Novembre 2023

Entré en vigueur depuis le 1er janvier 2019[1], le prélèvement à la source (PAS) s’est imposé dans le paysage de la paie et pour les contribuables. Les employeurs ont à leur charge des obligations quant à la déclaration et au reversement du montant de l’impôt dû par le salarié à l’administration fiscale.

Vraie révolution dans le rapport du contribuable à l’impôt dû, le prélèvement à la source nécessite une intervention notable de l’employeur, collecteur et verseur de l’impôt auprès de l’administration fiscale. Il s’agit d’une contemporanéisation du recouvrement de l’impôt sur le revenu. Les formalités à la charge du contribuable n’ont pas été allégées : ils restent tenus de déclarer leurs revenus de l’année N l’année suivante (N+1) sur leur déclaration de revenus préremplie.

L’administration fiscale détermine le montant final de l’impôt dû au regard du revenu fiscal global de chaque contribuable, selon les règles habituelles (quotient familial, etc.). En fonction du montant final déterminé et des montants de PAS versés tout au long de l’année, le contribuable devra verser un complément d’impôt ou se fera rembourser le surplus payé à tort à l’été N+1.

Si la mécanique de calcul définitive de l’impôt du contribuable n’a pas évolué, l’employeur joue un rôle central dans la déclaration et le paiement de celui-ci. Pour les salariés, l’employeur a l’obligation d’effectuer cette déclaration et ce paiement via la DSN[2]. Le Code général des impôts prévoit d’ailleurs des sanctions à l’encontre de l’employeur en cas de défaillance[3].

Revenons sur ces sanctions, pour lesquelles la période de tempérament s’est achevée en décembre 2022[4].

Obligations de l’employeur à l’égard de la DGFiP

Si l’on cherche à résumer les obligations de l’employeur à l’égard de l’administration fiscale, on peut distinguer trois grands points :

  • Appliquer le taux de prélèvement à la source transmis par la DGFiP, dès lors que celui-ci est en cours de validité ou, en l’absence de taux personnalisé valide, appliquer le taux barème par défaut[5];
  • Retenir le prélèvement à la source en paie[6];
  • Déclarer le montant du prélèvement à la source via la DSN et le reverser à la DGFiP[7].

En cas de défaillance de l’employeur, le code général des impôts retient des sanctions administratives voire pénales, en fonction des défaillances constatées dans les obligations de l’employeur.

Avant d’entrer dans le détail des sanctions applicables, il convient de rappeler qu’il est possible qu’un employeur commette une erreur dans le calcul du prélèvement à la source, soit parce qu’il a retenu un taux erroné, soit parce qu’il a mal qualifié juridiquement une somme (imposable alors qu’en réalité non imposable ou vice versa), etc. Les erreurs doivent bien évidemment faire l’objet d’une correction/régularisation en paie et déclarées en DSN ; leur prise en compte dans la déclaration préremplie de revenues dépendra de la nature de la l’erreur et/ou de la période de correction [8]:

  • Les erreurs d’assiette ou de taux de prélèvement à la source d’une année N peuvent être corrigées jusqu’au mois principal déclaré de janvier N+1 (transmis au 5 ou 15 février N+1)[9]. Si la régularisation est portée jusqu’à cette date, elle sera alors intégrée dans la déclaration préremplie de revenus du contribuable. Au-delà, il appartiendra au contribuable de modifier sa déclaration pour en tenir compte.
  • Les indus ou trop-versés ayant abouti à un excèdent de prélèvement à la source, pour lesquels il faut vérifier si la compensation est possible ou non sur le mois courant[10]. En fonction des situations, et notamment si le salarié ne rembourse à son employeur que la somme qu’il a effectivement perçue à tort (net payé), l’employeur devra aussi déposer une réclamation auprès du service des impôts des entreprises pour potentiellement récupérer le montant de prélèvement à la source versé à tort.

Dans tous les cas, les fiches DSN-info indiquent que la régularisation doit être portée en DSN, peu important qu’elle soit ou non prise en compte dans la déclaration préremplie du contribuable. Autrement dit, l’employeur informe l’administration fiscale de l’erreur commise. Ainsi, à titre d’exemple, une régularisation sur une rémunération nette fiscale de septembre de l’année N corrigée en mars N+1 doit bien être déclarée en DSN, quand bien même l’administration fiscale ne l’utilisera pas pour préremplir la déclaration d’impôt du contribuable.

Sanctions administratives

Infraction à l’obligation d’effectuer la retenue à la source

En cas d’inexactitudes ou d’omissions dans la déclaration, dès lors qu’elle a été déposée dans les délais, le montant de l’amende s’élève à 5% des retenues qui auraient dû être effectuées ou déclarées[11].

Cette amende est portée à 40% des retenues en cas d’inexactitudes ou d’omissions délibérées. Il faut néanmoins que l’administration fiscale établisse le caractère délibéré de l’infraction[12].

L’amende est d’un montant minimal égal à 250€ par déclaration.

Infraction aux obligations déclaratives

Si le déclarant ne dépose pas sa déclaration dans les délais, et que celle-ci contient aussi des inexactitudes ou omissions, l’amende s’élève à 10% des retenues qui auraient dû être effectuées ou déclarées[13].

