Dans le cadre de la loi « avenir professionnel » (Loi n° 2018-771 du 5 septembre 2018, JO du 6) plusieurs dispositions « légales » sur l’assurance chômage ont été prises :

  • principe d’un bonus-malus sur le taux de la contribution patronale chômage ;
  • instauration d’un droit aux allocations chômage après une démission (sous conditions) ;
  • instauration d’un droit aux allocations chômage pour les travailleurs indépendants.
  • Suite à l’échec de la négociation nationale interprofessionnelle chargée d’entériner ces mesures et aussi d’autres mesures en vue de réduire l’endettement de l’Unedic, le gouvernement a repris la main et a publié au JO du 28 juillet deux décrets :
  • le décret n° 2019-796 du 26 juillet 2019 relatif aux nouveaux droits à indemnisation, à diverses mesures relatives aux travailleurs privés d’emploi et à l’expérimentation d’un journal de la recherche d’emploi
  • le décret n° 2019-797 du 26 juillet 2019 relatif au régime d’assurance chômage

Dans cet article nous nous intéresserons uniquement au décret n° 2019-797 qui porte sur « le régime d’assurance chômage »  avec en annexe le règlement d’assurance chômage mis à jour.

Et nous verrons plus particulièrement les évolutions suivantes :

  • L’attribution de l’allocation d’aide au retour à l’emploi
  • Le calcul de l’allocation d’aide au retour à l’emploi
  • La création d’un bonus – malus
  • La majoration de la cotisation patronale pour les CDD d’usage

L’attribution de l’allocation d’aide au retour à l’emploi (allocation chômage)

Pour pouvoir bénéficier d’allocations chômage les salariés privés d’emploi doivent justifier d’une durée d’affiliation correspondant à des périodes d’emploi accomplies dans une ou plusieurs entreprises entrant dans le champ d’application du régime d’assurance chômage. 

Le décret augmente la durée de ces périodes d’emploi nécessaires pour pouvoir bénéficier d’allocations chômages.

Périodes d’emploi = durée d’affiliation è droit (ou non) à recevoir des allocations chômage.

Règlement d’assurance chômage 2017

   Règlement d’assurance chômage 2019
 
   (modifié par décret n° 2019- 797 du 26 juillet 2019)

Durée d’affiliation pour pouvoir bénéficier  de l’allocation :

- 88 jours ou 610 heures travaillées

  • Au cours des 28 mois qui précèdent la fin du contrat de travail (terme du préavis) pour les salariés âgés de moins de 53 ans à la fin de leur contrat de travail.
  • Au cours des 36 mois  qui précèdent la fin du contrat de travail (terme du préavis) pour les salariés âgés de  53 ans et plus à la fin de leur contrat de travail.

Durée d’affiliation pour pouvoir bénéficier de l’allocation

- 130 jours ou 910 heures travaillées

  • Au cours des 24 mois qui précèdent la fin du contrat de travail (terme du préavis) pour les salariés âgés de moins de 53 ans à la fin de leur contrat de travail.
  • Au cours des 36 mois  qui précèdent la fin du contrat de travail (terme du préavis) pour les salariés âgés de  53 ans et plus à la fin de leur contrat de travail.

Date d’entrée en vigueur : fins de contrat intervenues à compter du 1er novembre 2019.
 
En cas de procédure de licenciement engagée avant le 1er novembre 2019 c’est la date de l’entretien préalable qui est prise en compte ou en cas de PSE la date de présentation de la lettre de convocation à la 1ère réunion des instances représentatives du personnel.

Le calcul de l’allocation d’aide au retour à l’emploi

Pour mémoire, le calcul de l’allocation se fait en trois étapes :

1. Détermination du salaire de référence à partir des déclarations des employeurs.
2. Calcul du salaire  journalier moyen de référence (SJMR).
3. Calcul de l’allocation journalière. 

  1. Détermination du salaire de référence à partir des déclarations des employeurs

Traditionnellement le salaire de référence était établi « à partir des rémunérations des 12 mois civils précédant le dernier jour de travail payé à l’intéressé » (article 11 du règlement de 2017).

A compter du 1er  avril 2020 le salaire de référence sera établi  à partir des rémunérations correspondant aux périodes prises en compte pour l’ouverture des droits aux allocations, à savoir :

  • 24 mois qui précèdent la fin du contrat pour les salariés âgés de moins 53 ans à la date de la fin de leur contrat de travail ;
  • 36 mois qui précèdent la fin du contrat pour les salariés âgés de 53 ans et plus  à la date de la fin de leur contrat de travail.

