Le dispositif initial « FNE-Formation » a été révisé au printemps 2020, en même temps que l’activité partielle, de sorte que le temps de suspension du contrat de travail soit consacré au développement des compétences. Au 1er novembre 2020, le FNE-formation renforcé est mis en œuvre afin d’encadrer davantage les demandes. C’est une nouvelle mise à jour du dispositif qui a été détaillée dans une instruction DGEFP[1] du 27 janvier 2021, abrogeant celle du 9 novembre 2020[2].   

La ministre du travail a fait le constat que le FNE[3]-Formation renforcé a été utilisé pour financer des formations « occupationnelles » et moins pour adapter « les compétences des salariés aux défis de demain ». En conséquence, elle a souhaité « resserrer » les conditions d’entrée dans le dispositif FNE-formation. Ces nouvelles conditions, précisées dans l’instruction DGEFP du 27 janvier 2021[4], s’appliquent depuis le 1er janvier 2021.

Les entreprises éligibles : dispositif élargi aux entreprises en difficulté

Toutes les formes juridiques d’entreprises sont éligibles au dispositif FNE-formation, dès lors que la demande d’activité partielle ou d’activité partielle de longue durée (APLD) a été validée. Cela inclut les associations.

Depuis le 1er janvier 2021, le dispositif est aussi ouvert aux entreprises en difficulté au sens de l’article L. 1233-3 du Code du travail (hors cas de cessation d’activité) : il s’agit des critères utilisés pour caractériser un licenciement économique.

Le questions-réponses[5], publié sur le site du ministère du travail et mis à jour le 17 février 2021, ajoute que si les entreprises en cessation d’activité sont exclues du dispositif, une exception est faite pour celles ayant engagé des négociations en matière de PSE.

Ainsi, sont considérées en difficulté les entreprises qui font face :

  • 1° A des difficultés économiques caractérisées soit par l'évolution significative d'au moins un indicateur économique tel qu'une baisse des commandes ou du chiffre d'affaires, des pertes d'exploitation ou une dégradation de la trésorerie ou de l'excédent brut d'exploitation, soit par tout autre élément de nature à justifier de ces difficultés. Une baisse significative des commandes ou du chiffre d'affaires est constituée dès lors que la durée de cette baisse est, en comparaison avec la même période de l'année précédente, au moins égale à :
    • a) Un trimestre pour une entreprise de moins de onze salariés ;
    • b) Deux trimestres consécutifs pour une entreprise d'au moins onze salariés et de moins de cinquante salariés ;
    • c) Trois trimestres consécutifs pour une entreprise d'au moins cinquante salariés et de moins de trois cents salariés ;
    • d) Quatre trimestres consécutifs pour une entreprise de trois cents salariés et plus ;
  • 2° A des mutations technologiques ;
  • 3° A une réorganisation de l'entreprise nécessaire à la sauvegarde de sa compétitivité ;

A noter que selon l’instruction du 27 janvier 2021, les entreprises en difficulté (au sens du RGEC 2014)[6] au 31 décembre 2019 sont exclues du dispositif.

Les salariés éligibles

Dans tous les cas, les salariés en contrat d’apprentissage et de professionnalisation dont la formation est déjà prise en charge sont exclus du dispositif FNE-Formation.

Pour les contrats courts (PEC, CDD), ils doivent demeurer salariés jusqu’à l’expiration de la durée de la formation.

Du 1er novembre au 31 décembre 2020, le dispositif était exclusivement réservé aux salariés placés en activité partielle ou activité partielle de longue durée. Ainsi, cette aide de l’État à la formation du Fonds national de l’emploi, qui a été renforcée en réponse à la crise sanitaire liée à la Covid-19, restait exceptionnellement réservée aux salariés placés en activité partielle, jusqu’à la fin de l’année 2020.

Depuis le 1er janvier 2021, sont concernés tous les salariés placés en situation d’activité partielle ou hors activité partielle des entreprises plaçant tout ou partie de leurs salariés en activité partielle ou en activité partielle de longue durée (APLD). Tous les salariés (à l’exception des alternants) sont éligibles, indépendamment de leur catégorie socioprofessionnelle ou de leur niveau de diplôme. Pour les salariés placés en activité partielle / APLD, lorsque la formation se déroule durant le temps d’inactivité du salarié, l’entreprise doit recueillir l’accord explicite du salarié.