L’amende est portée à 40% des retenues qui auraient dû être effectuées ou déclarées s’il ne dépose pas sa déclaration dans les 30 jours suivants une mise en demeure.

Si la retenue a été effectuée mais délibérément non déclarée et non versée à l’administration fiscale, l’amende s’élève à 80% des retenues effectuées. L’administration fiscale doit établir le caractère délibéré de l’infraction[14].

L’amende est d’un montant minimal égal à 250€ par déclaration.

Majoration pour retard de versement

Lorsque l’entreprise est en retard pour verser le prélèvement à la source qu’elle a précompté[15], les sommes versées tardivement sont majorées de 5% avec potentiellement des intérêts de retard équivalents à 0,2% par mois de retard[16].

Majoration pour non-respect de l’interdiction de payer par prélèvement

Le Code général des impôts prévoit que l’employeur reverse les sommes collectées au titre du PAS à l’administration fiscale par voie électronique, par prélèvement SEPA[17].

Si l’employeur ne respecte pas cette obligation et règle le montant des sommes dues par un autre mode de paiement que le la prélèvement SEPA, il est redevable d’une majoration du montant des sommes ainsi payées égale à 0,2%, avec un montant minimal de 60€[18].

Cumul d’amendes ?

Il convient de noter que les amendes administratives prévues par l’article 1759-0 A du CGI sont exclusives les unes des autres. Autrement dit, elles ne se cumulent pas.

Le BOFiP[19] indique ainsi que l’amende de 10% ne s’applique que lorsque le collecteur n’a déposé aucune DSN ou l’a déposée tardivement.

De la même manière, si un employeur dépose seulement une partie de sa déclaration dans les délais, il s’agira de la sanction de 5% pour la fraction déposée en dehors des délais qui sera appliquée (et non celle de 10% pour non-dépôt de la déclaration).

Enfin, en cas d’omission ou d’inexactitude sur une déclaration déposée hors délai, seule l’amende de 10% s’appliquera à l’ensemble des retenues non déclarées dans les délais.

Sanctions pénales

L’administration fiscale dissocie le retard de versement des sommes liées au prélèvement à la source, donnant lieu aux sanctions administratives évoquées supra, de l’abstention délibérée de déclarer et de verser le prélèvement à la source au comptable public.

Dans le cas d’une abstention délibérée, l’employeur s’expose à des sanctions pénales[20] :

  • Une contravention de 5ème classe, passible d’une amende de 1 500€ (porté à 7 500€ pour une personne morale) si le retard excède un mois,
  • En cas de récidive dans un délai de trois ans, il s’agit d’un délit sanctionné par deux ans d’emprisonnement et 3 750€ d’amende ou l’une de ces deux peines seulement.

Elodie Chailloux

Responsable Veille légale et DSN

[1] Loi n°2016-1917 du 29 décembre 2016, art 60, I, G modifié ; Ord. n°2017-1390 du 22 septembre 2017, JO du 23 ; CGI, art 204 A et suivants

[2] CGI, art 87-0 A ; CGI, ann. III, art 39 C et art 39 D.

[3] CGI, art 1759-0 A et 1671

[4] BOFiP-IR-PAS-10-30-60-§60-08/06/2022

[5] CGI, ann. III, art 46 F ; BOFiP-IR-PAS-20-20-30-20-16/05/2022

[6] CGI, art 1671 ; BOFiP-IR-PAS-30-10-10-§§20 et suivants-25/10/2018

[7] CGI, art 87-0 A et ann. III, art 39 C ; BOFiP-IR-PAS-30-10-30-10 -27/02/2019

[8] CGI, ann. II, art 95 ZO, I ; BOFiP-IR-PAS-30-10-50-27/02/2019

[9] BOFiP-IR-PAS-30-10-50-§§30 et 40-27/02/2019 ; Voir à ce titre fiches DSN-info n°1814 (https://net-entreprises.custhelp.com/app/answers/detail_dsn/a_id/1814/) et n°1821 (https://net-entreprises.custhelp.com/app/answers/detail_dsn/a_id/1821/)

[10] Voir à ce titre fiche DSN-info n°1815 : https://net-entreprises.custhelp.com/app/answers/detail_dsn/a_id/1815/ ; BOFiP-IR-PAS-30-10-50

[11] CGI, art 1759-0 A

[12] Le caractère délibéré de l’infraction est détaillé dans le BOFiP au BOI-CF-INF-10-20-20, §§30 à 50.

[13] CGI, art 1759-0 A

[14] Le caractère délibéré de l’infraction est détaillé dans le BOFiP au BOI-CF-INF-10-20-20, §§30 à 50.

[15] CGI, art 1731

[16] CGI, art 1727, III

[17] CGI, art 1671, 1, 2 et 4.; Fiche DSN-info n°1366 https://net-entreprises.custhelp.com/app/answers/detail/a_id/1366/

[18] CGI, art 1738, 3°

[19] BOFiP-IR-PAS-30-10-60-§50-08/06/2022

[20] CGI, art 1771 A et C. Pénal, art 131-13 et 131-41