L’entretien professionnel, qui a déjà fait l’objet de nombreux aménagements pendant la crise sanitaire, voit enfin son dispositif achevé avec la fixation de la date limite de versement de l’abondement correctif. A noter, cependant, qu’une dérogation est prévue pour les entretiens professionnels état des lieux récapitulatifs dont l’échéance survenait en 2020 et 2021.      

Pour rappel, l’entretien professionnel a été mis en place par la loi du 5 mars 2014[1].  Pour les salariés présents dans l’entreprise le 7 mars 2014, le premier entretien professionnel état des lieux récapitulatif, autrement appelé « Bilan à six ans », devait intervenir avant le 7 mars 2020. Avec la crise sanitaire, l’ordonnance du 1er avril 2020, puis celle du 2 décembre 2020[2] ont prévu successivement la possibilité de reporter l’entretien professionnel. L’employeur était donc autorisé à différer jusqu’au 30 juin 2021 tous les entretiens professionnels qui auraient dû se tenir entre le 1er janvier 2020 et le 30 juin 2021. Puis ce fut au tour de la loi sur la gestion de la sortie de crise[3] de reporter l’application de la pénalité jusqu’au 30 septembre 2021, avec une tolérance du Ministère du travail pour les bilans à six ans qui n’ont pas pu être organisés avant le 30 juin 2021. Un décret[4] du 30 décembre 2021 fixe enfin la date limite de versement de l’abondement correctif.  

Rappel : Report de la sanction jusqu’au 30 septembre 2021

A l'occasion de son embauche, le salarié est informé qu'il bénéficie tous les deux ans d'un entretien professionnel avec son employeur. Un accord collectif d'entreprise ou, à défaut, de branche peut prévoir une autre périodicité.

Tous les six ans, l'entretien professionnel fait un état des lieux récapitulatif du parcours professionnel du salarié souvent appelé « Bilan à 6 ans ». Cette durée s'apprécie par référence à l'ancienneté du salarié dans l'entreprise.

Dans les entreprises d'au moins cinquante salariés, lorsque, au cours de ces six années, le salarié n'a pas bénéficié des entretiens prévus et d'au moins une formation « non obligatoire »[5] , son compte personnel de formation (CPF) est abondé[6].

Avec la crise sanitaire, les ordonnances de 2020 n’ont pas fait que prévoir la possibilité de reporter l’entretien professionnel.

L’ordonnance du 1er avril 2020 avait également suspendu, à compter du 12 mars 2020 et jusqu'au 31 décembre 2020 l'application des sanctions prévues par la loi dans le cas où ces entretiens n'auraient pas été réalisés dans les délais.

De même, avec l’ordonnance du 2 décembre 2020, l’application des pénalités dues par les entreprises, d’au moins 50 salariés, qui n’ont pas respecté leurs obligations liées aux entretiens professionnels était suspendue jusqu’au 30 juin 2021.

Puis, la loi sur la gestion de la sortie de crise a reporté l’application de cette pénalité jusqu’au 30 septembre 2021.

Ainsi, pour les employeurs d’au moins 50 salariés, à compter du 12 mars 2020 et jusqu'au 30 septembre 2021, les textes relatifs à l’abondement correctif[7] ne sont pas applicables. A compter du 1er octobre 2021 la sanction était de nouveau applicable. De plus, pour apprécier son application, la date à laquelle l’employeur a procédé à l’entretien professionnel faisant un état des lieux récapitulatif du parcours professionnel du salarié doit être prise en considération compte tenu du nouveau report de délai.

Selon le Ministère du travail[8], « Compte tenu de ce report, pour les entretiens d’état des lieux qui n’ont pas pu avoir lieu avant le 30 juin 2021, l’employeur a donc jusqu’au 30 septembre 2021 pour réaliser les entretiens sans encourir de sanction ». Le Ministère du travail a donc apporté une tolérance pour les employeurs qui n’auraient pas pu organiser avant le 30 juin 2021 les entretiens professionnels état des lieux (ou Bilans à 6 ans).

