Le DRH, le socioculturel et les soft skills
« Les étudiants du Pôle Universitaire Léonard de Vinci provenaient en partie des Hauts de Seine soit du quatre-vingt-douze soit du neuf deux ». L’auteur.
J’ai souvent prononcé cette phrase pour répondre à la curiosité des personnes voulant découvrir ce que Charles Pasqua, en sa qualité de président du conseil général des Hauts-de-Seine, avait fondé en 1995, le Pôle universitaire Léonard de Vinci à La Défense. Il avait comme objectif la création d’un établissement d’enseignement supérieur en rupture avec les habitudes universitaires. Il voulait créer une ouverture sociale, pluridisciplinarité directement en relation avec le monde de l’entreprise.
C’est ainsi que, sans diplôme, avec comme bagage mes 20 ans de pratiques professionnelles et mes 15 années de consulting, je me suis retrouvé face au choc socioculturel des étudiants provenant de Neuilly et de Nanterre. Cela a généré chez moi le goût de vouloir comprendre ce qui se passait dans leur tête. Cette situation a été développée par mes enseignements dans le cycle Ingénierie Négociation Commerciale Interentreprise, INCI, qui rassemblait les étudiants de toutes disciplines : lettres, psychologie, sociales, techniques, managériales…Ce brassage fut complété par la création du cycle Négociation et Management des Affaires dans le cadre de l'École de Management Léonard de Vinci, EMLV.
Ces expériences ont abouti à la soutenance de ma thèse de doctorat, à la création d’une démarche de marketing personnel et à la modélisation des soft skills.
Le socioculturel et les soft skills oui, mais quoi ?
« Il faut prendre conscience de l'apport d'autrui, d'autant plus riche que la différence avec soi-même est plus grande. » Albert Jacquard[1].
Les principaux paramètres des différences socioculturelles sont liés aux valeurs, aux normes, aux croyances et aux modes de vie qui structurent les comportements humains. Ils influencent la manière dont les individus perçoivent le monde, interagissent entre eux et s’intègrent dans la société. Ce que j’ai toujours rencontré et peut s’organiser par thèmes homogènes.
La famille et l’éducation : La famille constitue le premier cadre de socialisation des individus. Elle transmet des valeurs, des traditions et des habitudes qui orientent les comportements et participent à la construction identitaire. L’éducation, quant à elle, joue un rôle complémentaire en formalisant l’acquisition de normes sociales et culturelles. Ces normes ne sont pas universelles : elles varient selon les pays, les cultures et les classes sociales, ce qui explique la diversité des trajectoires éducatives et des représentations sociales.
Les groupes d’appartenance et de référence : Les individus s’inscrivent dans des groupes d’appartenance et de référence tels que les cercles d’amis, les pairs, les communautés religieuses ou professionnelles. Ces groupes exercent une influence déterminante sur les comportements, soit par imitation, soit par rejet. Ils constituent des repères identitaires et contribuent à la régulation sociale en orientant les attitudes et les choix individuels.
Les valeurs et croyances : Elles définissent ce qui est considéré comme juste, moral ou acceptable au sein d’une société. Elles forment un socle de principes qui guident les comportements et les décisions collectives. Toutefois, elles diffèrent selon les cultures, les religions et les contextes historiques, ce qui engendre une pluralité de visions du monde. Cette diversité peut être source de richesse culturelle, mais également de tensions lorsqu’elles entrent en contradiction.
Les normes sociales : Elles se présentent comme des règles implicites ou explicites qui régissent les comportements quotidiens. Elles concernent des domaines variés tels que la politesse, la hiérarchie ou la répartition des rôles entre les sexes. Ces normes, loin d’être universelles, varient fortement d’une société à l’autre et traduisent la manière dont chaque culture organise la vie collective. Elles participent ainsi à la cohésion sociale tout en reflétant les spécificités culturelles.
La langue et la communication : Ce sont les vecteurs essentiels de socialisation, puisqu’elles structurent la pensée et véhiculent les représentations culturelles. Elle permet non seulement la transmission des savoirs, mais aussi l’expression d’une vision du monde propre à chaque communauté. Les styles de communication, qu’ils soient directs ou indirects, formels ou informels, traduisent également des différences culturelles significatives et influencent la manière dont les individus interagissent.
Les pratiques et modes de vie : Sous la forme des pratiques quotidiennes, qu’il s’agisse des habitudes alimentaires, vestimentaires, des loisirs ou de l’organisation du travail, traduisent des identités culturelles distinctes. Elles sont le reflet des valeurs et des traditions propres à chaque société et participent à la différenciation des modes de vie. Ces pratiques constituent des marqueurs identitaires qui permettent de distinguer les groupes sociaux et de comprendre leurs dynamiques internes.
L’identité culturelle et l’ethnicité : Elles façonnent le sentiment d’appartenance des individus et marquent la distinction entre les différents groupes sociaux. Elles jouent un rôle majeur dans la stratification sociale et peuvent être à l’origine d’inégalités. En définissant la place de chacun dans la société, elles influencent les relations entre les groupes et participent à la structuration des hiérarchies sociales.