En pratique la modification de la période de référence prise en compte pour déterminer le salaire de référence aura un impact important sur la production de l’attestation pôle emploi. Elle signifie que potentiellement il faudrait renseigner les rémunérations des 24 ou 36 derniers mois (et non plus des 12 derniers mois)

L’article 12 du règlement, revu par le décret du 26 juillet, précise que les rémunérations dont le paiement est subordonné à l’accomplissement d’une tâche particulière ou à la présence du salarié à une date déterminée perçues pendant la période de référence sont prises en compte dans le salaire de référence  qu’ils soient ou non afférents à cette période.

Pour mémoire dans l’ancienne rédaction de l’article 12,  il était simplement précisé que ces rémunérations étaient considérées  « comme des avantages donc la périodicité est annuelle ».

Sans changement :
 

  • les rémunérations prises en compte sont celles qui entrent dans l’assiette de la contribution patronale « pôle emploi ». 
  • les rémunérations prises en compte sont plafonnées à 4 PASS.
  • les rémunérations perçues en dehors de la période de référence mais afférentes à cette période sont prises en compte.
  • sont exclues :
    • les rémunérations perçues pendant la période mais qui n’y sont pas afférentes.
    • les indemnités de rupture : IDL, indemnité de départ, de rupture conventionnelle, ICCP, de préavis ou de non concurrence, de manière générale toute somme dont l’attribution trouve sa seule origine dans la rupture du contrat.
    • les rémunérations correspondant aux heures de travail effectuées au-delà de 48 heures
    • toutes sommes qui ne trouvent pas leur contrepartie dans l’exécution normale du contrat de travail.
    • les rémunérations versées pendant des périodes de maladie, de maternité, de paternité ou d’adoption

Date d’entrée en vigueur : fins de contrat intervenues à compter du 1er  avril 2020 (sauf procédure de licenciement engagée avant cette date)

  1. Détermination du salaire de référence à partir des déclarations des employeurs

Règlement d’assurance chômage 2017

   Règlement d’assurance chômage 2019
  (modifié par décret n° 2019- 797 du 26 juillet 2019)

 Salaire de référence / nombre de jours travaillés x 1,4

Salaire de référence / nombre de jours calendaires

Pour déterminer le nombre de jours calendaires il faut déduire du nombre de jours total de la période « les jours calendaires correspondant aux périodes pour lesquelles les rémunérations ne sont pas prises en compte dans le salaire de référence » (maladie, maternité, paternité, activité réduite….).

Date d’entrée en vigueur : fins de contrat intervenues à compter du 1er  avril 2020 (sauf procédure de licenciement engagée avant cette date)

  1. Calcul de l’allocation journalière (AJ)

Sans changement:

AJ = SMJR x 40, 4% + 12 €*
Si AJ < 57% x SMJR è AJ = 57% x SMJR

AJ ne peut être inférieur à 29,26 €*.

AJ réduite proportionnellement en cas de temps partiel (horaire à temps partiel / horaire légal (où horaire de la convention collective si celui-ci est différent)

AJ est limité à 75% du SJMR.

* ces valeurs ont été revalorisées au 1er juillet 2019

La création d’un bonus-malus

Pour certaines entreprises (voir le champ d’application du dispositif) le taux de la contribution patronale (4,05%) pourra être soit diminué (bonus), soit augmenté (malus) en fonction du nombre de fin de contrat avec  inscription sur la liste des demandeurs d’emploi.

Ce nouveau dispositif a été introduit dans le code du travail par la loi « avenir professionnel »  (Loi n° 2018-771 du 5 septembre 2018, JO 6 qui a modifié l’article L. 5422-12 du code du travail)

Ce taux modulé est mis en place par les articles 50-2 à 51 du règlement d’assurance chômage annexé au décret n° 2019-797 du 26 juillet 2019.

1.Date de mise en œuvre du dispositif

La date de mise en œuvre est fixée au 1er janvier 2021.
En pratique, compte tenu de la date de prise en compte du taux modulé ce sera le 1er mars 2021.
 

2.Champ d’application

Employeurs de plus de 11 salariés des secteurs d’activité dont le taux de séparation est supérieur à un seuil fixé par arrêté du ministre chargé de l’emploi.

Ce seuil est déterminé tous les 3 ans.

L’effectif pris en compte (11 salariés et pour le calcul du taux de séparation) est l’effectif défini à l’article L. 130-1 du code de la SS.

Pour mémoire lors de la présentation du dispositif par le gouvernement, 7 secteurs (avec un taux de séparation supérieur à 150%) avaient été cités :

- fabrication de denrées alimentaires, de boissons et de produits à base de tabac ;
- autres activités spécialisées, scientifiques et techniques ;
- hébergement et restauration ;
- production et distribution d’eau-assainissement, gestion des déchets et dépollution ;
- transports et entreposage ;
- fabrication de produits en caoutchouc et en plastique, et d’autres produits non métalliques ;
- travail du bois, industrie du papier et imprimerie.

3.Mécanisme

La minoration ou la majoration du taux de la contribution patronale est déterminée par employeur (en pratique il sera informé par l’administration) en fonction de la comparaison entre :

Le taux de séparation de l’entreprise et le taux de séparation calculé dans le secteur d’activité de l’entreprise.