Par ailleurs, le questions-réponses[9] sur le site du ministère du travail indique que le versement de l’abondement correctif est effectué dans le cadre des contributions au titre de la formation professionnelle. Pour les manquements constatés sur la période de mars 2014 à septembre 2021, l’abondement correctif doit donc être effectué depuis le 1er octobre 2021 et avant le 1er mars 2022, date limite de versement du solde de la contribution à la formation professionnelle. Cette date limite de versement est modifiée par décret.

Date limite de versement de l’abondement correctif

Lorsque l’employeur d’au moins 50 salariés est défaillant, le salarié bénéficie donc d’un abondement à son CPF de 3000 €.

En pratique, l’employeur adresse à la Caisse des dépôts et consignations les informations nécessaires à l'abondement[10], notamment son montant, le nom du salarié bénéficiaire ainsi que les données permettant son identification et verse la somme à la Caisse des dépôts et consignations qui en assure la gestion. Le compte du salarié concerné est alimenté de l'abondement correspondant dès réception de cette somme.

Le décret précise que le versement de la somme et la transmission des informations sont effectués, au plus tard, le dernier jour du trimestre civil suivant la date de l'entretien professionnel pris en compte pour apprécier la période de six ans (Entretien bilan à 6 ans)[11] .

Par exemple : si l’entretien bilan à 6 ans a lieu le 10 mars 2022, la date limite de transmission des informations nécessaires à l’abondement correctif et de paiement serait fixée au 30 juin 2022.

Par dérogation, le versement de la somme et la transmission des informations sont effectués au plus tard le 31 mars 2022, pour les sommes dues au titre des entretiens professionnels état des lieux récapitulatif (Bilan à 6 ans) dont l'échéance survenait en 2020 et 2021. Les employeurs ont donc un mois de plus, puisque pour les entretiens bilan à 6 ans dont l’échéance survenait en 2020 et 2021, il était prévu que l’abondement devait être versé entre le 1er octobre 2021 et le 1er mars 2022.

 

Muriel Besnard

Consultant Juridique

 

[1] Loi n° 2014-288 du 5 mars 2014 relative à la formation professionnelle, à l’emploi et à la démocratie sociale

[2] Ordonnance n° 2020-387 du 1er avril 2020 et ordonnance n° 2020-1501 du 2 décembre 2020

[3] Loi n° 2021-689 du 31 mai 2021, Journal Officiel du 1er juin 2021 – Article 8 - XIX

[4] Décret n° 2021-1916 du 30 décembre 2021 relatif au recouvrement, à l’affectation et au contrôle des contributions des employeurs au titre du financement de la formation professionnelle et de l’apprentissage, JO du 31 décembre 2021

[5] Formation « non obligatoire » : formation autre que celle mentionnée à l’article L. 6321-2 du Code du travail

[6] Le CPF est abondé de l’abondement correctif dans les conditions définies à l’article L. 6323-13 du Code du travail

[7] Le sixième alinéa du II de l’article L. 6315-1 du Code du travail et le premier alinéa de l’article L. 6323-13

[8] https://travail-emploi.gouv.fr/le-ministere-en-action/coronavirus-covid-19/questions-reponses-par-theme/article/entretien-professionnel

[9] https://travail-emploi.gouv.fr/IMG/pdf/qr-entretien-professionnel.pdf

[10] Première étape : les employeurs doivent s’habiliter sur la plateforme Net-Entreprises sur le service « Mon compte formation ».

Seconde étape : les employeurs peuvent ensuite accéder librement à l’espace des employeurs et des financeurs (Edef) accessible à l’adresse : www.financeurs.moncompteformation.gouv.fr/employeurs.

Troisième étape :  les employeurs renseignent ensuite les noms, les numéros de sécurité sociale des salariés concernés ainsi que les montants qu’ils souhaitent leur verser. Le paiement se fait par virement.

[11] Article R. 6323-3 du Code du travail