Le socioculturel et les soft skills oui, mais comment ?
« Tout groupe humain prend sa richesse dans la communication, l'entraide et la solidarité visant à un but commun : l'épanouissement de chacun dans le respect des différences. » Françoise Dolto[2]
De la « vente » à l’obtenance, un vocabulaire qui transcende les différences : Dans le cadre de mes enseignements la pierre d’achoppement était de faire accepter la notion de vente, de négociation avec les fonctions liées. Dans le langage courant, le mot vente est souvent connoté négativement. Peu de personnes souhaitent se définir ainsi, car le terme enferme dans une image stéréotypée qui ne valorise ni la relation humaine, ni la diversité des contextes culturels. Pour transcender les différences un nouveau vocabulaire s’est imposé. Le mot obtenance du verbe obtenir et du suffixe « ance » pour désigner obtenir un accord indépendamment de l’objet de la demande et des circonstances transforme l’acte commercial en une interaction sociale générique.
Les soft skills, clé de voûte des différences socioculturelles : Cette innovation lexicale a une vertu majeure : elle transcende les clivages socioculturels. Là où le mot « vente » pouvait susciter rejet ou méfiance, l’obtenance ouvre un espace de dialogue universel. Elle valorise la compétence relationnelle plutôt que la transaction économique, et permet de dépasser les différences de valeurs, de croyances ou de normes sociales.
Ce raisonnement s’applique sur les différents composants des compétences comportementales, des soft skills, les compétences habiletés sociocognitives. Cette possibilité éclaire la manière dont les différences socioculturelles – valeurs, normes, croyances, modes de vie – structurent nos comportements et nos interactions. Pour transformer ces différences en richesse, il est possible de mobiliser les soft skills, et plus particulièrement par la démarche de l’Education De Soi-Même en 7 Clés. Elle propose des solutions opérationnelles pour chaque situation :
La famille et l’éducation : La Clé 1 : Apprendre à apprendre permet de dépasser les différences éducatives en développant une capacité d’adaptation et d’auto‑formation. La Clé 2 : Posture aide à adopter une attitude respectueuse face aux traditions diverses.
Les groupes d’appartenance et de référence : La Clé 5 : Management favorise la coopération et l’organisation collective, tandis que la Clé 3 : Obtenance développe l’art de convaincre et de négocier entre groupes aux intérêts parfois divergents.
Les valeurs et croyances La Clé 2 : Posture permet de respecter les croyances d’autrui, et la Clé 6 : Art oratoire favorise un dialogue interculturel clair et constructif. Ces soft skills transforment la diversité des visions du monde en opportunité de compréhension mutuelle.
Les normes sociales : La Clé 4 : Stress aide à réguler les tensions générées par ces différences, tandis que la Clé 2 : Posture permet de s’ajuster aux codes locaux et d’éviter les malentendus.
La langue et la communication : La Clé 6 : Art oratoire est ici centrale : elle permet de franchir les barrières linguistiques, d’adapter son discours et de fluidifier les échanges.
Les pratiques et modes de vie : La Clé 1 : Apprendre à apprendre et la Clé 7 : Qualité permettent d’intégrer ces pratiques en valorisant la diversité comme source d’innovation et de cohérence dans l’action.
L’identité culturelle et l’ethnicité : La Clé 5 : Management favorise l’inclusion et la reconnaissance des identités culturelles, tandis que la Clé 2 : Posture contribue à réduire les fractures sociales en adoptant une attitude respectueuse et inclusive.
La modélisation des soft skills selon le référentiel edsm7c montre que ces compétences ne sont pas seulement des qualités individuelles, mais de véritables outils de régulation sociale. Elles permettent de transformer les différences socioculturelles en ressources collectives, en fluidifiant la communication, en réduisant les tensions et en favorisant la coopération.
Conclusion
« L’éducation consiste à donner à l’âme et au corps toute la perfection dont ils sont susceptibles. » Platon[3].
L’exemple emblématique de la différence socioculturelle s’illustre par la posture colérique adoptée par certains étudiants, il me suffisait alors de dire : « Quitter cette posture de nourrisson ou quitter cette pièce ». Cela avait un caractère éducatif surtout si l’on ajoute « Prenez les responsabilités de votre fonction d’étudiant ! ». La clé 2 Posture est alors efficiente, peu de mots pour un résultat instantané. Il m’a été donné de constater que ces formules s’appliquent, avec la même efficience, aux différents personnages colériques rencontrés.
Je laisse le soin de conclure cette chronique à Victor Hugo[4]« La liberté commence où l’ignorance finit. »
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[1] Albert Jacquard, 1925-2013, généticien français.
[2] Françoise Dolto, 1908-1988, pédiatre et psychanalyste française.
[3] Platon, vers 428 – 347 av. J.-C. philosophe grec.
[4] Victor Hugo, 1802-1885, homme de lettres français.
