L’étude d’impact de la loi de financement de la sécurité sociale[1] pour 2021 rappelle que de nombreux rapports et études (Dares[2], Ined[3], Igas[4]…) mettent en avant les bienfaits de la présence des parents auprès de leur nouveau-né dans les premiers jours de la vie. Allonger le congé paternité et renforcer le congé naissance vont dans le sens de ces études et répondent à une évolution de la société. Pour les employeurs, il s’agit de prendre le temps d’intégrer l’ensemble de ces mesures : nous vous proposons de faire le point sur le congé naissance.   

La mesure phare de l’article 73 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2021 est l’allongement du congé paternité et d’accueil de l’enfant. Toutefois, le congé naissance n’est pas épargné. Parmi les modifications, certaines de ces mesures viennent officiellement confirmer la position de l’administration, d’autres sont de nouvelles modalités de prise de ce congé dont l’employeur doit prendre connaissance rapidement. En effet ces mesures seront effectives pour les enfants nés ou adoptés à compter du 1er juillet 2021, ainsi qu'aux enfants nés avant cette date, mais dont la naissance était supposée intervenir à compter de cette date.

La liste des bénéficiaires élargie

Actuellement, le congé naissance concerne chaque naissance survenue au foyer de l’enfant. En conséquence, cela exclu des bénéficiaires, les pères qui sont séparés de la mère.   

La loi de financement de la sécurité sociale pour 2021 revient sur cette règle et aligne le champ des bénéficiaires de ce congé sur celui du congé de paternité et d'accueil de l'enfant.

Ainsi, à compter du 1er juillet 2021, ce congé naissance bénéficiera donc non seulement au père de l'enfant mais aussi, le cas échéant, au conjoint, au concubin ou au partenaire pacsé de la mère.[5]

Plusieurs personnes pourront donc bénéficier du congé naissance simultanément, comme cela est déjà le cas pour le congé paternité et d’accueil de l’enfant.

Cette nouvelle règle s'appliquera aux enfants nés ou adoptés à compter du 1er juillet 2021, ainsi qu'aux enfants nés avant cette date, mais dont la naissance était supposée intervenir à compter de cette date.

A noter que la loi supprime également la précision de non-cumul entre le congé naissance et les congés accordés pour ce même enfant dans le cadre du congé de maternité. Toutefois, la maman bénéficiant déjà de son congé maternité, il semble à priori qu’elle n’a pas droit au congé naissance.

Le décompte en jours ouvrable

La durée est inchangée et reste fixée à 3 jours[6]. Cette durée minimale peut être augmentée par une convention ou un accord collectif d’entreprise ou, à défaut, une convention ou un accord de branche. En cas de naissances multiples, le salarié bénéficie toujours d’un seul congé naissance de 3 jours.

Concernant les modalités de décompte, désormais le code du travail prévoit expressément que ce congé naissance est décompté en jours ouvrables.

C’est une simple retranscription dans la loi de la position du ministère du Travail[7] pour qui les jours d’absence pour congé de naissance se décomptent en jours ouvrables à partir de la date de l’événement, sans tenir compte de l’horaire ou de sa répartition hebdomadaire.

Sans changement, cette absence rémunérée ouvre droit à l'attribution de congés payés[8].

Interdiction d’emploi

Le congé naissance devient obligatoire. En effet, le code du travail crée une interdiction d’emploi des salariés[9] pendant la période correspondant au congé naissance, soit une interdiction d’emploi pendant les 3 jours. A noter que le salarié qui ouvre droit au congé paternité, devra accoler 4 jours de congé paternité au congé naissance, et l’interdiction d’emploi est prévue pour cette même période, soit 7 jours (3 jours de congé naissance + 4 jours de congé paternité). D’ailleurs, le congé naissance de 3 jours n’est qu’un minimum fixé à défaut de durée autre prévue par accord collectif. Si bien qu’à priori, l’interdiction d’emploi s’applique également aux congés de naissance d’une durée plus longue prévue par accord collectif.

