Décembre 2022

La loi visant à accélérer l’égalité économique et professionnelle[1] du 24 décembre 2021, dite « Loi Rixain », a été publiée au journal officiel du 26 décembre 2021. Cette loi prévoit la publication d’indicateurs de représentation de chaque sexe parmi les cadres dirigeants et les membres des instances dirigeantes. Un décret[2] du mois d’avril est venu en préciser les contours.  Un arrêté[3] du 27 octobre 2022 indique aux employeurs comment les déclarer.

Cette loi prend la suite de la loi dite « Copé-Zimmermann » du 27 janvier 2011 qui vise les Conseils d’administration. N’ayant pas obtenu le ruissellement escompté en termes de parité au sein des instances dirigeantes, la loi fixe des quotas pour les entreprises de 1000 salariés et plus qui seront à atteindre progressivement dans le temps. Le décret du 26 avril 2022 ainsi que le questions-réponses[4], disponible sur le site du Ministère du travail ont apporté des précisions sur ces nouvelles obligations. Il manquait juste les modalités déclaratives auprès de l’administration, c’est maintenant chose faite avec cet arrêté publié au journal officiel du 4 novembre 2022.

Rappel de l’obligation

Les entreprises qui, pour le troisième exercice consécutif, emploient au moins 1000 salariés, doivent publier, chaque année, les écarts éventuels de représentation entre les femmes et les hommes, au plus tard le 1er mars de l’année en cours, au titre de l’année précédente.

Selon le questions-réponses du Ministère du travail la notion d’exercice correspond à l’exercice comptable.

Il s’agit pour l’employeur de publier, de manière visible et lisible sur le site internet de l’entreprise, lorsqu’il en existe un. A défaut de site internet, ils sont portés à la connaissance des salariés par tout moyen.

L’obligation de publication, pour les entreprises d’au moins 1000 salariés pour le 3ème exercice consécutif, est entrée en vigueur le 1er mars 2022. Toutefois, à titre transitoire et par dérogation, les entreprises ont pu publier jusqu'au 1er septembre 2022 les écarts éventuels de représentation entre les femmes et les hommes, au titre de l'année précédente[5].

Selon le décret, les données permettant d'apprécier les écarts éventuels de représentation entre les femmes et les hommes sont les suivantes[6] :

  • 1° Le pourcentage de femmes parmi l'ensemble des cadres dirigeants ;
  • 2° Le pourcentage d'hommes parmi l'ensemble des cadres dirigeants ;
  • 3° Le pourcentage de femmes parmi l'ensemble des membres des instances dirigeantes, y compris les personnes non salariées ;
  • 4° Le pourcentage d'hommes parmi l'ensemble des membres des instances dirigeantes, y compris les personnes non salariées.

Ils sont consultables sur le site internet de l'entreprise au moins jusqu'à la publication, l'année suivante, des écarts éventuels de représentation de l'année en cours.

Selon la loi[7], dès le 1er mars 2026, la proportion de chaque sexe, au sein de chacun des ensembles (soit cadres dirigeants et cadres membres des instances dirigeantes) ne peut être inférieure à 30 %.

À compter du 1er mars 2029, le taux de « 30 % » est remplacé par le taux de « 40 % ».

Au 1er mars 2026, lorsque la proportion des cadres dirigeants et des cadres membres des instances dirigeantes de chaque sexe n’est pas d’au moins 30 % (puis d’au moins 40% dès le 1er mars 2029), des mesures de correction sont fixées [8]:

  • Soit par accord : la négociation sur l’égalité professionnelle et la qualité de vie au travail porte également sur les mesures adéquates et pertinentes de correction.
  • Soit par décision unilatérale de l’employeur : en l’absence d’accord prévoyant de telles mesures, celles-ci sont déterminées par décision de l’employeur, après consultation du comité social et économique. La décision est déposée auprès de l’autorité administrative dans les mêmes conditions que le plan d’action sur l’égalité professionnelle. L’autorité administrative peut présenter des observations sur les mesures prévues par l’accord ou la décision de l’employeur, qui sont présentées à l’organe chargé de l’administration ou de la surveillance de l’entreprise ainsi qu’au comité social et économique de l’entreprise.

Si à compter du 1er mars 2029, l’entreprise, qui emploie au moins 1000 salariés pendant le 3ème exercice consécutif n’obtient pas une proportion de 40% de chaque sexe parmi les dirigeants et parmi les instances dirigeantes, et donc ne se conforme pas à son obligation, elle dispose d’un délai de deux ans pour se mettre en conformité.

L’entreprise doit, au bout d’un an, publier des objectifs de progression et les mesures de correction retenues.

Ces informations sont déclarées auprès de l’administration et également mises à la disposition du comité social et économique via la BDESE[9]. Dans le cas où l'ensemble ou certains des écarts de représentation ne peuvent pas être calculés, la transmission des informations aux services du ministre chargé du travail et au comité social et économique est accompagnée des précisions expliquant la raison pour laquelle les écarts n'ont pas pu être calculés[10].

À l’expiration de ce délai de deux ans pour se mettre en conformité, si les résultats obtenus sont toujours en deçà du taux fixé, l’employeur peut se voir appliquer une pénalité financière[11].

Le montant de la pénalité est fixé au maximum à 1 % des rémunérations et gains[12] versés aux travailleurs salariés ou assimilés au cours de l’année civile précédant l’expiration du délai de 2 ans. Le montant est fixé par l’autorité administrative, dans des conditions qui seront prévues par décret, en fonction de la situation initiale de l’entreprise, des efforts constatés dans l’entreprise en matière de représentation entre les femmes et les hommes ainsi que des motifs de sa défaillance.