4.Détermination du taux de séparation de l’entreprise

Ce taux est déterminé par le rapport entre :

Le nombre d’inscription sur la liste des demandeurs d’emploi suite à une fin de contrat de travail ou une fin de contrat de mise à disposition + le nombre de fins de contrat de travail et de mise à disposition se produisant lorsque le salarié est déjà inscrit sur la liste des demandeurs d’emploi

Et :

L’effectif moyen de l’entreprise calculé selon le nouvel article L. 130-1 du code de la sécurité sociale.

Toutes les fins de contrats sont prises en compte sauf :

  • Les démissions ;
  • Les fins de contrat d’apprentissage ;
  • Les fins de contrat de professionnalisation ;
  • Les fins de CDD et fins de mission de  « certaines personnes sans emploi »

   (Contrat d’insertion, contrats conclus avec les séniors, contrats conclus dans le cadre d’un congé de mobilité, contrats conclus
    au titre du tutorat en entreprise)

  • Les fin de CDD « complément de formation professionnelle »

   (Stage en vue d’accéder à un établissement d’enseignement, stage d’application, étrangers venant en France en vue d’acquérir un
   complément de formation professionnelle, bénéficiaires d’une aide financière à la formation par la recherche, salariés liés par un
   contrat de rééducation professionnelle)

  • Les fins de CUI

Le calcul se fait sur la moyenne des trois dernières années civiles.

Exemple : Taux de séparation pour l’année 2023 =
[taux de séparation de 2020 + taux de séparation de 2021 + taux de séparation de 2022] / 3.

5.Détermination du taux de séparation du secteur

Ce taux sera déterminé chaque année par arrêté du ministre chargé de l’emploi.

6.Calcul de la contribution modulée

Taux modulé = Ratio de l’entreprise x 1,46 + 2,59

Ratio de l’entreprise = taux de séparation de l’entreprise / taux de séparation médian du secteur.

Le taux modulé sera  déterminé dans la limite d’un plafond et d’un plancher.

  • le plafond :  5,05%
  • le plancher : 3,0%.

Exemple n°1  Malus :

L’entreprise a un taux de séparation de 1,8.
Le taux de séparation médian du secteur est de 1,5
Taux de l’entreprise modulé par une majoration (malus) = (1,8 / 1,5)  x 1,46 + 2,59 =  4,34 % (au lieu de 4,05%)

Exemple n° 2  Bonus :

L’entreprise a un taux de séparation de 1,2.
Le taux de séparation médian du secteur est de 1,6
Taux de l’entreprise modulé par une minoration (bonus) = (1,2 / 1,6)  x 1,46 + 2,59 =  3,69 % (au lieu de 4,05%)

Pour le calcul de la réduction générale, faudra-t-il tenir compte de ce taux modulé ?
è Des précisions de l’administration sont nécessaires

Le taux minoré ou majoré est applicable aux rémunérations dues au titre des périodes d’emploi courant du 1er mars d’une année civile au 28 février ou au 29 février de l’année civile suivante (è première application du taux modulé : 1er mars 2021).

La contribution patronale modulée s’appliquera à l’ensemble de la masse salariale sauf aux  rémunérations versées aux salariés sous :

  • Contrats d’apprentissage ;
  • Contrats de professionnalisation ;
  • CDD de « certaines personnes sans emploi » ;
  • Contrat de mission de « certaine personnes sans emploi » ;
  • CDD « complément de formation professionnelle » ;
  • CUI.

Pour ces salariés il faudra appliquer le taux non modulé de 4,05%.

Le taux de séparation et le taux modulé seront communiqués par l’administration aux entreprises dans des conditions qui seront fixées par décret. Tant que cette notification n’aura pas été effectuée, l’employeur devra

verser les contributions sur la base du taux antérieurement applicable.

Majoration de la cotisation patronale pour les contrats à durée déterminée d’usage

La taxe de 10 € sur chaque CDD d’usage annoncée par le gouvernement lors de la conférence de presse du 18 juin 2019 ne figure pas dans ces deux décrets. La mesure devrait être reprise dans la prochaine loi de finances.

Pour les intermittents du spectacle (annexe VIII et X du règlement) et pour les ouvriers dockers (annexe III du règlement)  il est prévu d’augmenter de 0,50% la cotisation patronale pour les CDD d’usage dont la durée est ≤ à 3 mois.

Pour les intermittents du spectacle en CDD d’usage ≤ à 3 mois  la cotisation patronale passerait de 9,05 %  à  9,55 % (4,55 + 5). Et pour les dockers en CDD d’usage ≤ à 3 mois  de 4,05% à 4,55%.

Date d’entrée en vigueur : 1er  janvier 2020

Eric DALLE

Juriste expert Social