Dès lors, désormais tous les bénéficiaires du congé naissance (le père ou la personne vivant avec la mère) bénéficient de cette interdiction d’emploi pour les enfants nés ou adoptés à compter du 1er juillet 2021 ainsi qu'aux enfants nés avant cette date, mais dont la naissance était supposée intervenir à compter de cette date.

De plus si la naissance de l'enfant intervient alors que le salarié a pris des congés payés ou un congé pour évènements familiaux, l'interdiction d'emploi débute à l'issue de cette période de congés[10].

Point de départ du congé précisée

Aujourd’hui, le congé de naissance n'a pas à être nécessairement pris le jour de la naissance. Il doit seulement être pris à une date proche de l'événement, fixée en accord avec l'employeur[11].

A compter des naissances intervenant à partir du 1er juillet 2021, le congé naissance aura pour point de départ[12], au choix du salarié :

  • Le jour de la naissance de l’enfant,
  • Ou le premier jour ouvrable qui suit.

Ce point de départ pourra être reporté si le salarié est déjà en congé au moment de la naissance de l’enfant. Ce report découle de l’articulation des textes avec la nouvelle interdiction d’emploi prévue à l’article L1225-35-1 du Code du travail. Ainsi, si la naissance de l’enfant intervient alors que le salarié a pris des congés payés ou un congé pour évènements familiaux, l’interdiction d’emploi, et donc le congé de naissance, débutera à l’issue de cette période de congés.

Ce report n’est pas possible actuellement. Par exemple, les juges d’une cour de cassation[13] ont déjà considéré que le congé de naissance dont bénéficie le père ne peut être reporté immédiatement après ses congés payés, si l’événement a eu lieu au cours d’une période de congé du père.

Pas de modification pour le congé naissance en cas d’adoption

En cas d’arrivée d’un enfant au foyer en vue de son adoption, tout salarié a droit à un congé naissance de 3 jours ouvrables.

Contrairement au congé de naissance, la loi de financement de la sécurité sociale pour 2021 n’a apporté aucune précision concernant le congé de trois jours accordés en cas d’adoption. Les règles actuelles semblent donc s’appliquer : le congé doit être pris, non pas à l’époque de l’adoption proprement dite, mais au moment de l’arrivée de l’enfant au foyer puisqu’il est destiné à favoriser son accueil[14].

Pour résumer, quelques points de vigilance

Le congé naissance de 3 jours devient obligatoire étant donné cette nouvelle interdiction d’emploi.

L’interdiction d’emploi englobe les 3 jours de congé naissance et les 4 premiers jours du congé paternité.

En somme l’employeur, face à cette nouvelle interdiction d’employer le salarié pendant les 7 jours suivants la naissance (sauf cas de report prévus par la loi) doit faire en sorte de s’assurer de la prise de ces jours par les salariés concernés.  

A noter également que l’employeur ne peut remplir son obligation d’interdiction d’emploi que s’il est au courant de la naissance. Les employeurs ont donc tout intérêt à communiquer en interne autour de ces nouvelles mesures qui s’appliqueront pour les enfants nés ou adoptés à compter du 1er juillet 2021, ainsi qu'aux enfants nés avant cette date, mais dont la naissance était supposée intervenir à compter de cette date.

Marie-Eugenie Sassier & Muriel Besnard

Modélisation & Veille Juridique


[1] Loi n° 2020-1576 du 14 décembre 2020, journal officiel du 15 décembre 2020

[2] Direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques

[3] Institut national d’étude démographique

[4] Inspection générale des affaires sociales

[5] Article L. 3142-1, 3° modifié du Code du travail

[6] Article L. 3142-4 du Code du travail

[7] Rép. min. nº 44412, JO Ass. nat. Q. 3 février 1997

[8] Article L. 3142-2 du Code du travail

[9] Article L. 1225-35-1, al. 1 nouveau

[10] Article L. 1225-35-1 du Code du travail

[11] Cass. soc., 16 décembre 1998, nº 96-43.323 PB

[12] Article L. 3142-4, 3° du Code du travail

[13] Cass. soc., 11 octobre 1994, nº 93-42.310

[14] Cass. soc., 17 mai 1982, nº 81-12.933 P