Les formations éligibles

Restent exclues du dispositif, les formations en alternance (apprentissage et professionnalisation) et les formations obligatoires (en particulier en matière d’hygiène-sécurité au sens des articles L. 4121-1 et 4121-2 du Code du travail).

La formation doit permettre au salarié de développer des compétences et renforcer son employabilité, quel que soit le domaine concerné.

La définition reste assez large puisqu’il s’agit des actions de formation concourant au développement des compétences, des bilans de compétences et des actions permettant de faire valider les acquis de l'expérience (1°, 2° et 3° de l’article L. 6313-1).

L’instruction du 27 janvier 2021 précise que le parcours de formation doit répondre principalement aux objectifs suivants[7] :

  • Il veille au maintien de leur capacité à occuper un emploi, au regard notamment de l'évolution des emplois, des technologies et des organisations.
  • Il peut proposer des formations qui participent au développement des compétences, y compris numériques, ainsi qu'à la lutte contre l'illettrisme, notamment des actions d'évaluation et de formation permettant l'accès au socle de connaissances et de compétences défini par décret.

Les actions de formation doivent être organisées sous la forme d'un parcours comprenant, outre les séquences de formation, le positionnement pédagogique, l'évaluation et l'accompagnement de la personne qui suit la formation et permettant d'adapter le contenu et les modalités de déroulement de la formation.

Par ailleurs, les conventions nationales prévoient la prise en charge de parcours de formation, pouvant mobiliser plusieurs solutions pédagogiques (présentiel, distanciel, formation en situation de travail…) et couvrant les coûts de positionnement/évaluation pré-formative, les coûts pédagogiques, l’évaluation, les frais annexes, les coûts de certification, et le cas échéant la rémunération. Elle peut également accompagner l’anticipation des besoins des entreprises et l’identification des compétences nécessaires « post-covid ».

Enfin, depuis le 1er janvier 2021, les actions de formation doivent désormais s’inscrire dans un parcours pouvant prendre différentes formes :

  • Le parcours reconversion permettant à un salarié de changer de métier, d’entreprise ou de secteur d’activité :
    • Changement de métier dans l’entreprise (en mobilisant le cas échéant des fonds de Pro A) ;
    • Changement de métier dans une autre entreprise ; la mise en œuvre de ce type de parcours sera mobilisée dans le cadre du dispositif « Transitions collectives ». Ce dispositif fait l’objet d’une instruction spécifique.
  • Le parcours certifiant donnant accès à un diplôme, un titre professionnel, un certificat de qualification professionnelle, des compétences socles (CléA) et pouvant le cas échéant intégrer la VAE. Ces parcours ont pour objectif de formaliser et de valoriser l’acquisition de compétences et l’expérience professionnelle des salariés.
  • Le parcours compétences spécifiques contexte Covid-19 doit permettre d’accompagner les différentes évolutions qui s’imposent à l’entreprise pour sa pérennité et son développement :
    • Nouveaux marchés et nouveaux produits, nouveaux procédés de fabrication, nouvelles techniques de commercialisation et nouveaux services ;
    • Nouveaux modes d’organisation et de gestion : travail collaboratif renforcé, travail à distance, connaissances pluridisciplinaires, nouveaux process au niveau des fonctions support.
  • Le parcours anticipation des mutations : thématiques stratégiques pour le secteur et accompagnement des salariés indispensables pour leur montée en compétences et leur appropriation des outils et méthodes de travail dans le cas des transitions numérique et écologique.

A noter que depuis le 1er novembre 2020, les formations internes, c’est-à-dire, celles réalisées par un salarié formateur appartenant à la même entreprise que les salariés formés, sont éligibles.

Si la formation est dispensée par un organisme externe à l’entreprise, ce dernier doit être régulièrement déclaré (Article L. 6351-1 du Code du travail) et respecter les critères de qualité actuellement applicables, c’est-à-dire ceux issus du décret n° 2015-790 du 30 juin 2015 relatif à la qualité des actions de la formation professionnelle continue.

