Cela fait plusieurs fois – et je l’ai vécu aussi personnellement – que de hauts stratèges d’entreprises viennent nous expliquer qu’il faut changer tel ou tel dirigeant, non pas parce qu’il a failli mais... parce que c’est bien de changer ! Inutile de dire que je ne suis guère convaincu !

Cela fait plusieurs fois que mon esprit – sans doute obtus – se retrouve dans le même refus de cette théorie toujours maladroitement mise en pratique. Ô elle doit avoir ses défenseurs, j’en suis sûr, et non des moindres, avec de solides justifications pseudo-rationnelles...

Oui ! Mais voilà : vous connaissez nom esprit pragmatique. Depuis des années je suis catalogué « siège », comme si je ne savais pas écouter réellement, être là au bon moment sur le terrain plutôt que réfugié derrière des processus ! Comme si je ne comprenais pas et ne savait pas ce que le corps social de l’entreprise veut ou ne veut pas.

Défend-on cette théorie au nom d’un inepte et partiel “benchmark” ? Il y a tant de paramètres en cause ! A-t-on constaté un essoufflement du dirigeant ? A-t-on écouté ses souhaits ? A-t-on réalisé un 360 degrés au niveau de l’entreprise pour connaitre l’attachement du corps social, d’une équipe à son ou ses leaders ? S’est-on un tant soit peu imprégné de la culture de l’entreprise ? J’en passe et des meilleures.

Peut-être a-t-on reproduit mécaniquement une expérience réussie dans une toute autre entreprise et une autre équipe, sans se préoccuper de tout cela. Si c’est cette seconde hypothèse, cela viendrait sans doute expliquer pourquoi je n’ai rien vu de l’extraordinaire changement annoncé, en s’étant privé de son ou ses collaborateurs concernés.

Par ailleurs, je suis préoccupé par un autre point. S’est on mis deux minutes à la place des personnes “remerciées” (Sic !), auxquelles on n’a pas grand-chose – voire même rien – à reprocher ? Elle se sont entendu dire que tout va pour le mieux, mais qu’il est préférable de partir – et vite ! – pour aider l’entreprise à aborder de nouveaux défis... Mais les a-t-on proposés loyalement, ces nouveaux défis, à ceux qui étaient en place ? Si c’est le cas, parfait ; dans la mesure où la violence de l’annonce a été accompagnée. Si ce n’est pas le cas, je me pose des questions quant à l’exemplarité pourtant si nécessaire de ces hauts décideurs qui prônent, via chartes et accords, des comportements dignes et respectueux vis à vis des collaborateurs. Aucune utilité de développer ce genre d’identité, si le haut de l’échelle ne se l’applique pas lui-même.

On me rétorque habituellement que ces dirigeants dont on décide brusquement de se passer sont bien payés, et qu’ils doivent être habitués à ce type de risque, étant entendu que financièrement ils s’y retrouvent.

Trois choses à dire à cela :

1) Je me suis engagé dans l’entreprise pour son intérêt, et si je ne suis pas convaincu par le bien-fondé de telle ou telle décision, quel que soit sa portée, je me manifeste.

2) Je me suis engagé pour tous les salariés, les plus payés comme les moins payés, et j’estime que chacun doit bénéficier d’un traitement humain, simplement.

3) Qu’il existe encore de telles pratiques et que cela se passe dans des cabinets ouatés et feutrés me révulse ; outre le fait qu’il y a les intéressés – sur lesquels personne n’a le droit de vie ou de mort –, il y a des dizaines, des centaines, des milliers de salariés pour lesquels je me bats quotidiennement. Et l’argent ne rachète tout !

On ne fait pas « joujou » avec des destins humains.

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