La recherche de reclassement dans un groupe impose-t-elle de communiquer le profil complet des salariés concernés aux filiales ?

La société VFD, exerçant une activité de transport interurbain de voyageurs et appartenant à un groupe, a décidé de procéder à une restructuration pour motif économique.

Des salariés ont été licenciés pour motif économique le 12 décembre 2013 dans le cadre d’un licenciement économique collectif avec mise en place d’un plan de sauvegarde de l’emploi.

La Cour d’appel a jugé que les licenciements de Mmes U..., T... et de M. S... étaient dépourvus de cause réelle et sérieuse en raison notamment d’un manquement de l’employeur à son obligation de reclassement et l’a condamné à payer à chacun des dommages-intérêts à ce titre.

L’employeur considère néanmoins que l’obligation de reclasser les salariés dont le licenciement pour motif économique est envisagé lui incombe seulement et non aux autres sociétés du groupe auquel il appartient.

En conséquence, si l’employeur doit rechercher des possibilités de reclassement dans les entreprises du groupe dont l’activité, l’organisation ou le lieu d’implantation permettent la permutation de tout ou partie du personnel, il ne saurait reporter sur ces entreprises la charge d’examiner l’adaptation des postes disponibles en leur sein à la situation de chaque salarié.

L’employeur considère qu’il n’est donc pas tenu, lorsqu’il interroge les entreprises du groupe sur les possibilités de reclassement existant en leur sein, de leur fournir des indications précises sur les qualifications, expériences et ancienneté de chaque salarié.

En l’espèce, la société VFD justifiait avoir demandé à ses trois filiales, par lettres du 18 juin 2013, de lui communiquer « toutes les possibilités de reclassement, accompagnées d’un descriptif de poste détaillé (emploi et qualification, nature du contrat, date à laquelle ce poste doit être pourvu, lieu de travail, durée du travail, rémunération, etc.) et ce quelle que soit la localisation géographique des postes » en leur fournissant la liste des emplois dont elle envisageait la suppression.

La cour d’appel avait jugé que cette démarche était insuffisante pour permettre à la société VFD de se libérer de son obligation de reclassement puisque les courriers ne comportaient aucune indication concrète relative aux salariés occupant les postes supprimés notamment quant à leur âge, formation, expérience, qualification, ancienneté.

Pour la société, une telle motivation tendait, en réalité, à reporter sur les autres sociétés du groupe la charge d’effectuer les recherches de reclassement et devait être censurée.

Elle a été suivie par la Cour de cassation qui vient de rappeler que l’employeur est effectivement tenu avant tout licenciement économique de rechercher toutes les possibilités de reclassement existant dans le groupe dont il relève, parmi les entreprises dont l’activité, l’organisation ou le lieu d’exploitation permettent d’effectuer la permutation de tout ou partie du personnel et que les recherches de postes disponibles dans les sociétés du groupe auquel appartient l’employeur qui envisage un licenciement économique collectif n’ont pas à être assorties du profil personnalisé des salariés concernés par le reclassement dès lors que les lettres de demande de recherche de postes de reclassement étaient suffisamment précises, ce qui était le cas en l’espèce.

Autrement dit l’employeur n’est pas tenu d’assortir sa demande de postes disponibles du profil personnalisé des salariés et peut se contenter de mentionner l’intitulé et la classification des postes dont y il envisage la suppression auprès de ses filiales.
__________________________________________________________________________________

Cour de cassation

Chambre sociale

Audience publique du 17 mars 2021

N° de pourvoi: 19-11.114

Tags: Reclassement Profil salarié Groupe Filiales