Le produit de cette pénalité sera versé au budget général de l’État.

Télédéclaration

Les écarts éventuels de représentation entre les femmes et les hommes, ainsi que leurs modalités de publication, sont transmis aux services du ministre chargé du travail selon une procédure de télédéclaration qui a été définie par arrêté du 27 octobre 2022 du ministre chargé du travail.

Ainsi les entreprises concernées doivent se rendre sur le site internet du ministère chargé du travail à l'adresse https://travail-emploi.gouv.fr/demarches-et-fiches-pratiques/formulaires-et-teledeclarations/entreprises/ sous la rubrique prévue à cet effet, et renseigner les éléments suivants :

S'agissant du calcul des écarts éventuels de représentation entre les femmes et les hommes :

1° La raison sociale de l'entreprise ;

2° Le numéro SIREN de l'entreprise ;

3° Le code NAF de l'entreprise ;

4° L'adresse postale de l'entreprise ;

5° Le nom, le prénom, les coordonnées téléphonique et électronique de la personne contact ;

6° L'année au titre de laquelle les écarts éventuels de représentation entre les femmes et les hommes sont calculés ;

7° La date de fin de la période de référence de douze mois consécutifs, correspondant à l'exercice comptable, considérée pour le calcul des données permettant d'apprécier les écarts éventuels de représentation entre les femmes et les hommes ;

8° Les données permettant d'apprécier les écarts éventuels de représentation entre les femmes et les hommes, à savoir :

- le pourcentage de femmes parmi l'ensemble des cadres dirigeants ;

- le pourcentage d'hommes parmi l'ensemble des cadres dirigeants ;

- le pourcentage de femmes parmi l'ensemble des membres des instances dirigeantes, y compris les personnes non salariées ;

- le pourcentage d'hommes parmi l'ensemble des membres des instances dirigeantes, y compris les personnes non salariées ;

9° Le caractère calculable ou non des écarts éventuels de représentation entre les femmes et les hommes ;

10° Si l'ensemble ou certains écarts éventuels de représentation entre les femmes et les hommes ne sont pas calculables, les motifs expliquant la raison pour laquelle ces écarts n'ont pas pu être calculés.

S'agissant des modalités de publication des écarts éventuels de représentation entre les femmes et les hommes :

1° La date de publication de ces écarts ;

2° L'URL du site internet de publication de ces écarts ;

3° Les modalités de communication de ces écarts aux salariés, à défaut de site internet au niveau de l'entreprise.

En parallèle de cet arrêté, le ministère du travail a ouvert un nouveau portail de déclaration « Représentation équilibrée » dédié à la déclaration des écarts éventuels de représentation entre les femmes et les hommes parmi les cadres dirigeants et les membres des instances dirigeantes des entreprises de plus de 1 000 salariés : https://egapro.travail.gouv.fr/representation-equilibree/

Résumé des différentes échéances

À compter de 2023, les entreprises de 1000 salariés et plus devront publier et déclarer leurs écarts éventuels de représentation femmes-hommes pour les cadres dirigeants et les instances dirigeantes selon le même calendrier que l’Index de l’égalité professionnelle, à savoir au plus tard le 1er mars.

Aussi, à compter du 1er mars 2023, conformément à la loi Rixain, les écarts de représentation seront rendus publics sur le site internet du ministère chargé du Travail. Ensuite, les écarts éventuels de représentation seront publiés et actualisés sur le site internet du ministère chargé du travail, chaque année au plus tard le 31 décembre, par les services du ministre chargé du travail[13].

À compter du 1er mars 2026, ces entreprises devront atteindre un objectif de 30% de femmes et d’hommes cadres dirigeants et de 30% de femmes et d’hommes membres d’instances dirigeantes. Les entreprises n’ayant pas atteint cet objectif devront définir des mesures adéquates et pertinentes de correction par accord collectif ou, à défaut, par décision unilatérale après consultation du comité social et économique.

À compter du 1er mars 2029, elles devront atteindre un objectif de 40% de femmes et d’hommes cadres dirigeants et de 40% de femmes et d’hommes membres d’instances dirigeantes. Les entreprises n’ayant pas atteint cet objectif disposeront d’un délai de deux ans pour se mettre en conformité, sous peine de pénalité financière. Elles devront par ailleurs, au bout d’un an, publier des objectifs de progression et les mesures de correction retenues.

Muriel Besnard

Consultant Juridique

 

[1] Loi n° 2021-1774 du 24 décembre 2021, visant à accélérer l’égalité économique et professionnelle, publiée au Journal Officiel du 26 décembre 2021.

[2] Décret n° 2022-680 du 26 avril 2022, publié au Journal Officiel du 27 avril 2022.

[3] https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000046520158

[4] https://travail-emploi.gouv.fr/droit-du-travail/egalite-professionnelle-discrimination-et-harcelement/representation-equilibree-f-h-dans-les-postes-de-direction-des-grandes/

[5] Article D. 1142-15 nouveau du Code du travail

[6] Article D. 1142-15 nouveau du Code du travail

[7] Article L. 1142-11 du Code du travail Ce taux entre en vigueur le 1er mars de la 5ème année suivant l’année de publication de la loi (Soit en 2026 pour une loi publiée en 2021).

[8] Article L. 1142-13 du Code du travail

[9] Base de données économiques sociales et environnementales

[10] Article D. 1142-19 nouveau du Code du travail

[11] Article L. 1142-12 du Code du travail

[12] Rémunérations et gains au sens du premier alinéa de l’article L. 242-1 du Code de la sécurité social et du premier alinéa de l’article L. 741-10 du code rural et de la pêche maritime)

[13] Article D. 1142-17 nouveau du Code du travail