Durée de la formation 

La durée de la formation est normalement liée à la durée de placement en activité partielle. Depuis le 1er novembre 2020, en cas d’activité partielle de longue durée (APLD), la formation peut dépasser la période pendant laquelle le salarié est placé en APLD. Cependant, cette formation ne peut pas excéder une durée de 12 mois.

Depuis le 1er janvier 2021, dans tous les cas, la durée de formation ne peut excéder une durée de 12 mois.

Formalités

Envers les représentants du personnel :

L’employeur doit consulter le comité social et économique avant le démarrage des formations avec convention FNE[8].

Envers les salariés :

Pendant l’activité partielle, le contrat de travail étant suspendu, les formations FNE se déroulent hors temps de travail, l’accord du salarié est donc nécessaire. Il en va de même lorsque la formation est suivie hors temps de travail après une reprise d’activité.

Formalités de la demande :

Jusqu’au 31 décembre 2020, la mise en œuvre du dispositif se faisait par conventions départementales :  les demandes de FNE-formation étaient formalisées par une convention conclue entre l’Etat (la DIRECCTE) et l’entreprise. Les demandes étaient alors envoyées à l’unité départementale de la Direccte dont dépend l’entreprise.

Il existait aussi une possibilité de conventionnement collectif, au bénéfice de plusieurs entreprises. Les opérateurs de compétences (OPCO) étaient alors également partis à la convention. Auquel cas, l’OPCO devenait l’interlocuteur privilégié de l’entreprise.

Depuis le 1er janvier 2021, le conventionnement est national. Les conventions nationales prévoient la prise en charge rétroactive des dossiers éligibles déposés à compter du 1er janvier 2021.

Le dispositif est mis en place par conventions entre le Ministère du Travail, de l’Emploi et de l’Insertion et les OPCO.

Ces conventions nationales poursuivent trois objectifs :

  • Le financement et la mise en œuvre d’actions ayant pour objectif d’accompagner les entreprises dans la sécurisation des parcours professionnels de leurs salariés (accompagnement des parcours de reconversion, adaptation permanente et développement des compétences, en intégrant les impacts de la crise Covid-19 ou ceux liés aux transitions numériques et écologiques).
  • L’anticipation et l’accompagnement des mutations organisationnelles ou économiques pour contribuer à la relance et la transformation de l’économie post covid-19.
  • La simplification administrative au profit des entreprises, par l’accès à l’offre de services des OPCO, comprenant leur ingénierie, et la prise en charge de parcours de formation types répondant aux besoins en compétences des entreprises des branches concernées.

Les conventions nationales prennent en charge les actions éligibles ayant été réalisées ou ayant fait l’objet d’un accord de prise en charge en 2020 et n’ayant pu être couvertes dans le cadre des conventions régionales FNE Formation avec l’opérateur de compétences, selon les conditions prévues au moment du dépôt complet du dossier auprès de l’opérateur de compétences.

Les Di(r)eccte interviennent en promotion du dispositif, assurent le suivi des données qualitatives et quantitatives du FNE-Formation et contrôlent sa mise en œuvre. Elles informent et orientent les entreprises concernées vers l’offre de services des OPCO. Elles sont également les interlocutrices des entreprises négociant des accords relatifs à l’activité partielle de longue durée et promeuvent, dans ce cadre, des parcours de formations structurés répondant aux objectifs ci-dessus, en lien avec les OPCO.

Prise en charge

Le FNE-Formation prend en charge des coûts pédagogiques ainsi que certains frais annexes (restauration par exemple).

Pour les demandes déposées entre le 1er novembre et le 31 décembre 2020, le FNE-Formation ne permettait plus une prise en charge intégrale des coûts pédagogiques des formations suivies par les salariés placés en activité partielle :

  • Dans le cadre de l’activité partielle de droit commun, le taux de prise en charge était de 70% des coûts pédagogiques.
  • Dans le cadre de l’APLD, le taux de prise en charge était de 80% avec un plafond moyen de 6000 euros par salarié et par an.

Depuis le 1er janvier 2021, la prise en charge « FNE-Formation » dépend de la taille de l’entreprise et de sa situation : activité partielle, APLD ou « en difficulté économique ».

