant à art. 3, 1°). En revanche, la revalorisation ne concernera pas la partie « logement + petit déjeuner » des allocations forfaitaires de grand déplacement.

Transport et mobilité durable

Prime transport

Face à la hausse des prix du carburant, la LFR pour 2022 adapte le régime fiscal et social de la prime transport, pour les années 2022 et 2023.

Le plafond annuel d’exonération de la prise en charge par l’employeur des frais de carburant engagés par les salariés pour leurs déplacements domicile-travail sera temporairement rehaussé à 400 € (au lieu de 200 €). Le plafond global d’exonération de la prime transport (commun au forfait mobilité durable) passera, quant à lui, de 500 € à 700 €. Dans les territoires ultramarins, ce montant sera porté à 900 €, dont 600 € pour les frais de carburant.

Par ailleurs, dès publication de la loi, de nouveaux salariés seront temporairement éligibles à la prime transport en 2022 et 2023, puisque les conditions de prise en charge habituelles sont levées (résidence ou lieu de travail non desservis ou hors périmètre d’un plan de mobilité obligatoire, horaires ne permettant pas d’emprunter un mode collectif de transport).

En complément, la loi autorise, sur la même période, à cumuler la prime transport avec la prise en charge obligatoire par l’employeur de 50 % du prix des titres d’abonnement de transports en commun (ex. : Pass Navigo ou location de Vélib’) (c. trav. art. trav. art. L. 3261-2).

Forfait mobilité durable

Le plafond d’exonération du « forfait mobilité durable » passera également en 2022 et 2023 de 500 à 700 €.

Parallèlement, le plafond de cumul de celui-ci avec la prise en charge du coût des titres d’abonnement de transports publics de personnes ou de services publics de location de vélos sera rehaussé de 600 à 800 €. Il s’agit d’une mesure pérenne.

Par ailleurs, afin de favoriser la pratique du covoiturage entre salariés, est permis le cumul des indemnités kilométriques avec celles du covoiturage, sur justificatifs (CGI, art. 83, 3º).

Frais de transports publics

Au titre des années 2022 et 2023, la loi étend les avantages fiscaux et sociaux attachés à la prise en charge obligatoire par l’employeur des frais de transports publics ou de services publics de location de vélos, à la prise en charge facultative (au-delà de 50 %) de ces frais, dans la limite de 25 % du prix des titres d’abonnements.

 

 

Anaïs MOISY

Juriste Droit Social

 

[1] Loi 2022-1158 du 16 août 2022, JO du 17

[2] Loi 2022-1157 du 16 août 2022, JO du 17