Prise en charge des coûts pédagogiques par le FNE formation depuis le 1er janvier 2021 :

Taille de l’entreprise

Activité partielle

Activité partielle de longue durée

Entreprises en difficulté (covid) – article L. 1233-3 du CT

Moins de 300 salariés

100%

100%

100% *

De 300 à 1000 salariés

70%

80%

70%

Plus de 1000 salariés

70%

80%

40%

*Possibilité de prendre en charge la rémunération des stagiaires pour les entreprises de moins de 50 salariés par le Plan de Développement des compétences de moins de 50 salariés = seule exception à l’interdiction de cofinancement public.

Pour les entreprises en activité partielle, l’ensemble des coûts pour la mise en place d’une formation sont pris en compte dans l’assiette des coûts éligibles, à l’exception de la rémunération déjà soutenue par l’activité partielle, selon les règles qui lui sont propres.

Pour les entreprises en difficulté, les OPCO peuvent mobiliser leurs ressources au titre du plan de développement des compétences pour les entreprises de moins de 50 salariés afin de prendre en charge tout ou partie de la rémunération des stagiaires. Tout autre cofinancement public est exclu.

En formation interne, les coûts éligibles correspondent aux salaires du formateur.

S'agissant des coûts horaires, toute demande est examinée dans les conditions prévues à l'article R. 6316-4 du code de travail qui dispose que « les organismes financeurs mentionnés à l'article L. 6316-1 [Etat et OPCO notamment] veillent à l'adéquation financière des prestations achetées aux besoins de formation, à l'ingénierie pédagogique déployée par le prestataire, à l'innovation des moyens mobilisés et aux tarifs pratiqués dans des conditions d'exploitation comparables pour des prestations analogues ».

Une partie des frais annexes peut être prise en charge de manière forfaitaire à la demande de l’entreprise. La prise en charge des frais annexes comme les coûts d'hébergement, de restauration et de transport s’effectue exclusivement de manière forfaitaire. L’OPCO versera à l’entreprise en ayant fait la demande, un forfait de 2,00€ HT (2,40€ TTC) pour chaque heure de formation en présentiel attestée par un certificat de réalisation sans autre forme de justification.

Le contrôle de service fait s’effectue par l’OPCO sur la base de la facture de l’organisme de formation ou du « relevé de dépenses » pour la formation interne (cf. art. 1er – 2° de l’arrêté du 21 décembre 2018 relatif aux pièces nécessaires au contrôle de service fait, mentionné à l’article R. 6332-26 du code du travail) et du certificat de réalisation établi par le dispensateur de l’action.

Enfin, selon l’instruction du 27 janvier 2021, les entreprises peuvent bénéficier d’une aide maximale de 800 000 euros HT maximum au titre de ce régime (le plafond étant de 100 000 euros HT pour les entreprises de l’agriculture et de 120 000 euros HT pour le secteur de la pêche). Une attestation sur l’honneur sera demandée aux entreprises pour s’assurer que ce plafond n’est pas dépassé.

Engagement de l’employeur 

S’agissant des entreprises en activité partielle ou en APLD, l’employeur s’engage à maintenir le salarié dans l’emploi dans les conditions prévues par les textes en vigueur et pendant toute la durée de la formation lorsqu’elle excède la période d’activité partielle ou d’APLD. S’agissant des entreprises en difficulté, l’employeur s’engage à maintenir le salarié dans l’emploi pendant toute la durée de la formation.

Muriel Besnard

Consultant Juridique


[1] DGEFP : Direction Général de l’Emploi et de la Formation Professionnelle

[2] Instruction du 9 novembre 2020 relative à la mise en place du FNE-Formation dans le cadre de l’activité partielle et de l’activité partielle longue durée

[3] FNE : Fonds National de l’Emploi

[4] https://www.centre-inffo.fr/content/uploads/2020/11/instruction-dgefp-27-janv-2021-fne-formation.pdf

[5] https://travail-emploi.gouv.fr/IMG/pdf/qr-covid-fne-formation.pdf

[6] Règlement général d’exemption par catégorie (UE) N 651/2014 du 17 juin 2014

[7] Les objectifs correspondent aux 2ème et 3ème alinéa de l’article L. 6321-1 du Code du travail

[8] Article R. 5111-3 du Code du travail